Couplages des méthodes rigoureuses
De nombreux couplages ont été développés à partir des méthodes rigoureuses pour l’analyse de la CEM entre dispositifs hyperfréquences ou l’étude du rayonnement d’une antenne en espace libre. Parmi les méthodes rigoureuses, certaines sont basées sur les champs électromagnétiques (méthodes volumiques) tandis que d’autres sont basées sur les courants (équations intégrales). Le couplage entre ces différentes méthodes permet l’analyse de problèmes multi-échelles. En effet, à partir des courants on peut obtenir l’expression du champ rayonné dans tout l’espace, ce qui n’est pas envisageable avec les méthodes volumiques basées sur les champs, et qui nécessitent d’échantillonner tout l’espace d’analyse. De plus, leurs capacités à modéliser des objets complexes — de forme géométrique quelconque — en font des méthodes privilégiées pour l’analyse de dispositifs dont les formes sont complexes. Aussi elles permettent l’analyse du couplage électromagnétique entre des objets proches ou l’analyse du rayonnement d’un dispositif dans un milieu inhomogène. Une autre solution consiste à définir des surfaces fictives autour d’un objet pour en chercher les courants de surface. Typiquement, chaque objet est placé à l’intérieur d’un volume de calcul (TLM, FDTD par exemple) et entouré d’une surface fictive dont on cherche à déterminer les courants de surface. On utilise souvent la technique Marchingon-in-Time pour déterminer ces courants [MMR97], [MW05]. Le champ tangentiel de chaque surface fictive provient du champ électromagnétique du volume de calcul propre de l’objet et du champ rayonné par l’ensemble des objets, y compris lui-même. Ceci permet ainsi de calculer le champ électromagnétique en tout point de l’espace. Parmi ces couplages, on peut citer celui d’une méthode volumique telle que la méthode TLM avec les équations intégrales (TLM-IE) qui est très bien adapté à la modélisation des interactions électromagnétiques entre des objets complexes séparés par une grande distance (grande région d’espace libre) [LPR99]. Les objets (volumiques) sont modélisés par la TLM tandis que les éléments de surface des sous régions (surfaces des objets) sont couplées avec la méthode des équations intégrales via des fonctions de Green dans le domaine temporel. Aussi, ce couplage a permis l’étude par exemple du rayonnement d’une ligne micro-ruban en zone de champ proche et en zone de champ lointain [PLR98]. On peut également citer le couplage entre la TLM-IE et la TD-MoM 1 pour l’analyse de structures rayonnantes dans des environnements de propagation en présence d’obstacles et plus particulièrement pour étudier le couplage en zone de champ proche d’une antenne patch avec des objets métalliques [KR07]. On trouve d’autres types de couplage entre la TLM et la FDTD ou entre la FDTD et la MoM pour la résolution de problèmes de CEM [EH96], [PLR99]. Ou bien encore entre la TLM et la MoM pour étudier les interférences entre antennes [NMBS08]. On peut aussi utiliser la MoM pour modéliser la condition d’espace ouvert d’une structure rayonnante (pas d’échantillonnage nécessaire du volume) et la FEM pour modéliser un 1. Time Domain – Method of Moments. 48 Couplages des méthodes asymptotiques milieu inhomogène (corps/objets diélectriques) en termes de distribution des champs à l’intérieur d’un volume. Citons également un couplage entre la méthode spectrale et la FDTD pour l’analyse de milieux anisotropes, inhomogènes et périodiques [CGS93]. Ce type de couplage permet aussi le traitement de problèmes multi-physique en choississant par exemple une méthode pour traiter des aspects électromagnétiques et une autre pour les aspects thermiques [Tri08].
Couplages des méthodes asymptotiques
Nous avons vu au chapitre précédent une technique de lancer hybride : le lancer de faisceaux adaptatifs cf. Section 3.3.3 p. 45. Ce n’est pas à proprement parler un couplage entre méthodes mais bien une méthode particulière. On la nomme hybride car elle allie certaines caractéristiques des méthodes de lancer de rayons et de lancer de faisceaux. Des techniques de couplages entre méthodes asymptotiques existent et notamment entre les méthodes basées sur les champs électromagnétiques et celles basées sur les courants. Une d’elle utilise le lancer de rayons avec la PO/PTD pour déterminer la SER 2 d’une cible [Wei06]. L’idée est de combiner l’algorithme du lancer de rayons avec les principes de la PO et de la PTD. La technique consiste à décomposer la surface de l’objet « cible » par un grand nombre de rayons et d’utiliser la PO/PTD pour calculer le courant à la surface de l’objet ainsi échantillonné. L’intégrale de surface de la PO/PTD se réduit alors comme la somme des contributions des rayons sur chaque élément de surface. Une autre méthode utilisant les principes de la diffraction optique et physique, c’est-àdire UTD et PO, a été développée pour tenir compte des diffractions multiples d’une onde sphérique sur une série d’obstacles parfaitement conducteurs [RMGPJL09]. Ces obstacles peuvent avoir différentes formes canoniques tels que des coins, des arêtes ou des cylindres. Cette formulation n’a pas besoin de tenir compte des termes de diffraction de plus haut degré (slope-diffraction) qui assurent la continuité et améliore la précision entre les zones d’ombre de l’UTD. En effet, l’utilisation de l’UTD est limitée dans les zones de transition. On évalue seulement la diffraction simple à laquelle s’ajoute la formulation de la PO pour les multiples diffractions. On peut également citer un couplage entre la GO et la PO/PTD pour déterminer la SER d’une cible radar [VW09]. Cependant, ces approches sont limitées à l’étude en champ lointain (hypothèse haute fréquence) d’objets relativement simples. L’hybridation des méthodes numériques et asymptotiques suscite un grand intérêt dans un compromis entre précision et temps de calcul. 2. Surface Équivalente Radar, en anglais RCS pour Radar Cross Section. 49 Méthodes Hybrides Les méthodes rigoureuses étant plutôt dédiées à l’étude d’objets électriquement petits et les méthodes asymptotiques aux objets électriquement grands, il semble donc très intéressant de coupler ces méthodes entre-elles afin d’étudier des problèmes multi-échelles de rayonnement, de diffraction et de couplage d’antennes sur des structures de grandes dimensions. Deux types de problèmes électromagnétiques se posent dans ce genre de couplage. On cherche généralement à étudier les interactions d’une source avec un objet de grande ou de petite dimension. Dans le premier cas, le problème consiste à modéliser la source par une méthode rigoureuse appropriée et à étudier l’interaction avec un objet de grande dimension par une méthode asymptotique. D’une manière générale, l’utilisation de méthodes rigoureuses dans ce cas consiste à déterminer les courants pour appliquer ensuite une méthode physique telle que la PO ou la PTD par exemple. A contrario, dans le second cas, la source est modélisée à l’aide d’une méthode asymptotique (typiquement lancer de rayons) et l’objet de petite dimenson avec une méthode rigoureuse. Dans ces deux cas, la source et l’objet doivent être placés relativement loin l’un de l’autre, ce qui exclut ou du moins rend difficile l’étude du couplage entre eux. Ceci nécessite que l’objet considéré doive être de dimension comparable à la longueur d’onde, auquel cas, le volume de calcul deviendrait beaucoup trop important. De plus, la source doit se trouver en zone de Fraunhofer (zone de champ lointain). En effet, plus la source est éloignée et plus l’effet de couplage diminue. La FDTD est une des méthodes le plus souvent utilisée pour réaliser des couplages de méthodes électromagnétiques, comme la FDTD et l’UTD [BEJ96], [Bea02a] par exemple. Un problème typique est l’analyse en zone de champ lointain du champ électromagnétique rayonné par une antenne placée à proximité d’un réflecteur (plan fini). On peut citer également le couplage entre la méthode TLM et la TD-PO 3 pour obtenir le diagramme de rayonnement d’une antenne proche d’un réflecteur [Lan08]. La TLM respectivement la TD-PO sont utilisées pour modéliser les objets complexes de petites dimensions respectivement les structures électriquement grandes. Ce type de problème du couplage entre des antennes et de larges structures métalliques peut aussi être étudié par le couplage entre la FEM et l’UTD [HPB00]. Ou bien encore la MoM-GTD pour étudier le couplage d’une antenne proche d’un objet conducteur de grande dimension tel que les antennes sur des porteurs par exemple [TN75], [DT84]. La MoM est utilisée pour modéliser l’antenne tandis que la GTD est utilisée pour analyser le rayonnement électromagnétique de l’objet dans l’espace. La MoM-UTD peut être utilisée pour l’étude du couplage entre les ouvertures d’antennes cylindriques [PJ01]. Le calcul des champs à l’intérieur de l’ouverture est effectué par la MoM et l’UTD est utilisée pour déterminer les champs rayonnés d’une ouverture à l’autre. On trouve aussi un couplage entre la FDTD et la PO [Boz98] pour l’étude du champ électromagnétique rayonné par des structures de dimensions différentes. Ce couplage donne des résultats d’autant plus corrects que l’on se situe loin de l’objet réflecteur, 3. Time Domain – Physical Optic. et où le phénomène de réflexion devient prépondérant devant le phénomène de diffraction car l’optique physique ne tient pas compte de la diffraction. Aussi, on peut citer la FDTD couplée au lancer de rayons [Bea02b] [WSNC00]. Le lancer de rayons est utilisé pour les zones d’espace libre et la FDTD pour analyser les objets complexes (comportant des discontinuités) où les solutions basées sur le lancer de rayons ne sont pas suffisamment précises. Ce sont typiquement des situations de propagation indoor ou de rayonnement d’une antenne en espace libre. Dans le même type de problème, on trouve aussi du couplage entre la FEM et la PO-PTD [Din04]. D’autre méthodes encore telles que la MoM-PO [JL95] pour tenir compte d’un coin parfaitement conducteur ou l’UTD-FDTD [RMP] pour étudier le rayonnement d’une structure cylindrique. Le simulateur FekoTM utilise aussi la MoM-UTD, la MoM-GO ou la MoM-PO pour traiter de problèmes électromagnétiques divers. Généralement les méthodes hybrides couplent deux méthodes. D’autres, dites « multihybrides » mettent en œuvre un couplage entre trois voire quatre méthodes pour certaines. Ceci dit la mise au point de tels couplages de méthodes peut devenir relativement complexe, c’est pourquoi souvent les couplages se limitent à deux méthodes. Parmi ces méthodes multi-hybrides, on peut mentionner un couplage entre la FDTD, la TD-MoM 4 et la TD-FEM 5 [Mea04]. Aussi entre la FDTD, la TD-MoM et la GTD [BH05] ou bien encore entre la FEM, la PO/PTD et l’UTD [FRGCGRSP07]. L’ensemble de ces méthodes n’est qu’un aperçu des techniques de couplage existantes, la liste étant loin d’être exhaustive. La plupart des méthodes mentionnées ont été développées dans les domaines temporel et fréquentiel et on trouve des couplages entre la plupart d’entre-elles. En effet elles permettent chacune de couvrir avec une certaine précision (fonction des hypothèses de départ) un certain domaine d’analyse.