Situation de la qualité totale dans les PME du domaine du service

Situation de la qualité totale dans les PME du domaine du service

Le phénomène de la qualité est relativement récent pour les PME québécoises de services et les statistiques n’abondent pas en ce domaine. Cependant, une étude publiée en octobre 1992 par le CRIQ (1992) sur la perception des dirigeants d’entreprises au Québec, à l’égard de la qualité totale, nous fournit des renseignements intéressants. Ainsi les dirigeants de tous les types d’entreprises sont unanimes (98%) quant à leur volonté d’améliorer la qualité, mais paradoxalement seulement 55% des dirigeants provenant de PME du domaine des services connaissent le concept de qualité totale.

Le constat suivant émerge de cette enquête au sujet des PME québécoises du domaine des services. Elles sont 35% à avoir démarré un programme de qualité totale et parmi celles qui ne l’ont pas fait, 31% indiquent avoir l’intention d’en démarrer un. Les résultats doivent être interprétés avec précaution puisque parmi les entreprises qui ont démarré un programme de qualité totale, 41% l’ont fait depuis une année et moins, 34% depuis deux à cinq ans et 25% depuis plus de cinq ans. On remarque aussi que seulement 32% des entreprises du domaine des services ont eu recours à des consultants externes dans leur démarche, tandis que les entreprises du secteur manufacturier ont eu recours au conseiller dans 64% des cas.

Le degré d’engagement de la haute direction est considéré comme élevé (fort) dans 79% des entreprises, mais par contre seulement 32% de ces directeurs formulent par écrit des objectifs annuels pour leur programme. Il est à noter que le degré d’engagement décroît à chaque niveau de la structure hiérarchique. Au niveau de la formation, 73% des entreprises ayant un programme, en dispensent à leurs employés, contre 60% pour les entreprises n’ayant pas de programme. Plus spécifiquement, 45% des entreprises forment leurs employés à l’approche client, ce qui est un peu paradoxal si on constate que 65% des entreprises qui n’ont pas démarré de programme de qualité totale font ce type de formation. Les données ne nous permettent pas d’expliquer ces résultats, mais il est évident que les entreprises qui ont démarré un programme de qualité totale ne sont pas les seules à avoir des préoccupations à ce niveau.

Dans les entreprises impliquées dans un processus d’amélioration de la qualité, il est intéressant de constater la répartition de la formation par groupes d’employés. La haute direction reçoit 75%, le niveau intermédiaire 50%, le personnel administratif et de support 46% et les employés sur la « ligne de feu » 92%. Dans la mesure où 70% des entreprises évaluent la qualité du service interne, il semble y avoir un paradoxe entre l’importance accordée à cette qualité et la formation donnée aux cadres de niveau intermédiaire, le personnel administratif et de support. Le sondage ne nous fournit pas de précision à ce sujet.

Les données recueillies indiquent de façon générale qu’il y a un manque de communication des objectifs et surtout un manque dans la diffusion des résultats du programme aux employés. Cette étude nous fournit aussi des informations sur les principaux éléments de différenciation par rapport aux concurrents, selon les dirigeants des entreprises. Il est à noter que les réponses sont similaires auprès des entreprises qui n’ont pas de programme de qualité. La qualité du service est le premier facteur de différenciation avec 4 7% des réponses; viennent ensuite la qualité des produits avec 21% des réponses et finalement le prix avec 18% des réponses. Pour compléter le pointage, il y a 14% de réponses diverses.

Il y a peu de données concrètes qui sont disponibles sur l’attitude des dirigeants face au défi de la gestion de la qualité. Une étude du professeur Joseph Kélada (1988) auprès d’entreprises québécoises productrices de biens démontre certaines tendances qui pourraient être transposées au secteur des services, si on en croit plusieurs articles de revues et de journaux parus récemment sur ce sujet. Les dirigeants de PME perçoivent malle rapport entre un système à prédominance administrative, la gestion de la qualité et l’obtention de la qualité. « Ils favorisent les aspects techniques du contrôle de la qualité pour garantir la qualité finale, au détriment des aspects informationnels et organisationnels, qui leur apparaissent inutilement bureaucratiques. »(Kélada,1988; p. 1) .

Certains dirigeants semblent avoir mal interprété le précepte « la qualité, c’est l’affaire de tous » en rejetant la responsabilité de la non-qualité sur le manque de motivation des travailleurs. On oublie, un peu vite, que l’implication des membres de la direction, la pertinence des systèmes mis en place et la disponibilité de l’information sont aussi des facteurs fondamentaux d’une gestion efficace de la qualité. Les contrôles de gestion, d’après lesquels sont jugés les gestionnaires, mettent peu d’emphase sur les critères de qualité. La gestion de la qualité suppose une qualité du management.

L’accent est donc mis davantage sur les moyens que sur des objectifs biens définis à atteindre. L’implantation d’une démarche qualité exige à priori l’établissement d’un diagnostic et la quantification des coûts de non-qualité. Il faut des procédures formelles au niveau des activités de gestion, comme par exemple des collectes de données utilisables pour alimenter le processus d’amélioration continu. Peu de PME font une analyse critique de leur performance au niveau qualité.

Le résultat de l’absence ou de la faible formalisation dans la PME, c’est que l’aspect structurel est négligé, ce qui rend difficile l’instauration d’un système d’assurance de la qualité. La position hiérarchique du responsable du service-qualité indique que la qualité n’est pas considérée comme un élément d’importance primordiale pour la plupart des entreprises. » …. « Nous croyons donc que cette orientation qualité que disent adopter les dirigeants des entreprises relève plus du slogan que d’une implication réelle de la direction à tous les niveaux de l’entreprise » (Kélada, 1988, p. 7-8).

Finalement dans les petites entreprises, on tente de régler les problèmes de nonqualité en ayant recours à des recettes toutes faites et à des « gadgets » plutôt qu’à une stratégie adaptée aux besoins de l’entreprise. Cette approche a des conséquences que résument les auteurs Collignon et Wissler (1984) en ces termes; « Une approche « fragmentée » de la gestion de la qualité ne conduit qu’à des résultats limités et introduit même des surcoûts et des dysfonctionnements nouveaux. » Les actions-qualité restent décevantes lorsqu’elles ne sont pas bien intégrées au système de management de l’entreprise ou au style de gestion du propriétaire dirigeant. Ce qui rejoint les propos de Gilbert Raveleau (cf. Bloch et al., 1986) .

La cause généralement observée des échecs dans les démarches qualité est la non cohérence entre les différents systèmes de management de l’entreprise: marketing, finance, production et ressources humaines. Implanter la qualité totale requiert un engagement réel de la part de la direction qui doit assurer un lien étroit entre la gestion de la firme et cette philosophie.

La gestion intégrale de la qualité, bien plus qu’un mode de gestion, est une réponse des organisations à un environnement de plus en plus complexe et turbulent. Il s’agit d’une véritable stratégie d’entreprise.

Table des matières

INTRODUCTION
CHAPITRE 1 LA PROBLÉMATIQUE
Introduction
1.1 L’approche qualité totale
1.2 Les caractéristiques du secteur des services
1.3 L’approche « produit » vs l’approche « utilisateur »
1.4 Situation de la qualité totale dans les PME du domaine du service
1.5 Les caractéristiques des PME
1.6 Le problème de recherche
1.7 Formulation des buts et objectifs de la recherche
Conclusion
CHAPITRE2 LA QUALITÉ TOTALE: CONCEPTS ET ÉVOLUTION
Introduction
2.1 L’historique
2.2 Philosophie et concepts
2.3 Les paramètres de la qualité
2.4 Les clients internes et externes
2.5 Démystification des coûts de la qualité
2 .6 Le mythe de la « maitrisabilité »
2.7 La mesure de la qualité
2.8 Les outils de la qualité
2.9 La gestion de la qualité
2.10 Normalisation et amélioration de la qualité
2.11 La réingénierie des processus d’affaires
2.12 La pratique de la qualité
Conclusion
CHAPITRE 3 LA MISE EN PLACE DE LA QUALITÉ
Introduction
3.1 Les démarches d’amélioration de la qualité
3.2 Le changement dans les organisations
3.2.1 Les bases du changement
3 .2.2 Un cadre conceptuel des actions de changement
3.2.3 Une approche stratégique du changement
3.3 Le diagnostic-qualité
3.4 Une approche contingente
Conclusion
CHAPITRE4 LE MODÈLE DE DIAGNOSTIC-QUALITÉ
Introduction
4.1 Les facteurs de contingence
4.2 Le processus d’intervention
4.3 Les étapes du modèle de diagnostic-qualité
4.4 Description des étapes du modèle
Conclusion
CHAPITRE 5 L’EXPÉRIMENTATION
PHASE 1: LE DIAGNOSTIC PRÉLIMINAIRE
1.1 Rencontre initiale du client
1.2 Diagnostic exploratoire
1.3 Formulation et présentation des recommandations
PHASE 2: L’OFFRE DE SERVICE
2.1 Etude de pré-faisabilité
2.2 Définition sommaire des paramètres de la démarche
PHASE 3: LA PLANIFICATION DE L’INTERVENTION
3.1 Création du comité directeur de la qualité
3.2 Activités de sensibilisation et familiarisation à la qualité
3.3 Mise en place de procédures de cueillette de données
PHASE 4: LE DIAGNOSTIC
4.1: LE DIAGNOSTIC-CLIENTS
4.2 LE DIAGNOSTIC DES SYSTÈMES
4.3 LE DIAGNOSTIC ORGANISATIONNEL
4.4 LA VISION DU PROPRIÉTAIRE-DIRIGEANT
4.5 ANALYSE DES RÉSULTATS
5.0 RECOMMANDATIONS
CHAPITRE6 RÉFLEXIONS MÉTHODOLOGIQUES
6.1 Rappel des objectifs de la recherche
6.2 Les résultats de la recherche
CONCLUSION

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