Quels sont les effets à court terme d’une pollution chronique en uranium ?
Avant d’entreprendre toute étude des effets d’un polluant sur l’évolution d’une population (c’està-dire étude multigénérationnelle), il est nécessaire de bien connaître à quelles concentrations les effets de ce polluant sont observés sur les traits d’histoires de vie de l’espèce étudiée. Il était en particulier nécessaire de déterminer une gamme de concentrations en uranium allant des concentrations qui ne perturbent pas la reproduction des individus aux concentrations entrainant la mort de 100 % des individus au sein de la population. De plus, à travers cette première expérience, nous voulions mesurer les effets de l’uranium sur les trois premières générations d’exposition pour commencer à appréhender la direction de la réponse évolutive pour chacun des traits étudiés. Nous souhaitions également mesurer la capacité d’acclimatation de la population dans un milieu contaminé à l’uranium. A notre connaissance, il existe extrêmement peu de données concernant les effets de l’uranium sur C. elegans (et sur les Métazoaires terrestres plus généralement), et aucunes sur la reproduction ou la croissance (Jiang et al., 2007 ; Jiang et al., 2009).
Quels sont les effets à court terme de l’uranium et du sel sur l’expression de la structure génétique des différents traits d’histoire de vie ?
La deuxième étape de ce projet était d’estimer la structure génétique des traits analysés et pour les concentrations en polluants retenues (voir article I et annexe B), car la variabilité génétique est un facteur essentiel à l’évolution d’une population. Les traits que nous avons choisis sont quantitatifs. Cette variation quantitative est supposée être influencée par un grand nombre de gènes aux effets individuels minimes (information génétique transmise dans les œufs pondus) et par l’environnement (milieu de développement). La distribution de ces traits est supposée suivre souvent une distribution normale même si d’autres distributions existent (Falconer & Mackay, 1996). Afin de faire face à la pollution par la sélection naturelle, la population de C. elegans étudiée doit disposer de mécanismes de résistance permettant une résistance, a minima chez certains génotypes. Le potentiel évolutif des individus à vivre dans un environnement très stressant dépendra de l’intensité des pressions de sélection, mais aussi de la structure génétique des traits d’histoire de vie. Si l’expression de cette structure peut changer dans un environnement stressant, il est nécessaire de quantifier ces changements afin d’estimer le potentiel évolutif de la population dans ce nouvel environnement. Nous avons donc étudié l’expression de la structure génétique des traits dans trois environnements (contrôle, uranium, sel) chez des lignées isogéniques. Hypothèses de travail : 1- Il existe une structure génétique des traits d’histoire de vie. 2- La structure génétique est stable malgré les changements d’environnement.
Quelle est la vitesse de réponse microévolutive des traits d’une population exposée à une pollution pendant plusieurs générations ?
L’objectif principal de cette partie était de mettre en évidence les modifications des valeurs de traits au travers des générations et de tester si ces modifications étaient associées à des changements génétiques intergénérationnels. En effet, l’habilité d’une population à s’adapter à des stress environnementaux dépend de sa variation génétique pour certains traits d’histoire de vie écologiquement essentiels. Pour ces traits polygéniques, les fréquences des allèles sur de nombreux loci peuvent changer en réponse à la sélection (Falconer & Mackay, 1996). Nous nous sommes intéressés également à la structure phénotypique entre les traits d’histoire de vie pour mettre en évidence tout changement de la structure génétique au cours du temps. Il est également supposé qu’un environnement fluctuant pourrait exercer des pressions de sélection variables sur une population, ce qui maintiendrait une certaine variance génétique des traits, contrairement à un environnement constant (par exemple Reed et al., 2003). Ainsi, les populations vivant dans un environnement variable devraient révéler une réponse évolutive plus faible. Dans cette expérience, nous avons quantifié les modifications phénotypiques d’une population de C. elegans exposée, pendant plusieurs générations, à différentes pollutions de son milieu de vie. Hypothèses de travail : 1- Les traits répondent à la sélection en quelques générations (microévolution). 2- La vitesse de réponse évolutive dépend du polluant (pressions de sélection différentes). 3- La vitesse de réponse évolutive dépend du type de pollution (constante ou fluctuante). 4- La réponse évolutive est dépendante de l’architecture génétique