Analyse globale et analyse par phase du comportement de l’acier 16MND5
L’acier 16MND5 est utilisé dans la conception des cuves de stockage de nombreux réacteurs à eau pressurée (REP) des centrales nucléaires d’EDF. Le matériau de l’étude est un acier faiblement allié, classiquement désigné 16MND5 (appellation U.S : A508 classe 3. Désignation AFNOR : 16MnNiMo5). Il s’agit d’un acier biphasé composé d’une matrice ferritique renforcée par des précipités de cémentite. La composition chimique du matériau est donnée dans le tableau I-1. L’acier a subi un traitement thermique en trois étapes : deux austénisations à 850 °C pendant 4 heures suivies de trempes à l’eau ; un revenu entre 630 °C et 645 °C pendant 7 heures pour améliorer sa ténacité et enfin un maintien en température à 610 °C durant 8 heures pour relaxer les contraintes résiduelles. A la fin du traitement, une bainite revenue est obtenue, la fraction volumique de cémentite étant de 2 %. Les nombreux travaux de recherche qui ont caractérisé l’acier de cuve s’accordent globalement sur sa microstructure et la répartition de ces principaux constituants [(Lambert- Perlade, 2001), (Mathieu, 2006), (Libert, 2007)] ; les observations effectuées ont mis en évidence les entités suivantes : La complexité de la microstructure de l’acier de cuve rend difficile le discernement des grains : on distingue, néanmoins, une taille de grains moyenne de 40 – 50 µm correspondant aux anciens grains austénitiques [(Renevey, 1998), (Osipov, 2007)]. Les joints de grains sont marqués par la présence de carbures de fer qui leur donnent une apparence claire sous le Microscope Electronique à Balayage (MEB). On peut également apercevoir des sous- structures à l’intérieur des grains, des lattes de ferrite séparées par des colonies de précipités de cémentite : ce sont les paquets bainitiques (figure I-1). Dans l’acier 16MND5, il est difficile de distinguer les joints de grains des anciens grains austénitiques, des joints de grains des paquets bainitiques.
La ferrite
C’est le principal constituant de l’acier 16MND5, avec une fraction volumique autour de 98 %. Les agrégats de ferrite se présentent sous forme de lattes fines ; l’épaisseur de chaque latte est comprise entre 1 et 2 µm [(Sekfali, 2004), (Hausild, 2005)]. Ces auteurs précisent aussi que les lattes se présentent sous forme de paquets constitués de 4 à 5 lattes en moyenne ; la taille des paquets est proche de 10 µm. Afin de faciliter l’observation des lattes ferritiques, Lambert-Perlade et al. [(Lambert- Perlade, 2004)] recommandent d’utiliser la diffraction d’électrons rétrodiffusées EBSD (figure I-3). Obrtlik et al. [(Obrtlik, 2007)] ont utilisé un MET (Microscope Electronique à Transmission) pour réaliser leurs observations. Les sulfures de manganèse sont des inclusions non métalliques présentes dans l’acier 16MND5 avec une fraction volumique inferieure à 0,1 % [(Hausild, 2005)]. Ils se présentent principalement sous forme allongée, probablement due à une déformation au cours du forgeage de l’acier de cuve : les inclusions MnS s’orientent perpendiculairement au sens du forgeage [(Tanguy, 2001)]. Leur taille varie selon leur aspect : les inclusions MnS de forme ellipsoïdale peuvent atteindre jusqu’à 60 µm, alors que les inclusions sphéroïdales sont de taille beaucoup plus petite, avec un diamètre de quelques micromètres. Ces inclusions peuvent êtres isolées ou groupées en amas de 3 à 8 inclusions [(Libert, 2007)].
La composition et l’élaboration de l’acier de cuve favorisent la formation de petits précipités de cémentite (figure I-4) ; ils sont principalement sphériques et leur taille moyenne est de quelques centaines de nanomètres. Ces précipités influent directement sur les caractéristiques mécaniques de l’acier de cuve : les précipités les plus fins augmentent la limite élastique et la ténacité, mais ils réduisent aussi la ductilité [(Kim, 2001)]. La répartition des inclusions de cémentite dans l’acier 16MND5 est hétérogène. On peut trouver des précipités de cémentite en position intragranulaire entre les lattes de ferrite, groupés en amas/colonies ou encore dispersés dans l’ensemble de la structure. Des précipités intergranulaires peuvent aussi être observés le long des joints de grains. Ils se présentent avec des tailles supérieures à celles relatives aux carbures intragranulaires : 1 µm contre 100 nm [(Carassou, 1999)]. Les propriétés mécaniques de l’acier de cuve dépendent essentiellement de la température à laquelle il est soumis ; l’acier est ductile à haute température et devient fragile quand celle-ci est basse. En service et sous l’effet des différentes sollicitations (irradiations, pressions, cycles thermiques…), le comportement de l’acier est susceptible d’évoluer, notamment on peut observer un décalage de sa zone de transition fragile-ductile vers les basses températures [(Renevey, 1998)]. A cet effet, les programmes de surveillance des réacteurs prennent en compte la variation des propriétés mécaniques de l’acier de cuve (résilience, mode de rupture, limite élastique, résistance mécanique), en mettant en œuvre différentes techniques expérimentales pour expertiser leurs évolutions, tout au long du cycle de vie du réacteur.