Stochastique prise en compte de la variabilité

Stochastique prise en compte de la variabilité

Dans la manière traditionnelle, encore appelée approche déterministe, la conception des structures repose sur des paramètres tels que les dimensions, la résistance des matériaux et le chargement, tous caractérisés par une valeur constante, i.e. leur moyenne. Sur la base de ces constantes on utilise un modèle mathématique du comportement pour déterminer si la structure est sûre ou non. Afin d’améliorer encore la sécurité, les variables structurelles sont alors remplacées par leur pire cas. Cette philosophie de conception se révèle trop coûteuse d’un point de vue économique car on se place dans le cas où tous les paramètres sont à leur pire valeur en même temps. Il est bien connu que, par exemple, la résistance varie d’un élément structurel à l’autre, de sorte que cette résistance ne peut être décrite par une unique valeur. De plus, il est parfois nécessaire de prendre en compte des variations temporelles. Ces mêmes variations existent également pour les dimensions et le chargement. Cela est particulièrement vrai pour les chargements naturels comme la houle, le vent et les séismes, qu’il est difficile de prendre en compte de manière déterministe. Il faut en outre garder en tête qu’une certaine incertitude existe également dans le choix des modèles mathématiques utilisés pour l’analyse de la structure. Le but d’utiliser une approche probabiliste plutôt qu’une simple approche déterministe est d’essayer de prendre en compte les incertitudes mentionnées ci-dessus afin de réaliser une analyse plus réaliste de la sûreté de la structure. Dans ce chapitre, nous considérerons le problème de formulation classique suivant : au D f (22.1) Jusqu’à présent, nous nous sommes contenté du cas où a est un opérateur déterministe, f l’excitation déterministe et u la réponse déterministe. Nous allons dans ce chapitre nous intéresser au cas où f est une excitation aléatoire et a un opérateur éventuellement aléatoire. Il s’en suit que la réponse du système u est elle-aussi aléatoire. La manipulation d’équations stochastiques introduit deux difficultés : — premièrement, les propriétés aléatoires du système doivent être modélisées « correctement » comme variables ou processus aléatoires, avec une distribution de probabilité réaliste ; — deuxièmement, il faut être capable de résoudre le système différentiel ainsi obtenu, et la réponse obtenue doit pouvoir être décrite par ses moments statistiques. Enfin, la relation entre éléments finis et probabilité recouvre deux aspects : — d’une part le calcul des moments statistiques de la réponse autour de sa moyenne (essentiellement l’écarttype) ; — d’autre part les méthodes de fiabilité, par lesquelles on cherche à calculer une probabilité de défaillance associée à un critère dont les arguments dépendent du résultat d’un calcul par éléments finis. Histoire Les séries de fonctions, apparues à la fin du xviie siècle, et particulièrement les séries de Taylor (voir historique du paragraphe A.1.1), sont aujourd’hui un outil indispensable, permettant notamment d’approcher une fonction de manière facilement exploitable. C’est pourquoi la manière la plus naturelle d’appréhender le traitement de l’équation (22.1) a été de procéder à un développement en série. Dès le début du xviiie siècle, la théorie des perturbations a Kolmogorov Arnold Moser été utilisée par les astronomes pour les besoins de la mécanique céleste : en effet, les équations différentielles décrivant un système de n corps en interaction gravitationnelle n’a pas de solution exacte générale pour n > 3. Cet aspect de la théorie des perturbations a été synthétisé à la fin du xixe siècle dans les ouvrages classiques de Laplace, Tisserand et Poincaré, avant de connaître de nouveaux développements dans la seconde moitié du xxe siècle avec l’avènement en 1954 de la « théorie KAM » (théorème de mécanique classique i.e. non relativiste et non quantique, mettant en défaut l’hypothèse ergodique de Boltzmann), du nom de ses trois concepteurs : Kolmogorov, Arnold et Moser. La méthode a par ailleurs été abondamment utilisée au xxe siècle pour les besoins de la physique quantique, d’abord en mécanique quantique non relativiste, puis en théorie quantique des champs. C’est encore cette même méthode de perturbation qui est la plus ancienne et la plus utilisée en ingénierie pour analyser les systèmes aléatoires (pas seulement aléatoires, voir la présentation de la méthode de réanalyse au paragraphe 13.6 qui est une méthode de perturbation). Bien que les méthodes mathématiques sous-jacentes soient très simples, cela ne signifie nullement que leur validité aille de soi : on fait un développement de Taylor de chaque quantité aléatoire autour de sa moyenne, les termes causant l’instabilité de la solution approchée étant d’ordres supérieurs. Toutefois, dans la pratique, il n’est pas possible d’aller au delà de l’ordre un ou deux. Cela réduit la portée des applications de la méthode aux cas des petits aléas, i.e. de petites fluctuations autour d’une valeur moyenne. Sans efforts inconsidérés, ces méthodes ne fournissent pas de statistiques d’ordres élevés. Il a donc bien évidemment été essayé d’améliorer cette méthode afin d’obtenir des statistiques d’ordres plus élevés. Une méthode, peu connue et peu utilisée, pour atteindre ce but est la hierarchy closure approximation. Il s’agit d’exprimer les moments d’ordres élevés en fonctions de moments d’ordres moins élevés. Si l’on considère que l’opérateur a de l’équation (22.1) peut être décomposé en une partie déterministe a et une partie aléatoire ea, cette équation se met sous la forme : .a Cea/u D f (22.2) qui se résout en : u D a 

Représentation des processus stochastiques

Nous allons reprendre et compléter ce qui a été présenté au paragraphe 1.2. Nous avons donc déjà exposé qu’une probabilité est une mesure particulière. Reprenons cela avec un vocabulaire probabiliste.

Variable aléatoire

On appelle épreuve l’observation d’un phénomène aléatoire. Toutes les réalisations possibles d’une épreuve forment l’ensemble de tous les résultats d’une expérience aléatoire, qui sera noté ‚. Un événement E est un sous-ensemble de ‚ contenant les réalisations  2 ‚. La mesure de l’occurrence de E est une mesure de probabilité notée P. L’ensemble de tous les événements possibles ayant une probabilité ainsi définie est appelé une -algèbre associée à ‚, et est notée F. L’espace de probabilité construit grâce à ces notions est noté .‚; F; P /. En d’autres termes, pour reprendre la partie I, l’espace de probabilité .‚; F; P / est construit sur la tribu F et avec la mesure P. Une variable aléatoire réelle X est une fonction X W .‚; F; P / ! R. Pour les variables aléatoires continues, la densité de probabilité est notée fX .x/ et la fonction de répartition est notée FX .x/. Un vecteur aléatoire est un vecteur dont les composantes sont des variables aléatoires.

Processus ou champ aléatoire

Nous venons de présenter les variables aléatoires. Or, ce qui nous intéresse, est de prendre en compte la variation d’une propriété (par exemple le module d’Young du matériau) continûment sur notre domaine . Définition 83 — Champ aléatoire ou processus stochastique. Un champ aléatoire scalaire w.x;  / peut être défini comme un ensemble de variables aléatoires indexées par un paramètre continu x 2 . le paramètre x n’est pas forcément continu, il peut être discret. Nous nous intéressons ici au cas d’un processus continu. Ainsi un processus stochastique w.x;  / définit une fonction de deux variables x et  et représente : — x et  variables : une famille de fonctions ; — x variable et  fixé : une fonction de x, i.e. une réalisation du champ aléatoire (i.e. une fonction de R d dans R, où notre domaine  est un ouvert de R d ) ; — x fixé et  variable : une variable aléatoire ; — x et  fixés : un nombre. Un champ aléatoire est dit : — vectoriel si la quantité w.x;  / attachée au point x est un vecteur aléatoire. — unidimensionnel si d D 1 et multidimensionnel sinon (cas qui nous intéresse). — gaussien si tout vecteur fw.x1/; :::; w.xn/g est un vecteur gaussien. Il est alors complètement défini par sa moyenne,

Discrétisation de champs aléatoires

Maintenant que nous avons défini ce qu’est un processus stochastique w.x;  /, il nous faut le discrétiser. On se propose donc d’approcher w.x;  / par wh.x; /, où  est un vecteur aléatoire constitué de n variables aléatoires i , i.e. sous la forme : w.x;  /  wh.x; / (22.21) Plusieurs méthodes sont possibles : discrétisation par valeurs moyennes : les i sont des intégrales pondérées de w.x;  / sur un domaine i , et dans le cas des éléments finis, sur chaque élément. Cette méthode a pour conséquence de lisser le processus stochastique ; discrétisation par valeurs ponctuelles : les i sont sélectionnées parmi les valeurs de w.x;  / en certains points x. Cette méthode de collocation a pour conséquence de générer des irrégularités additionnelles ; développement en séries : le champ est représenté par une série de variables aléatoires et de fonctions spatiales déterministes. C’est uniquement ce type de méthode que nous allons présenter

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