Calibration du modèle empirique
Revue des méthodes de calibration existantes
Plusieurs procédures de calibration des modèles empiriques avec des mesures stabilisées de la viscosité apparente de la mousse (ou encore du gradient de pression) sont disponibles dans la littérature. Ces méthodes permettent d’ajuster les paramètres du modèle sur la base d’expériences réalisées avec différentes qualités de mousse et à vitesse totale constante. Ce méthodes sont examinées et discutées ci-après.
Boeije et Rossen (2015) ont proposé une procédure manuelle simple pour calibrer les modèles empiriques avec des mesures de la viscosité apparente. La procédure est basée sur six étapes traitant séparément les données des deux régimes faible et haute qualité. Leur approche suppose une transition abrupte entre les deux régimes, c’est-à-dire de grandes valeurs de Θ sont fixées à l’avance (Θ entre 104 et 105 ). Par ailleurs, les hypothèses de travail incluent une saturation en eau constante et une rhéologie de mousse newtonienne dans le régime haute qualité. Autrement dit, on suppose que le gradient de pression diminue linéairement avec la qualité de la mousse dans ce régime. Les autres paramètres du modèle empirique sont calculés étape par étape. L’approche est simple dans la mesure o`u elle peut être appliquée directement sur le graphique des données au moyen d’une règle, d’un crayon et d’une calculatrice. Néanmoins, la méthode ne peut pas ajuster correctement une transition progressive entre les deux régimes. Dans ce cas, les auteurs proposent d’utiliser les résultats de leur méthode pour initier un ajustement par moindres carrés.
Lotfollahi et al (2016) ont utilisé la méthode de minimisation par moindres carrés non linéaire pour calibrer les modèles empiriques et à lamelles de deux séries de données expérimentales issues d’Alvarez et al et Moradi-Araghi et al. L’ajustement est fait conjointement sur les deux régimes en utilisant toutes les mesures. Les paramètres du modèle empirique à optimiser sont Mref, S ∗ w, Θ et ec. Les limitations de cette méthode sont principalement liées aux lacunes de la minimisation par moindre carrés : l’ajustement final dépend fortement de l’initialisation des paramètres, c’est-à-dire le choix du guess initial doit être effectué d’une manière très soigneuse, et par ailleurs, la solution (la combinaison des paramètres qui ajuste les données expérimentales) peut ne représenter pas la réalité physique des phénomènes qui ont lieu.
Ma et al ont proposé une méthode graphique, avec Mref et S ∗ w comme variables, afin de modéliser la transition entre les deux régimes (viscosité apparente maximale et qualité optimale). L’hypothèse de travail consiste à négliger l’effet rhéo-fluidifiant de la mousse dans les expériences à qualité variable et vitesse totale fixée. Le paramètre Θ est estimé à postériori au moyen d’une minimisation par la méthode des moindres carrés sur les autres mesures stabilisées ainsi que sur les données de l’écoulement transitoire de la mousse. Les lacunes de cette procédure résident dans la nécessité d’avoir mesuré précisément l’écoulement transitoire pour pouvoir estimer le paramètre Θ et l’hypothèse de travail plus ou moins forte qui consiste à négliger le comportement rhéo-fluidifiant de la mousse dans ce type d’expérience et qui demeure sans justification jusqu’à présent. Plus tard, Ma et al [62] ont déterminé les mêmes trois paramètres du modèles Mref, S ∗ w, Θ en utilisant la méthode des moindres carrés comme les autres auteurs, mais en ajoutant une contrainte sur S ∗ w pour éviter la non-unicité des solutions (Mref, S ∗ w). Pour conclure, cet aper¸cu général des procédures de calibration des modèles empiriques montre que toutes les méthodes sont basées sur une exploitation directe des données expérimentales pour estimer les paramètres du modèle, sans chercher à expliquer/valider l’ajustement par des lois physiques relatives à l’écoulement de mousse. Par ailleurs, le nombre d’inconnues du problème et les discontinuités (chocs) caractérisant les solutions des équations du flux fractionnaire du gaz moussant rendent la calibration du modèle imprécise, voir peuvent conduire à des indéterminations (solutions multiples). Pour cela, nous proposons une nouvelle méthode qui vise à surmonter ces difficultés en se basant sur les modèles en texture. Plus précisément, la méthode proposée décrit l’utilisation d’un modèle à lamelles en régime permanent comme intermédiaire pour calibrer le modèle empirique de manière plus justfiée.
Expériences de déplacement de mousse à qualité, vitesse totale et perméabilité variables
Les expériences considérées sont des séries de déplacement de mousse réalisées sur trois carottes de grès de Fontainebleau. La phase gazeuse est composée de 80 % de dioxyde de carbone CO2 et 20 % de méthane CH4, et la phase aqueuse est une solution d’eau de mer désulfatée synthétique (DSW), dans laquelle un tensioactif est dissous à une concentration de 5 g/L pour générer la mousse. Les conditions thermodynamiques sont 60 ◦C et 80 bar. Pour chacune des trois carottes, une série de déplacements a été effectuée avec différentes valeurs de la qualité de la mousse et de la vitesse totale d’injection imposées en entrée. Chaque série de mesures a été réalisée comme suit : on commence par la co-injection de saumure et de gaz à différents débits totaux successifs croissants avec une fraction de gaz fixe. La différence de pression entre les deux extrémités de la carotte est enregistrée. La même séquence 85 Chapitre 4 : Calibration du modèle empirique pour différentes perméabilités et … d’injection est effectuée à nouveau, mais cette fois avec la solution de tensioactif au lieu de la saumure. Une fois le débit le plus élevé injecté, la mousse est réinjectée à la vitesse initiale la plus faible pour mesurer l’effet de l’hystérésis sur la mousse. Cependant, ces effets d’hystérésis ne sont pas analysés dans le cadre de notre étude. Les tables 4.1 et 4.2 résument les propriétés des trois carottes et des fluides utilisés dans cette étude expérimentale.