L’ETAT DE L’APPLICATION DU DROIT PENAL DES AFFAIRES OHADA DANS LES ETATS-PARTIES
Le droit des affaires connaît depuis quelques années un chamboulement extraordinaire résultant de la réforme législative réalisée dans le cadre de l’Ohada, avec pour corollaire la lutte contre l’insécurité juridique et judiciaire nuisible aux investissements attendus notamment des pays étrangers en vue du développement tant souhaité de l’Afrique. Toutefois, deux décennies après la signature le 17 octobre 1993 du Traité de l’Ohada, force est de constater, non sans regret, que plusieurs réalisations relèvent encore du rêve. C’est le cas, en matière du droit pénal des affaires Ohada ayant consacré la méthode du renvoi législatif, de la possibilité laissée aux Etats-parties de déterminer les peines en matière pénale par l’entremise des parlements nationaux, au regard des dispositions de l’article 5 dudit traité qui dispose que « les actes uniformes peuvent inclure des dispositions d’incrimination pénale. Les Etats parties s’engagent à déterminer les sanctions pénales encourues ». Le droit Ohada établit donc un concours de compétence normative qui fait fondamentalement fi du sacro-saint principe de la légalité. Le constat fait à ce jour révèle que sur les dix sept (17) pays qui constituent actuellement l’espace Ohada, trois (3) seulement ont déjà répondu à l’appel, rendant ainsi inapplicable le droit pénal Ohada, et pire, consacrant du coup l’illégalité dans laquelle ces pays se retrouvent en la matière, sachant pertinemment que le principe de la légalité des délits et des peines commande que l’infraction ne soit réprimée que dans la mesure et à la condition que cette incrimination soit suivie de la peine également prévue par la loi. Ces trois pays qui font office de pionniers sont le Sénégal, le Cameroun et la République Centrafricaine. Le premier a prévu les peines requises à travers la loi n°98-22 du 26 mars 1998 portant sur les sanctions pénales applicables aux infractions contenues dans l’acte uniforme relatif aux droits de sociétés commerciales et du groupement d’intérêt économique, le deuxième par la loi n°2003/008 du 10 juillet 2003 portant Répression des infractions contenues dans certains actes uniformes Ohada et le troisième a introduit les sanctions relatives aux infractions incriminées dans les actes uniformes Ohada dans la loi n°10.001 du 06 janvier 2010 portant Code pénal Centrafricain. La République du Congo-Brazzaville leur emboîte le pas avec le projet de loi portant « détermination des sanctions pénales aux infractions prévues par les actes uniformes du traité de l’Ohada relatifs au droit commercial général, au droit des sociétés commerciales et du groupement d’intérêt économique, au droit comptable, au droit des sûretés et au droit des procédures collectives d’apurement du passif » qui est actuellement sur le bureau du parlement et attend d’être adopté par le Sénat et l’Assemblée nationale.
Le droit Ohada ne définit nullement les juridictions compétentes pour juger les infractions prévues dans les actes uniformes. Ceci étant, il faut considérer la peine applicable pour déterminer la nature criminelle ou correctionnelle de l’infraction dont s’agit, et conséquemment, la juridiction compétente. Le droit pénal des affaires Ohada est basé sur deux sources principales, à savoir la loi nationale retenue par le souci de protéger la souveraineté des Etats, et les actes uniformes de l’Ohada ayant pour substratum le Traité.