Le développement récent des technologies d’imagerie médicale 3D ouvre de nouvelles perspectives très prometteuses dans le domaine de la santé et du bien-être. Des efforts considérables ont été consentis et continuent à être produits pour concevoir des systèmes d’acquisition toujours plus précis et performants (IRM, échographie 3D, etc.). Ces dispositifs commencent à se multiplier dans les hôpitaux et chez les médecins. Les files d’attente pour l’accès à ce type d’examens sont toujours de plus en plus longues ce qui prouve l’intérêt de ce type d’outils. D’un autre côté, il semble que les techniques d’aide à l’exploitation des données 3D suscitent moins d’intérêt et évoluent beaucoup moins rapidement. Peutêtre est-ce dû au fait que l’on a cru qu’il suffirait de considérer les images 3D uniquement comme des successions d’images 2D pour les interpréter ? Il nous semble que cela n’est pas le cas et que d’énormes progrès peuvent encore être obtenus en considérant les images 3D avec leur complexité propre. Cela nécessite le développement de modèles spécifiques intégrant des connaissances multiples et capables de gérer des quantités d’information énormes. Nous avons la chance, à Tours, de bénéficier d’un environnement propice à la réalisation d’avancées majeures dans ce domaine puisque les principaux acteurs de l’imagerie 3D sont présents à proximité (CHRU de Tours, l’équipe 5 de l’UMR INSERM U390, IFR 135 d’imagerie fonctionnelle, pôle de compétitivité Cosmetic Vallée, etc.). Ainsi, l’un des objectifs de ce travail est de faire naître une synergie entre tous ces acteurs en se focalisant sur la mise au point d’outils informatiques d’aide à l’analyse de données 3D plutôt que sur la conception de dispositifs matériels. L’un des challenges est alors de susciter la collaboration de personnes d’origines pluridisciplinaires pour contribuer à la mise au point d’un système efficace d’analyse d’images 3D et plus particulièrement d’images ultrasonores. Ces dernières présentent de nombreux intérêts dont les deux facteurs essentiels sont d’une part, le coût du matériel et d’autre part, les effets non invasifs inhérents à la technologie employée. Ces deux atouts sont néanmoins contrecarrés par une grande difficulté d’interprétation de leur contenu. En effet, ces images contiennent un certain nombre d’artefacts et de variations liés aux phénomènes de propagation des ultrasons qui compliquent le processus de segmentation. Dans [Noble et Boukerroui, 2006], les auteurs présentent les facteurs essentiels pour mettre en place des outils complets et robustes pour la segmentation d’images ultrasonores. Parmi eux, nous retrouvons les méthodes d’analyse de textures qui sont très répandues dans les applications 2D et beaucoup moins dans le traitement d’images 3D. Outre le nombre important de méthodes, les résultats restent encore peu précis et les solutions apportées se focalisent souvent sur une problématique donnée, dédiée à un type d’application. Il serait pourtant intéressant de développer des outils génériques, utilisables de façon automatique ou semi-automatique, qui permettraient un panel d’utilisation beaucoup plus important mais aussi une interactivité mieux adaptée aux différentes situations.
Ainsi, le travail que nous présentons s’inscrit dans le domaine des images 3D texturées aussi connues sous le nom de textures solides ou volumétriques. Ces dernières comportent des volumes de données et d’informations très importants qui rendent difficile, et dans certains cas inefficace, l’exploitation de méthodes dédiées aux images 2D. En effet, même s’il reste possible pour une méthode d’analyse de textures 2D de traiter une donnée volumétrique au travers des différentes coupes 2D qui la composent, les informations ainsi obtenues seront biaisées de par le voisinage considéré qui fait abstraction de la notion de profondeur. Un exemple évident concerne la caractéristique de directionnalité : comment mettre en place un système permettant de détecter une direction principale dans un contexte 3D avec une méthode basée 2D ? Les approches volumétriques permettent de considérer l’ensemble des directions alors que les méthodes 2D sont aveugles à l’agencement et la répartition des voxels entre les couches 2D.
Outre le faible nombre de travaux proposant des méthodes réellement 3D, la majeure partie des méthodes d’analyse de textures n’ont pas une applicabilité très étendue et sont incapables d’identifier certaines classes de textures. Ce n’est pas le cas du système visuel humain qui s’adapte à tous types de textures même en présence d’un contexte défavorable. Donner une définition générale du terme « texture » est connu comme quelque chose de difficile. En effet, une texture fait apparaître des notions abstraites qu’il est complexe de définir correctement de façon théorique. Afin de décrire une texture, les humains utilisent plutôt des notions qualitatives agrémentées par un ensemble d’adjectifs qualificatifs (rugueux, granuleux, contrasté, etc.). Il paraît donc très difficile de définir une texture sous forme d’un unique modèle mathématique produisant une description purement quantitative.
Partant de l’hypothèse qu’il semble plus pertinent de décrire une texture avec des adjectifs qualificatifs (description qualitative) plutôt qu’avec un modèle mathématique unique, nous avons choisi dans un premier temps de définir un nouvel ensemble de descripteurs de textures permettant une caractérisation qualitative des textures contenues dans les images 3D. Bien que conscient de la difficulté à produire une définition consensuelle du terme texture, la première contribution de cette thèse est donc la proposition d’un nouvel ensemble d’attributs dédié aux textures solides et construit à partir de propriétés de textures facilement appréhendables par l’utilisateur humain. Ces nouveaux descripteurs permettent entre autre de décrire des propriétés texturales telles que la directionnalité, la rugosité ou bien le contraste.
La deuxième contribution de cette thèse correspond aux techniques multi-résolutions que nous proposons d’exploiter pour extraire ces caractéristiques des images 3D. L’idée principale est d’accepter le fait qu’une seule approche (fréquentielle, statistique, fractale, etc.) n’est pas suffisante pour garantir une forte généricité et robustesse. Nous proposons donc de coupler différentes méthodes avec notamment la décomposition en ondelettes et l’analyse de composantes géométriques contenues dans les représentations obtenues. Bien évidemment, l’objectif initial de conception d’un système interactif de segmentation d’images échographiques 3D de la peau intégrant nos descripteurs de textures solides constitue, selon nous, une troisième contribution. Ce système, qui offre un degré d’adaptabilité et d’interaction important, nous a permis de valider expérimentalement la robustesse et la généricité de nos propositions. Ce prototype intéresse aujourd’hui de nombreux acteurs du monde de la santé (médecins, dermatologues, industriels, …).
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