ENSEIGNEMENT ET ENSEIGNANT
Nous avons entrepris ce travail dans le but d‟approfondir nos connaissances dans le domaine de la DDL. À la suite des observations sur le processus d‟apprentissage et sur le rôle de l‟apprenant, recueillies dans les deux chapitres précédents, focalisons maintenant notre attention sur l‟enseignement. En effet, pour aider l‟individu impliqué dans le processus d‟apprentissage, il existe plusieurs méthodes et procédures auxquelles l‟enseignant peut recourir, selon la situation et le contexte. Dans le but de préciser les caractéristiques de notre recherche, nous réfléchirons sur le terme « didactique » (notamment, par rapport aux L2, en particulier au français) et nous en montrerons les liens avec le terme « pédagogie ». Nous esquisserons ensuite l‟histoire de l‟évolution des méthodologies de l‟enseignement des langues, et surtout du FLE. Nous aborderons, enfin, l‟enseignement en milieu scolaire (contexte de notre recherche) et nous mettrons en relief la fonction sociale et sociocognitive de l‟enseignement. L‟étape suivante nous conduira à nous pencher sur la profession enseignante, dont la problématique est souvent au cœur de nombreux débats, dans plusieurs contextes, produisant des résultats pas toujours conformes aux attentes de l‟opinion publique et des professionnels du secteur. Notre recherche s‟inscrivant dans le cadre de l‟enseignement/apprentissage des langues dans les établissements italiens du secondaire, nous réfléchirons davantage sur les acquis préalables, sur les caractéristiques, sur la formation, sur le rôle et, donc, sur le travail proprement dit de l‟enseignant de langues œuvrant au lycée (en l‟occurrence, dans la filière scientifique). Quelques observations de caractère psychopédagogique, susceptibles d‟aider les professeurs dans la gestion de la classe, dans la planification des cours et dans l‟interaction cognitive avec chaque apprenant, nous seront utiles afin de mettre en relief le rôle-clé de l‟enseignant dans l‟apprentissage des langues à l‟heure des TIC, intervenant notamment en fournissant des données de la L2 à l‟apprenant, en examinant la production de celui-ci et – détail non négligeable – comme agent de l‟acquisition de la conscience socio-culturelle des jeunes.
siècle ; on trouvait, à sa place, pédagogie pratique, pédagogie vécue, méthode, méthodique, méthodologie spéciale, ou technique pédagogique (Sarremejane 2001). Dans l‟usage moderne du terme, il résulte d‟une fusion qui a eu lieu dans les zones de contact entre les traditions linguistique et théorique germanique et française (Caravolas 1994, Knecht-von Martial 1985, Perugini, 2001 in Caravolas 1994 : 35). Selon Carravolas, « depuis les années 1970, la didactique s‟est établie comme partie centrale des sciences de l‟éducation et de l‟enseignement des disciplines. On a maintenant une didactique générale et, plus récemment, des didactiques spéciales élaborées pour chaque discipline, dont la didactique des langues » (Idem). Aujourd‟hui, le Dictionnaire de didactique du français illustre le terme didactique (dérivant du grec didaskein, enseigner) comme un vocable désignant, en général, « ce qui vise à enseigner, ce qui est propre à instruire… ». En outre, la didactique des disciplines concerne des discours sur les pratiques et une réflexion sur les disciplines scolaires, y compris les LVE (Cuq 2003 : 69-70). Abordons maintenant le terme en question dans le contexte, justement, de la didactique des langues. En essayant de définir ce domaine, Puren a écrit que la didactique des langues étrangères (DLE) est la « discipline d‟observation et d‟intervention sur le processus conjoint d‟enseignement et d‟apprentissage des langues-cultures » (Puren 2000 : 21). M.-F. Narcy- Combes a affirmé que ce terme désigne :
Selon cette auteure, en France on peut distinguer trois grands courants en didactique des langues : linguistique, historique, praxéologique. Dans le premier, proche de la linguistique de l‟énonciation, « le didacticien se rattache à un courant linguistique, et analyse le terrain en fonction des théories de ce courant » (idem : 17). Dans le deuxième, « le didacticien étudie l‟histoire des méthodologies d‟enseignement des langues et construit une théorie didactique à partir de cette étude » (idem). Dans le troisième, praxéologique, C‟est justement suivant cette méthodologie que nous avons conduit notre recherche : grâce à l‟observation du terrain, nous avons essayé de savoir si les théories des sciences de fondement retenues pouvaient répondre à notre problématique de recherche portant sur l‟enseignement/apprentissage du français de spécialité dans le lycée scientifique italien (cf. chap. 9). L‟auteure a même repris Bailly (1997), qui distingue, entre autres, trois domaines de didactique : la « didactique institutionnelle », la « didactique des chercheurs » et la « didactique personnelle ». On trouve la didactique institutionnelle notamment dans les Instructions et dans les Programmes officiels, s‟agissant du « champ de référence qui sous- tend les Instructions et Programmes officiels » (1997 : 17), faisant référence à l‟autorité du pays où l‟enseignement a lieu et, donc, aux objectifs pédagogiques visés, à l‟évaluation et à la régulation° La didactique personnelle est construite par chaque enseignant de terrain averti ; elle dérape si elle néglige soit le savoir apporté par la recherche soit les réalités du terrain : son rôle consiste, en effet, à mettre en œuvre une pédagogie efficace (Narcy-Combes, M.-F. 2005 : 17). C‟est une didactique reflétant les croyances des enseignants, construite implicitement dans le temps, sans recours aux sciences de fondement, visant à la construction de liens entre théorie et pratique (Bailly 1997 : 165 in idem). Nous souhaitons inscrire notre travail dans ce type de recherche, à la lumière des sciences, afin de mieux comprendre les phénomènes liés à l‟enseignement/apprentissage des LVE. Comme ce travail est fondé sur la recherche-action, il devrait viser à l‟analyse des pratiques, se rattachant aux RAL (Narcy-Combes, J.-P. 2005 : 132). C. Weber a considéré le champ en objet à la fois comme discipline d‟enseignement, de formation et comme outil de pratique professionnelle : « [il] entretient certes des liens étroits avec les disciplines théoriques et connexes, mais en tant que champ pluridisciplinaire, il s‟attache surtout aux fondements de sa science, c‟est-à-dire à son épistémologie… » (Weber 2007 : 18). En définitive, nous pouvons relever que la didactique produit bien sûr des instruments et des prescriptions, mais aussi qu‟elle « ne produit pas seulement des théories, elle fabrique également de nouveaux dispositifs et des instruments qu‟elle cherche ensuite à diffuser largement… » (Goigoux 2000 : 128). Par rapport à notre expérience professionnelle et à notre travail expérimental, nous nous rattachons, respectivement, à la « didactique personnelle » et à au courant « praxéologique » (Narcy-Combes, M.-F. 2005).