Matériaux métastables et leurs évolutions microstructurales
Les aciers inoxydables métastables
Les aciers inoxydables
L’acier, étant le produit de base pour presque toutes les applications mécaniques, est confronté, lors de son utilisation, à des problèmes d’oxydation qui participent à sa détérioration. Ainsi, la nécessité d’avoir des aciers qui résistent à l’oxydation pour diverses utilisations est à l’origine des aciers inoxydables. Ces derniers, comme leur nom l’indique, sont des aciers résistant à l’oxydation. Ils ont la particularité de résister à la corrosion dans diverses conditions d’usage (dans l’eau, à l’air ambiant et dans des milieux hautement corrosifs). Ils sont protégés par un effet d’alliage en ajoutant à leurs compositions chimiques un taux de chrome de l’ordre de 18 % [5]. L’avantage de ce genre de protection est que dès la destruction de la couche protectrice à base d’oxyde de chrome, le chrome contenu dans l’acier s’oxyde rapidement pour protéger à nouveau cet acier contre la corrosion [5,7]. Cela est dû au fait que le chrome posséde une énergie d’oxydation plus élevée que l’acier [5]. Le taux de chrome contenu dans un acier inoxydable détermine la qualité de sa résistance à la corrosion [30]. Cet effet de passivation du chrome dans l’acier a été découvert en 1920 et a donné naissance à ce type d’aciers [44]. 5 Chapitre 1 Matériaux métastables et leurs évolutions microstructurales En plus du fer, du chrome et du faible taux de carbone et afin d’éviter la précipitation de carbure de chrome influençant la résistance à la corrosion, ce type d’acier contient d’autres éléments d’alliages. Par exemple, le molybdène, qui à son tour stabilise la couche en oxyde de chrome et protège le matériau contre l’oxydation par piqûre [6]. De multiples nuances d’aciers inoxydables sont élaborées afin de répondre à des exigences particulières, telles que la résistance à la corrosion dans des milieux industriels hautement corrosifs. Ainsi, on les trouve dans des secteurs sensibles, tels que le secteur agroalimentaire [37], sanitaire et nucléaire [30]. Le classement 1 des différents types d’aciers inoxydables existants est, généralement, fait suivant leurs structures cristallographiques. Celles-ci peuvent être déterminées grâce au diagramme de Schaeffler (Figure 1.1) en se basant sur la connaissance de leurs compositions chimiques.On trouve les aciers ferritiques α, les aciers martensitiques α ′ , les aciers austénitiques γ, les aciers austénito-ferritiques et les aciers inoxydables à haute caractéristique.
Les aciers ferritiques
Les alliages de fer-chrome sont en général des aciers ferritiques à condition de ne pas traverser la boucle γ mentionnée dans la figure 1.2 pendant leur élaboration. Dans ce cas, la teneur en carbone doit être limitée pour une teneur en chrome donnée. Les éléments principaux d’alliage alphagènes favorisant l’apparition de la structure α sont le chrome, le molybdène et le silicium.
Les aciers martensitiques
Afin d’obtenir un acier martensitique, il faut entrer dans la boucle γ (Figure 1.2) pour tremper la structure austénitique. De ce fait, la teneur en carbone doit être élevée d’autant que la teneur en chrome. La martensite est une phase plus dure et fragile quand le taux de carbone est élevé. Généralement, ces aciers ont de mauvaises caractéristiques pour la mise en forme et la soudabilité.
Les aciers austénitiques
Les aciers inoxydables austénitiques métastables sont obtenus en stabilisant la phase austénitique à température ambiante. Cette stabilisation est effectuée grâce aux additifs 1. Dans la normalisation des États-Unis, les aciers inoxydables sont classés dans deux groupes [30]. — Les aciers contenant du fer et du chrome et qui sont référencés par le nombre 400 ; — Les aciers contenant du fer du chrome et du nickel et qui sont référencés par le nombre 300. 6 1.2 Les aciers inoxydables métastables Figure 1.1 – Diagramme de Schaeffler. Figure 1.2 – Diagramme fer-chrome [30]. 7 Chapitre 1 Matériaux métastables et leurs évolutions microstructurales ajoutés lors de l’élaboration de cet acier. Une trempe permet d’obtenir de l’austénite à l’état métastable à température ambiante [40]. Les principaux éléments gammagènes favorisant l’apparition de la phase austénitique γ sont le nickel, vu sa structure cubique à faces centrées, le carbone, l’azote [6] et le manganèse [30]. Un enrichissement en carbone permet de maintenir l’austénite dans le matériau à température ambiante [9, 17], il favorise la stabilité de l’austénite en le stabilisant chimiquement [12]. L’augmentation de la teneur en nickel augmente aussi la phase γ. Par opposition, le taux de la phase γ diminue avec l’augmentation du taux de chrome dans l’acier inoxydable. Plus de détails sur ce type d’acier seront présentés dans la section 1.2.2 et dans la section 1.2.3.
Les aciers austénitiques métastables
Plusieurs aciers inoxydables austénitiques sont métastables à température ambiante [13]. Ils sont rès ductiles [30,40] et ont aussi une bonne ténacité dans une large gamme de température. Dans ces aciers, une transformation de phase martensitique peut avoir lieu même au cours d’un refroidissement naturel. En effet, la particularité de ces aciers est leur structure austénitique cubique à faces centrées (CFC) (Figure 1.3(a)) [40] qui se transforme en une structure martensitique cubique centrée (CC) (Figure 1.3(b)) en fonction de la contrainte et la température. Cette transformation dite transformation de phase martensitique peut avoir lieu suite à un chargement thermique provoqué ou naturel ou suite à une déformation plastique. (a) Structure CFC. (b) Structure CC. Figure 1.3 – Structure cristalline de l’austénite et de la martensite [44]. Ce type d’acier, possédant des caractéristiques très importantes et particulières, est utilisé dans plusieurs domaines.
Les aciers inoxydables métastables
Propriétés et applications
Les aciers austénitiques métastables et plus particulièrement le 304L sont très utilisés du fait de leur grande résistance à la corrosion, de leur formabilité et de leur soudabilité [30]. Ils sont exploités dans plusieurs applications, telles que la pétrochimie, les implants biomédicaux ou dans l’industrie agroalimentaire, par exemple dans l’industrie du sucre de canne [37]. Les aciers austénitiques ont aussi des propriétés mécaniques importantes permettant leur utilisation dans des réacteurs nucléaires. Ainsi, la structure interne de ceux-ci est exclusivement en acier austénitique. Ce dernier est soumis à des chargements thermiques, mécaniques, chimiques et de radiation pendant son exploitation. Leur ductilité , étant la plus élevée entre les matériaux [30], leur permet de résister à la fragilisation causée par le rayonnement neutronique. Parmi les aciers austénitiques utilisés dans ces réacteurs, on trouve AISI 304 et AISI 316 [1], plus particulièrement, l’acier austénitique 316 du fait de sa grande résistance à la corrosion et de ses propriétés mécaniques à haute température [47]. En outre, les aciers austénitiques peuvent être utilisés en cryogénie, puisque leur phase austénitique très ductile peut être maintenue à très basse température, à proximité de -273 °C [30]. Par exemple, vu que le transport de gaz liquéfié se fait à très basse température et afin d’assurer l’étanchéité des citernes de transport de gaz liquéfié de GTT, le matériau utilisé doit avoir des propriétés mécaniques importantes, répondant à ces conditions. Dès lors, la couche interne de ces citernes est faite à base d’un acier iTRIP de grade 304L (Figure 1.4(a)). Cette couche a pour utilité d’absorber les déformations résultantes à très basse température (-136°C) [56]. Durant son élaboration, cette partie est déformée plastiquement (Figure 1.4(b)), engendrant par conséquent l’apparition de la martensite α ′ .