Mise en forme temporelle d’impulsions laser ultra-brèves à l’aide d’un miroir résonnant

Mise en forme temporelle d’impulsions laser ultra-brèves à l’aide d’un miroir résonnant

Le miroir résonnant : modulateur de phase pure Maintenant que nous pouvons en théorie concevoir un filtre de phase quasi pur (énergie utile supérieure à 90%), il faut déterminer quelles sont les fonctions de phase accessibles avec une telle structure. L’excitation d’un mode guidé est accompagnée par un ‘’saut’’ de phase centré sur la longueur d’onde λ0 définie comme suit d’après la formule (2.15) du chapitre 2 des réseaux résonnants (p.44) : 0 e ( )i λ = n s + in θ Λ où ne représente l’indice effectif du mode guidé contrapropagatif (ne < 0), λ0 la longueur d’onde centrale du saut de phase, θi l’angle d’incidence du faisceau et Λ le pas du réseau de diffraction. Il est connu que la modulation d’une impulsion laser femtoseconde par un saut de phase spectral se traduit dans le domaine temporel par un dédoublement de l’impulsion [Renard 2004]. Les paramètres intervenant dans les caractéristiques de cette impulsion de sortie (amplitude et largeur de chaque pulse) sont le centrage du saut de phase par rapport au spectre de l’impulsion ainsi que l’amplitude du saut. Par conséquent un saut brutal de phase de 2π n’affecte pas le profil temporel de l’impulsion. Dans notre cas, un déphasage de 2π est apporté par l’excitation d’un mode guidé. Cependant, il ne s’agit pas exactement d’un saut abrupt, mais d’une fonction arctangente de 2π d’amplitude totale comme nous l’avons démontré dans l’expression (5.5) grâce à l’approche phénoménologique par modes couplés des réseaux résonnants. 

 

 Conception d’un miroir résonnant pour modulation de phase spectrale quasi-pure Nous venons donc de voir qu’il devrait être possible de concevoir un modulateur de phase quasi pur monolithique applicable à la mise en forme temporelle d’impulsions lasers femtosecondes à l’aide d’un réseau résonnant. Le paramètre ajustable dans ce composant optique est la largeur spectrale de résonance ∆λ. Le dispositif expérimental reste simple puisqu’il s’agit avant tout d’un miroir fonctionnant pour un angle d’incidence prédéfini. Dans cette section, la méthodologie de conception de ce type de modulateur de phase quasi pur est détaillée. La fabrication puis la caractérisation du prototype sont ensuite présentées. a. Méthodologie de conception Soit un profil d’impulsion, donné sur la figure 6.2, nécessaire à un processus laser femtoseconde. Celui-ci correspond à un déphasage spectral induit par un miroir résonnant dont la largeur spectrale de résonance ∆λ est définie. La difficulté réside alors dans la conception d’un miroir résonnant possédant de telles caractéristiques. Il faut tout d’abord choisir les matériaux diélectriques de haut et bas indices utilisés. La connaissance de leurs indices de réfraction à la longueur d’onde centrale du laser femtoseconde est primordiale en vue d’une optimisation numérique des paramètres du réseau résonnant. Il est ensuite nécessaire de prendre en considération les caractéristiques optogéométriques imposées par le processus laser visé : polarisation de l’onde incidente et angle d’incidence θi le plus pratique. L’épaisseur équivalente weq du guide d’onde est alors préférablement choisie de façon à ne pouvoir exciter que le mode fondamental. La connaissance de la polarisation de l’onde incidente et de l’épaisseur équivalente weq du guide d’onde permet de calculer l’indice effectif ne à partir de l’équation de dispersion (équation 2.6 et 2.7 du chapitre 2). La connaissance de cet indice effectif ainsi que l’angle d’incidence permet de déterminer par la formule des réseaux résonnants (équation 2.15 du chapitre 2) le pas du réseau de diffraction Λ nécessaire à l’excitation du mode. Le choix du métal utilisé pour le miroir est ensuite nécessaire. Il doit induire un minimum de pertes dans la bande spectrale de l’impulsion. La connaissance de la permittivité diélectrique du métal est donc également importante dans l’optique de la minimisation des pertes dans la structure. Quelques paires de lames quart d’onde de couches successives haut et bas indices peuvent être ajoutées. Celles-ci seront conçues pour la longueur d’onde centrale de l’impulsion femtoseconde avec l’angle d’incidence considéré initialement. La réflectivité du miroir sera ainsi accrue et proche de 100%. Le miroir ainsi constitué est alors ajouté au réseau résonnant conçu précédemment. Une couche tampon de bas indice est insérée entre les deux. Son épaisseur est optimisée conformément au paragraphe 2.c du chapitre 5. Le mode guidé est ainsi parfaitement isolé du métal. La quantité d’énergie de l’impulsion réfléchie est donc proche de 100%. De plus, il a été montré dans ce même paragraphe que ces conditions nous placent dans un cas favorable. En effet, les erreurs liées aux épaisseurs des couches, engendrées par la technologie de fabrication, minimisent alors l’erreur induite sur la largeur de résonance. Maintenant que le miroir résonnant est optimisé pour un maximum d’énergie réfléchie, il est nécessaire d’ajuster la largeur de résonance spectrale à la valeur souhaitée. La méthode expliquée dans la section 2.b du chapitre 5 doit alors être appliquée : la profondeur σ du réseau est ajustée tout en conservant l’épaisseur équivalente weq constante jusqu’à obtenir la largeur spectrale de résonance souhaitée.

Limitations technologiques et correction des paramètres du réseau

Le miroir résonnant vient donc d’être optimisé numériquement. Il est maintenant nécessaire de fabriquer la structure multicouche. Les techniques de dépôt de couche mince sont généralement basées sur la vaporisation ou la pulvérisation cathodique du matériau à déposer. Ces techniques impliquent généralement une erreur de quelques pourcents sur l’épaisseur visée. Ces erreurs sur les épaisseurs des couches induisent deux problèmes à résoudre pour l’obtention de la largeur spectrale de résonance souhaitée à la longueur d’onde centrale de l’impulsion laser femtoseconde. Tout d’abord, l’erreur induite sur l’épaisseur de la première couche guide d’onde implique une modification de l’indice effectif ne du mode guidé. Les conditions d’excitation du mode guidé sont donc changées. La longueur d’onde et l’angle d’incidence étant fixés, il sera nécessaire de réadapter le pas du réseau par le biais de l’équation (2.15) du chapitre 2. De plus, la largeur de résonance du réseau résonnant initial sera également modifiée. Il est donc primordial de connaître l’épaisseur de la couche guide d’onde à ce stade de la conception. Pour ce faire, il faut mesurer l’indice effectif du mode guidé. Une technique type M-lines peut être utilisée. L’équation de dispersion (2.6) (voir chapitre 2) d’un guide d’onde plan est alors utilisée pour calculer l’épaisseur de la couche guidante. Une autre méthode est également envisageable. En effet, il est possible de déposer une couche de résine puis de fabriquer un réseau de diffraction par voie interférométrique. Une caractérisation type AFM donne alors la profondeur σ du réseau. La mesure du pas Λ du réseau sera préférablement effectuée à l’aide d’un montage de Littrow. Ensuite l’angle d’excitation θi du mode à l’aide d’une source de longueur d’onde λ0 et de polarisation connues est recherché. La structure avec réseau en résine est alors modélisée numériquement à l’aide d’un programme spécialement développé à cet effet [Lyndin 2006]. L’épaisseur de la couche guidante est optimisée jusqu’à ce que les deux angles d’excitation numérique et expérimental concordent. L’épaisseur de la couche supérieure de la structure est alors connue avec une précision satisfaisante en vue d’une optimisation plus poussée du miroir résonnant. Le deuxième problème réside dans les erreurs sur les épaisseurs des couches tampon et quarts d’ondes. En effet, ces couches vont induire un déphasage à l’onde réinjectée dans le réseau résonnant qui ne satisfera plus la condition optimale de la section 2.c du chapitre 5. La largeur spectrale de résonance ne sera donc plus celle visée et les pertes énergétiques seront accrues. Il est donc nécessaire de mesurer le déphasage réel qu’introduit le miroir avant de modéliser les corrections à apporter aux paramètres du réseau de diffraction. Une fois l’épaisseur de la couche-guide et le déphasage du miroir connus, une optimisation numérique du pas et de la profondeur du réseau de diffraction peut être effectuée afin d’obtenir la largeur de résonance spectrale souhaitée pour la longueur d’onde de résonance souhaitée. 

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