La pancréatite aiguë est une inflammation aigue du pancréas secondaire à l’activation prématurée des pro-enzymes pancréatiques au sein même du pancréas avec pour conséquence une autodigestion glandulaire avec libération d’enzymes protéolytiques et lipolytiques dans la loge pancréatique, l’abdomen et la circulation sanguine.
L’association pancréatite aiguë et grossesse est rare. Elle survient généralement chez une jeune parturiente, multipare, à la deuxième ou à la troisième partie de la grossesse. L’étiologie biliaire est la plus fréquente, favorisée par les modifications gravidiques. La démarche diagnostique (diagnostic positif et de gravité) est confrontée à plusieurs problèmes, d’une part le tableau clinique est non spécifique, d’autre part, les examens radiologiques, notamment le scanner abdominal, sont contre indiqués dans la majore partie de la grossesse. La prise en charge est multidisciplinaire incluant l’anesthésiste réanimateur, le gynéco-obstétricien, l’hépato gastrologue et le radiologue. Le traitement de la pancréatite aiguë gestationnelle est avant tout symptomatique. Le diagnostic précoce et la prise en charge adéquate de cette pathologie permettent l’amélioration de la morbidité et de la mortalité materno fœtale. Le pronostic maternel est généralement bon. Les complications fœtales sont dominées par le risque d’accouchement prématuré et la souffrance fœtale aigue.
Au cours de la grossesse, plusieurs changements physiologiques observés pourraient avoir un rôle favorisant dans la formation de sludge vésiculaire et de calcules biliaires. En effet l’augmentation physiologique d’œstrogène et de progestérone durant la grossesse favorise la stase biliaire en diminuant la motilité vésiculaire en plus d’une relaxation du muscle lisse. En outre, l’augmentation physiologique de cholestérol et de triglycérides dans le sérum, en plus de l’augmentation de l’acide cholique et la diminution de l’acide chénodésoxycholique a un rôle lithogène. [14] L’hyperpression abdominale par l’utérus gravide pourrait encore avoir un rôle mécanique dans la stase biliaire. [1] Tous ces facteurs associés semblent favoriser la formation de calculs biliaires chez la parturiente enceinte et donc la survenue secondaire d’une pancréatite aiguë.
Deux grands mécanismes pourraient être à l’origine de la PA, basés sur l’hypothèse d’une activation des enzymes pancréatiques et une autodigestion de la glande : la théorie acineuse et la théorie canalaire ou la combinaison des deux. La théorie acineuse repose sur l’idée de la destruction des cellules acineuses par perturbation de leur fonctionnement intracellulaire avec une libération incontrôlée d’enzymes pancréatiques. Ces enzymes seraient activées par les hydrolases lysosomiales avec diffusion de l’activation au niveau de l’espace interstitiel. Dans la théorie de l’obstruction canalaire, le reflux de bile entraînerait une augmentation de pression intracanalaire que la cause en fût un obstacle persistant, un oedème ou un spasme sphinctérien.
Cette augmentation de pression serait à l’origine d’une augmentation de perméabilité des parois des canaux aux enzymes protéolytiques générant une diffusion péricanalaire vers le liquide interstitiel responsable d’un œdème, d’un processus inflammatoire et des altérations de la microcirculation. Quelle que soit l’étiologie, une activation des enzymes pancréatiques surviendrait,générant l’autodestruction du pancréas.
Chez 10 à 15 % des patients qui développent une PA, une réponse inflammatoire systémique sévère (SIRS) se développe conduisant aux formes de PA grave. Ce SIRS semble causé par l’activation d’une cascade inflammatoire médiée par les cytokines, les cellules immunitaires et le système du complément. Les cytokines proinflammatoires induisent la migration tissulaire des macrophages dans des organes distants du pancréas, dont les poumons et les reins. Les cellules immunitaires, attirées par les cytokines libérées par les macrophages, amplifient la cascade en libérant plus de cytokines, de radicaux libres et de monoxyde d’azote. Certaines cytokines pro-inflammatoires sont impliquées dans la progression de la maladie comme l’interleukine-1 (IL-1) et le tumor necrosis factor (TNF). Dans les modèles expérimentaux de PA, l’utilisation d’antagonistes de l’IL-1, d’anti-TNF, d’interleukine-10 cytokine anti-inflammatoire ou de lexipafant, inhibiteur du platelet activating factor, réduit la sévérité de la maladie.
L’incidence de la pancréatite associée à la grossesse est variable en fonction des études. Ainsi Monnier et al.[16] Avaient rapporté une incidence de 1 sur 400 naissances alors que Corlett et al.[17] Avaient rapporté une incidence de 1 sur 10666 naissances. Dans notre travail, nous avons colligé 19 cas sur une période de 6 ans 5 mois pour 91151 naissances au cours de la même période, ce qui représente une fréquence de 1 sur 4797 naissances.
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