les protéines régulatrices et les protéines accessoires

Structure de la particule virale

Le VIH est un virus de forme sphérique (Figure 2) se composant d’une enveloppe, de diverses protéines structurales et de protéines enzymatiques.

a. les protéines de structure Parmi les protéines de structure, issues du précurseur protéique Gag, on retrouve la protéine MA, ou matrice, une protéine de 17 kDa. Cette protéine de structure tapisse la face intérieure de l’enveloppe virale et permet l’ancrage des protéines gp41 et gp120 dans cette dernière. La protéine MA contient également un signal NLS de localisation nucléaire et se retrouve comme composant du complexe de pré-intégration, participant ainsi à l’adressage de l’ADN viral au noyau (Freed, 2001; Haffar et al., 2000; Turner and Summers, 1999). La protéine de capside, dite CA, de 24 kDa est également une protéine de structure. Elle est maturée une fois la particule virale bourgeonnée hors de la cellule et prend alors une forme conique (Freed, 2001; Mascarenhas and Musier-Forsyth, 2009; Turner and Summers, 1999). La dernière protéine de structure, la protéine de nucléocapside ou NC-p7, entoure les brins d’ARN pour les protéger. Responsable de l’encapsidation des ARN viraux par son interaction avec la séquence Psi, elle joue également un rôle de chaperonne et favorise l’initiation et l’élongation de la réverse transcription (Berglund et al., 1997; Freed, 2001; Levin et al., 2005; Sakaguchi et al., 1993; Thomas and Gorelick, 2008; Turner and Summers, 1999).

b. les enzymes virales Les trois enzymes virales sont issues du précurseur protéique Gag-Pol. La reverse transcriptase, nommée RT (p51/p66), est une enzyme à double fonction. Elle possède deux composantes : une DNA polymérase RNA dépendante qui permet la formation de l’ADN viral en prenant l’ARN comme matrice et une RNaseH qui dégrade l’ARN viral au fur et à mesure du processus de réverse transcription (Freed, 2001; Turner and Summers, 1999). L’intégrase ou IN, protéine de 32 kDa est responsable de l’insertion de l’ADN viral dans l’ADN cellulaire. Cette protéine nous intéresse plus particulièrement et sera donc détaillée dans le chapitre II. La dernière enzyme virale, nommée protéase (PR, 12 kDa) agit pendant et après le bourgeonnement des particules virales (Freed, 2001; Turner and Summers, 1999). Elle clive le précurseur polyprotéique Gag en MA/CA/NC et permet ainsi la structuration de la capside et de la nucléocapside. Cette étape est couramment appelée maturation des particules virales, sans laquelle les virions ne seraient pas infectieux.

d. les protéines régulatrices et les protéines accessoires Le VIH est considéré comme un rétrovirus complexe car il code pour de très nombreuses protéines régulatrices et accessoires (Freed, 2001; Li et al., 2005). Parmi les plus importantes, on retrouve Tat et Rev, deux protéines régulatrices. Tat, protéine de 14 kDa est un trans-activateur transcriptionnel. Elle se lie à la séquence TAR présente sur l’ARN viral pour permettre à la fois l’initiation et l’élongation de la transcription à partir des LTR viraux (Freed, 2001; Pugliese et al., 2005). Les cellules eucaryotes contrôlent de manière précise l’export des ARNm. Ainsi, seuls les ARNm épissés sont exportés du noyau. Néanmoins, dans le cas d’une infection par le VIH, des ARNm non épissés ou partiellement épissés sont produits. La protéine virale Rev (19 kDa) permet de contrer les contrôles cellulaires. Cette protéine se lie à la séquence RRE des ARNm viraux et recrute l’exportine-1 et Ran. Toutes deux impliquées dans le mécanisme d’export des ARNm cellulaires, elles permettent le passage des ARNm viraux, non épissés ou partiellement épissés, à travers les pores nucléaires. Une fois dans le cytoplasme, le complexe d’export se dissocie et Rev est rapatriée dans le noyau grâce à son signal NLS. Rev facilite ainsi l’export de ces ARN non épissés ou simplement épissés (Freed, 2001; Suhasini and Reddy, 2009). Quatre protéines accessoires ont également été identifiées chez le VIH. Ainsi, la protéine Vif, de 23 kDa, contrecarre les actions inhibitrices de certains facteurs cellulaires comme APOBEC3G et facilite la stabilisation du complexe de réverse transcription (Freed, 2001; Goila-Gaur et al., 2008; Li et al., 2005; Ohagen and Gabuzda, 2000). Nef, une protéine de 27 kDa, provoque la dégradation des récepteurs CD4. Ce mécanisme permet (i) d’empêcher la séquestration des protéines d’enveloppe au niveau du réticulum endoplasmique, augmentant ainsi la production virale et (ii) de prévenir des surinfections. Nef entraîne également la dégradation des récepteurs CMH-I, empêchant probablement la détection des cellules infectées par les lymphocytes cytotoxiques, mais elle est également capable d’inhiber la réponse cellulaire en interférant avec les voies de signalisation. Nef inhibe également le processus d’apoptose, et augmente l’infectivité des virions (Das and Jameel, 2005; Freed, 2001; Li et al., 2005). La protéine Vpr (14 kDa) agit à différents niveaux. Elle permet l’arrêt du cycle cellulaire en phase G2 et provoque l’apoptose mais est également un constituant du Complexe de Pré-Intégration (PIC) (Andersen et al., 2008; Freed, 2001; Le Rouzic and Benichou, 2005; Li et al., 2005; Popov et al., 1998; Zhao et al., 2005). Enfin Vpu favorise la production virale et le bourgeonnement des virions et influence la dégradation des CD4 (Freed, 2001; Guatelli, 2009; Li et al., 2005).

Construction des vecteurs

Depuis maintenant quelques années, les rétrovirus, et particulièrement le VIH, sont des cibles préférentielles pour le développement des thérapies génétiques à base de vecteurs viraux (Baum et al., 2006; Cockrell and Kafri, 2007; D’Costa et al., 2009; Escors and Breckpot). Ils présentent en effet de nombreux avantages dont l’intégration du transgène dans le génome de la cellule, favorisant ainsi son expression à long terme. Les lentivirus possèdent en plus la capacité d’infecter des cellules quiescentes et la propriété de n’engendrer qu’une faible réponse inflammatoire. Les vecteurs dérivés du VIH sont en constante évolution afin d’assurer un maximum de sécurité (Figure 7). Toutes les études sont basées sur des vecteurs non réplicatifs produits par combinaison de 3 cassettes différentes (Pluta and Kacprzak, 2009; Salmon and Trono, 2007). Une première cassette « vecteur », comprenant les éléments cis (LTR, Psi, TAR,…) ainsi que le transgène et son promoteur, est associée à une seconde cassette comprenant les éléments en trans (protéines de structure et enzymes virales). La séparation des éléments agissant en cis dans une première cassette et des éléments agissant en trans dans une seconde permet de minimiser la formation de particules recombinantes réplicatives. Actuellement, pour plus de sureté, les gènes des protéines accessoires Vif, Vpr, Vpu et Nef sont éliminés de la seconde cassette et le gène de la protéine accessoire Rev est séparé des autres gènes gag et pol.

De plus, la délétion de la région U3 du LTR 3’ (Self INactivated) dans la cassette « vecteur » permet également de limiter la réplication des vecteurs (Yu et al., 1986). D’autres modifications génétiques ont également été apportées. Le vecteur contient désormais un flap central (cPPT) en plus du PPT classique et une séquence WPRE (Woodchuck hepatitis virus Post-transcriptional Régulatory Element). Grâce aux PPT et cPPT, l’initiation de la formation du brin « + » prend place au niveau de deux segments d’ARN non dégradés lors de la réverse transcription, augmentant l’efficacité de la production (Van Maele et al., 2003). Le WPRE permet d’augmenter de 5 fois l’expression de transgène (Zufferey et al., 1999). Néanmoins, les efforts doivent se poursuivre concernant cette séquence. En effet, sa séquence nucléique correspond à une partie du gène X de l’hépatite des marmottes (Woodchuck Hepatitis Virus), codant pour une protéine avec un pouvoir oncogène. L’expression du transgène peut également être contrôlée par un système inductible à la tétracycline via un Tet répresseur et un Tet opérateur (ou Tétracycline Responsive Element) (Gossen and Bujard, 1992; Kafri et al., 2000) ou par l’utilisation de promoteur tissuspécifique (Gruh et al., 2008)

Finalement la dernière cassette comporte l’enveloppe de la particule virale. A ce jour, l’enveloppe du VIH, fragile et d’un tropisme limité, est remplacée par l’enveloppe du virus de la Stomatite Vésiculaire (VSV) qui possède de nombreux avantages. Elle élargie considérablement le tropisme cellulaire des vecteurs, le VSV se fixant sur des récepteurs cellulaires ubiquitaires (Cronin et al., 2005). Cette nouvelle enveloppe est également beaucoup plus stable et consolide la particule virale, permettant des étapes de purification et de concentration par ultracentrifugation, augmentant le titre viral de plus de 100 fois par rapport au VIH sauvage. Malgré les progrès accomplis, de nombreuses avancées restent à effectuer notamment sur l’intégration du vecteur.

En effet, les premières études menées sur des enfants SCID (système immunitaire déficient) utilisant des vecteurs MuLV ont donné des résultats encourageants pour 9 patients sur 10 (Cavazzana-Calvo et al., 2000). Malheureusement, parmi ces enfants, deux ont développé une leucémie suite à l’insertion du transgène au niveau d’un promoteur cellulaire (Hacein-Bey-Abina et al., 2003). Le virus de la leucémie murine (MuLV), un gammaretrovirus, s’intègre en effet préférentiellement au sein des promoteurs tandis que le VIH cible préférentiellement les gènes transcriptionnellement actifs (Brady et al., 2009; De Palma et al., 2005; Lewinski et al., 2006; Schroder et al., 2002). L’utilisation de vecteurs non intégratifs est aussi envisagée (Banasik and McCray, ; Michelini et al., ; Sarkis et al., 2008; Wanisch and Yanez-Munoz, 2009), l’expression du transgène se faisant à partir des formes virales non intégrées. Une seconde stratégie en cours d’étude consisterait à cibler les sites d’intégration. Un doigt de zinc polydactil fusionné à l’intégrase permettrait de favoriser de 7 à 10 fois l’intégration sur un site spécifique (Giri et al., 2006), de même la surexpression de la protéine fusion du domaine C-terminal de IN (responsable de sa liaison avec ledgf/p75) et du domaine N-terminal de la protéine HPAα modifierait les sites d’intégration des vecteurs HIV (Silvers et al.).

Table des matières

INTRODUCTION BIBLIOGRAPHIQUE
CHAPITRE 1 : LE VIRUS DE L’IMMUNODEFIENCE HUMAINE, LES RETROVIRUS ET LEURS DERIVES
I/ Biologie du Virus de l’Immunodéficience Humaine
A/ La famille des rétrovirus
B/ Le VIH, un lentivirus
1/ Pathologies associées au VIH
2/ Structure de la particule virale
a. les protéines de structure
b. les enzymes virales
c. l’enveloppe
d. les protéines régulatrices et les protéines accessoires
3/ Le génome viral
a. les régions codantes
b. les régions non codantes
4/ Le cycle de réplication
a. la phase précoce
b. la phase tardive
c. les co-facteurs du cycle du VIH
II/ Les vecteurs dérivés du VIH
A/ Construction des vecteurs
B/ Production des vecteurs
CHAPITRE 2 : INTEGRASE ET INTEGRATION
I/ Le processus d’intégration
A/ Les étapes du processus d’intégration
1/ Reconnaissance des LTR et coupure en 3’
2/ Transfert de brin
3/ Ligation
B/ Les co-facteurs cellulaires de l’intégrase du VIH
1/ Ledgf/p75
2/ HMGA1
3/ INI1
4/ BAF
II/ Structure de la protéine intégrase du VIH
A/ Généralités sur la protéine intégrase
B/ Fonction des différents domainesde l’intégrase
1/ le core de la protéine
2/ Le domaine N-terminal
3/ Le domaine C-terminal
C/ Structure des domaines et dimérisation
D/ Modèle d’action sous forme de tétramère
III/ Méthode de quantification des ADN viraux intégrés
CHAPITRE 3 : LES REGULATEURS CELLULAIRES
I/ Les processus de modifications de la chromatine
A/ Modifications des histones
1/ Les complexes de remodelage
2/ Le code histone
B/ La méthylation de l’ADN
1/ Fonction de la méthylation de l’ADN
2/ Les protéines méthyltransférases (DNMT)
C/ L’hétérochromatine
1/ L’hétérochromatine facultative
2/ L’hétérochromatine constitutive
D/ Les instabilités chromosomiques
1/ les altérations des chromosomes
a. Les changements subtils de la séquence
b. Les aberrations du nombre de chromosomes
c. Les translocations
d. L’amplification génique
2/ Les sites fragiles
II/ Les mécanismes de réparation de l’ADN
A/ Signalisation des lésions de l’ADN
1/ Les senseurs de la lésion
a. La protéine mutée dans AtaxiaTelangiectasia (ATM
b. La protéine reliée à ATM et Rad3 (ATR)
c. Le complexe MRN
d. Le complexe DNA-PK et les PARP
2/ les transducteurs du signal
a. Les protéines Chk1 et Chk2
b. L’histone H2AX
3/ La voie FANC/BRCA
a. Les protéines FANC
b. BRCA1 et BRCA2
B/ Les différentes voies de réparation
1/ Réparation des mésappariements : MMR
2/ Réparation par excision de base : BER
3/ Réparation par excision de nucléotide : NER
4/ Réparation des cassures double-brin
a. Recombinaison homologue
b. Jonction non homologue des extrémités
III/ Le cycle cellulaire
A/ Les protéines régulatrices
1/ Les CDK et les cyclines
2/ Les inhibiteurs des CDK
3/ E2F et Rb
B / Les points de contrôle
1/ Contrôle en phase G1
2/ Contrôle en phase S
3/ Contrôle en phase G2
4/ Contrôle en phase M
IV/ La mort cellulaire
A/ Les voies apoptotiques
B/ Les voies non apoptotiques
C/ Les protéines clés
1/ La protéine p53
2/ La protéine p21
3/ La famille Bcl-2
CHAPITRE 4 : RELATION HOTE-PATHOGENE : LA CELLULE FACE AU VIH
I/ Les défenses cellulaires
A/ L’immunité innée
B/ Les facteurs de restriction des infections par le VIH
1/ La famille des TRIpartite Motif (TRIM
2/ La famille APOBEC
3/ Bst-2 / Tetherine
4/ Autres
II/ Les modifications cellulaires globales provoquées par l’infection au VIH
A/ Les analyses transcriptomiques
B/ Les analyses protéomiques
C/ Les analyses par ARN interférence
OBJECTIFS
RESULTATS
CHAPITRE 1 : DEFINITION DES CONDITIONS OPTIMALES POUR L’ANALYSE DES MODIFICATIONS CELLULAIRES
I/ Objectifs
II/ Article 1
III/ Données complémentaires
A/ Evolution des cellules primaires lors du maintien en culture
B/ Cinétique d’infection à différentes MOI sur les cellules primaires
1/ Expression de la GFP
2/ Quantification des formes intégrées
3/ Elimination des formes non intégrées contaminantes
IV/ Discussion-Conclusion
CHAPITRE 2 : ANALYSES TRANSCRIPTOMIQUES
I/ Objectifs
II/ Article 2
III/ Données complémentaires
A/ Réseau d’interactions protéiques
B/ Etude préliminaire sur d’autres cellules
D/ Etude des différences entre les cellules saines et les cellules infectées
IV/ Discussion-Conclusion
CHAPITRE 3 : ANALYSES PROTEOMIQUES
I/ Objectifs
II/ Article 3
III/ Discussion-conclusion
DISCUSSION ET CONCLUSION GENERALE
ANNEXES
ANNEXE 1 : MANIPULATION DES VECTEURS LENTIVIRAUX
I/ Production
II/ Titration
A/ Mesure de la GFP
B/ Mesure de l’activité réverse transcriptase
C/ Quantification des ADN viraux intracellulaires
III/ Techniques de concentration des suspensions virales
IV/ Elimination des plasmides résiduels
V/ Vérification de la non recombinaison
ANNEXE 2 : MISES AU POINT DE LA METHODE D’ANALYSE BIDIMENTIONNELLE DES PROTEINES
I/ Les techniques de coloration
II/ Test des zones de pH
RÉFERENCES

 

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