ASPECTS FISCAUX EN MATIERE D’IMPOT SUR LE REVENU
Dans sa mécanique, la législation belge commence par assimiler l’opération de scission partielle à une liquidation (article 210 du CIR) et n’aborde qu’ensuite le régime d’immunité fiscale et ses modalités (articles 211 et suivants du CIR). Nous examinerons donc en premier lieu le régime de taxation et aborderons ensuite le régime d’immunité. Il faut toutefois garder à l’esprit que le régime de neutralité fiscale reste la règle, tandis que l’imposition constitue l’exception .
Scission partielle taxée
Dès lors que l’opération de scission partielle ne satisfait pas aux conditions permettant d’accéder au régime de neutralité, ce sont les règles applicables au régime de liquidation qu’il conviendra d’observer. Dans ce cas de figure, on opère comme si la société était liquidée. Dans le cadre d’une opération de scission partielle, le législateur a toutefois restreint l’application de ces dispositions au seul avoir social apporté à la société bénéficiaire. La doctrine recourt au terme de « régime partiel de liquidation ». Il reste à décrire ce régime de taxation successivement dans le chef de la société partiellement scindée, dans celui de la société bénéficiaire et dans celui des actionnaires.
Conséquences de la taxation dans le chef de la société partiellement scindée
Le régime fiscal des sociétés en liquidation s’articule autour des articles 208 et 209 du CIR. L’article 208 du CIR décrit le régime applicable aux bénéfices de la société liquidée, tandis que l’article 209 du CIR organise le régime des attributions de liquidation aux actionnaires et associés de la société. Ces deux aspects correspondent aux opérations réalisées en deux temps par le liquidateur. Dans un premier temps, le liquidateur vend les actifs de la société de manière à désintéresser les créanciers. Dans un second temps, les reliquats sont répartis entre les actionnaires ou associés.
Ainsi, l’article 208, alinéa 1er, du CIR prévoit que les sociétés en liquidation restent pleinement assujetties au régime ordinaire de l’impôt des sociétés selon les dispositions des articles 183 à 207 du CIR. Les résultats de liquidation sont traités de la même manière que pendant la vie effective de la société. L’article 208, alinéa 2, du CIR contient une particularité, laquelle inclut parmi les bénéfices imposables de ces sociétés, les plus-values réalisées ou constatées à l’occasion du partage de l’avoir social. Sont de ce fait soumises à l’impôt des sociétés, d’une part, les plus-values réalisées à l’occasion de la cession de ses actifs et, d’autre part, les plus-values constatées qui visent les attributions faites en nature aux actionnaires. Ces attributionsimpliquent la réalisation des plus-values latentes. Dans ce cas, si des biens sociaux sont attribués en nature aux actionnaires ou aux associés, la plus value s’obtiendra en retranchant de la valeur réelle des biens attribués la valeur fiscale nette de ces biens. Si le partage comprend un immeuble, la plusvalue se déterminera par rapport à la valeur vénale de celui-ci.
Quant à l’article 209 du CIR, il règle le régime fiscal des répartitions des sommes aux actionnaires ou associés. L’article 209, alinéa 1er, du CIR prescrit ce qui suit : « En cas de partage de l’avoir social d’une société, par suite de dissolution ou de toute autre cause, l’excédent que présentent les sommes réparties, en espèces, en titres, ou autrement, sur la valeur réévaluée du capital libéré, est considéré comme un dividende distribué ». Cet alinéa invite à distinguer deux éléments dans les répartitions de liquidation :
– La partie des répartitions qui n’excède pas le capital libéré (au sens fiscal) : cette partie n’est pas imposable, puisqu’il ne s’agit que du remboursement de la mise de départ des actionnaires.
– La partie des répartitions qui excède le capital libéré (au sens fiscal) : cet excédant correspond à la notion de « boni de liquidation » et doit être traité comme un dividende distribué.
Le boni de liquidation est donc égal à la différence entre les sommes réparties et la valeur du capital fiscal. Ce boni de liquidation est taxé au titre de dividende et soumis à la retenue du précompte mobilier porté à 30 % depuis le 1er janvier 2017, pour autant qu’une exonération de précompte ne s’applique pas. La liquidation implique enfin la taxation à l’impôt des sociétés des réserves antérieurement immunisées par application du principe d’intangibilité prévu à l’article 190 du CIR lorsque le boni de liquidation est prélevé sur ces réserves. L’article 209, alinéa 2, du CIR impose l’ordre des prélèvements. Ces règles d’imputation s’appliquent à la scission partielle. Par conséquent, les sommes réparties doivent tout d’abord être imputées sur le capital fiscal, ensuite sur les réserves taxées, et enfin sur les réserves immunisées. Cela implique la taxation d’un dividende net égal à la différence entre, d’une part, la valeur de marché des actifs et passifs transférés et, d’autre part, la somme du capital fiscal et des réserves taxées.
En vertu de l’article 210, §1er, 1°bis, du CIR, ce régime des articles 208 et 209 du CIR est également applicable à l’opération de scission partielle lorsqu’elle ne peut bénéficier du régime d’immunité de l’article 211 du CIR. En modifiant l’article 210, §3, du CIR par la loi du 16 juillet 2001, le législateur a voulu restreindre l’application du régime de la liquidation à la seule partie de l’avoir social qui est transférée à l’occasion de la scission partielle (article 210, §3, alinéa 1er, du CIR) . C’est un régime partiel de liquidation qui s’applique. Autrement dit, en cas de taxation de l’opération, le régime prévu aux articles 208 et 209 du CIR ne s’applique qu’aux éléments transférés à l’occasion de l’opération de scission partielle. L’avoir social non transféré, dont les éléments n’ont pas été réalisés, échappe à ce régime de taxation. Il résulte de ce qui précède que le risque d’imposition des plus-values latentes est limité à celles portant sur les seuls actifs transférés dans le cadre de la scission envisagée.
De la même manière, le boni de liquidation sera déterminé uniquement par rapport à la valeur des éléments transférés (article 210, §3, alinéa 2, du CIR) : seul l’excédent que présente la valeur réelle des seuls actifs et passifs transférés par rapport au capital fiscal de la société partiellement scindée est considéré comme un dividende distribué.
Nous retiendrons qu’une scission partielle de société qui ne répondrait pas aux conditions d’immunisation prévue à l’article 211 du CIR sera soumise à l’impôt des sociétés sur les plus-values latentes des éléments transférés et au précompte mobilier sur le versement du boni de liquidation déterminé par rapport à la valeur des éléments transférés .
INTRODUCTION |