LE TRAVAIL D’ÉQUIPE SELON QUELQUES RECHERCHES RÉCENTES
Les avantages du travail d’équipe
Selon Clarke, Wideman et Eadie (1992), trois raisons justifient le travail d’équipe en classe qu’ils nomment « l’apprentissage coopératif en groupes restreints ». La première est d’accroître « 1′ efficacité de 1′ école » (p. 4). La seconde est « de mettre à profit la diversité de la population des écoles publiques et de promouvoir des relations ethniques et raciales positives » (p. 5), et la troisième raison consiste à maximiser « l’égalité des chances en éducation » (p. 6). Clarke, Wideman et Eadie font ressortir ces avantages d’un « imposant corpus de recherches », disent-ils, comprenant « plus de huit cents études menées sur plus de vingt-cinq années » (p. 6).
En s’appuyant sur ces nombreuses études, ces trois auteurs recommandent ce mode de travail aux enseignantes et enseignants car, affirment-ils, il « permet de promouvoir des écoles efficaces qui contribuent au développement scolaire personnel et social des élèves » (p. 4). En effet, Clarke, Wideman et Eadie soulignent que ces recherches démontrent une « amélioration des résultats des élèves » (id.) et « un accroissement du sentiment de leur valeur personnelle » (id.) grâce au travail d’équipe. Ce mode de travail contribue également selon ces mêmes auteurs à 1’acquisition « des valeurs telles que le respect et le souci d’autrui, le sens des responsabilités, la solidarité et l’empathie » (p. 7). Ce sont là les principaux effets positifs de 1 ‘apprentissage coopératif en groupes restreints ressortis par ces trois auteurs.
L’application de ce mode de travail comprend certaines modalités explicitées au point suivant.
Quelques modalités du travail d’équipe
Après avoir mentionné plusieurs avantages du travail en équipe, voici maintenant quelques conditions pouvant favoriser, l’utilisation de ce mode de travail .
Rassurer les élèves, les observer en suscitant la réflexion, structurer leurs activités et informer les parents de la démarche de travail d’équipe utilisée est, selon Clarke, Wideman et Eadie (1992), « créer un .cadre pratique et sécurisant pour les élèves qui font leurs premiers pas dans 1 ‘apprentissage coopératif en groupes restreints » (p. 35), un apprentissage qui peut paraître quelquefois difficile.
Travailler en équipe « est un apprentissage au même titre que d’autres » (p. 85), soutient Paquette (1976), et selon lui, il est normal et même inhérent à la vie des groupes, de vivre des problèmes. « Les résoudre est un apprentissage important » (id.), dit-il. Il propose par conséquent certaines conditions susceptibles d’aider ceux et celles qui souhaitent utiliser le travail d’équipe en classe plus efficacement. Parmi ces conditions, il y a notamment celles relatives au choix des tâches à effectuer en équipe et celles concernant la formation des équipes.
Cet auteur précise que toutes les tâches ne peuvent s’effectuer en équipe et qu’il existe un type de tâche qui correspond mieux à ce mode de travail. Une tâche à réaliser en équipe doit requérir la contribution de tous et permettre différents résultats comme par exemple, inventer une machine pour résoudre des additions mathématiques. Une tâche comme celle d’additionner 2+2 ou tout autre tâche qui n’implique qu’un résultat unique n’est pas une tâche à réaliser en équipe (p. 86).
Selon Paquette, choisir une tâche appropriée, c’est-à-dire qui répond aux conditions mentionnées ci-dessus, permet une utilisation adéquate de ce mode de travail (id.). Le choix pertinent d’une tâche dépend, de plus, du type d’équipe formée.
Paquette définit deux types d’équipe: « l’équipe permanente » et « l’équipe temporaire ». L’équipe permanente correspond « au groupe de base pour un élève donné, pour un temps donné » (p. 86) à l’avance, soit une semaine ou plus. L’utilité de l’équipe permanente est d’assurer une continuité dans le travail amorcé en équipe et de permettre aux élèves d’avoir le temps de solutionner les problèmes qu’ils rencontrent dans leur fonctionnement et ainsi d’apprendre à mieux travailler en équipe (p. 87).
L’équipe temporaire, elle, est formée « en fonction d’une tâche donnée » (p. 88) et de « l’intérêt commun d’un certain nombre d’élèves (id.) pour cette tâche à un moment non fixé par l’enseignante. J’appelle aussi ces équipes « spontanées » car elles se forment spontanément, selon les préférences des élèves et sans 1′ intervention de l’enseignante. Ce type d’équipe « assure une flexibilité constante dans la classe » (p. 88) et, nous dit Paquette, « permet de compléter les équipes permanentes » (id.) quand les élèves manifestent le goût de se placer avec un élève en particulier pour une tâche spécifique.
Ainsi, 1′ organisation d’une tâche à réaliser en équipe et la formation des équipes de travail dans la classe doit faire 1′ objet d’une attention spéciale de la part de 1’enseignante ou de 1′ enseignant. Paquette nous suggère ces modalités relatives au choix de la tâche et de la formation des équipes dans le but d’améliorer le travail d’équipe en classe et de rendre cet apprentissage plus fructueux.
Le travail d’équipe, un élément de motivation
Slavin (1990) affirme, comme Clarke, Wideman et Eadie (1992), que le travail d’équipe, qu’il nomme « cooperative learning », a une influence positive sur les résultats scolaires de l’élève et sur son développement en général. Cet auteur dit que 1 ‘usage de la compétition dans les classes pour motiver les élèves ne produit pas l’effet escompté mais, conduit à des résultats pernicieux pour l’élève. À l’inverse, le travail d’équipe accroît la motivation de 1 ‘élève et développe chez lui 1 ‘estime de soi (p. 43).
Certains problèmes sont toutefois soulevés par cet auteur quant à l’utilisation du travail d’équipe en classe. Il mentionne une difficulté pour certaines équipes à rester ensemble, une mauvaise conduite, le bruit, l’absence d’un membre de l’équipe, la perte de temps, l’écart élevé entre certains élèves et leurs pairs dans leur rendement scolaire. Slavin suggère quelques solutions à ces problèmes. Il utilise un système de pointage dans lequel les élèves peuvent accumuler des points pour leur équipe. Ces points se gagnent grâce au travail produit, à des attitudes de coopération ou en rapport avec les critères discutés auparavant entre les élèves de la classe et l’enseignante. Les points accumulés par 1′ équipe lui permettent d’être élue « équipe championne de la semaine ». Les problèmes rencontrés peuvent ainsi être traités, selon Slavin (p. 123), avec ce système qui amène les élèves à se stimuler les uns les autres dans le but de faire gagner leur équipe en cumulant le plus de points.
Beaucoup de recherches restent à faire, selon Slavin (1990), pour comprendre les effets du travail d’équipe, « cooperative learning », et pour appliquer les principes de ce mode de travail. Mais, les recherches présentes démontrent que sous certaines conditions, le travail d’équipe peut avoir un effet positif sur l’organisation de la classe et la réussite scolaire de l’élève (p. 31).
Le travail d’équipe et le développement cognitif de l’enfant
Les recherches effectuées par Perret-Clermont (1979) tentent « de démontrer l’effet de l’interaction sociale sur certains aspects du développement cognitif » (p. 32) de 1′ enfant. Plusieurs des expériences réalisées par cette chercheure s’adressent à des enfants dont l’âge se situe entre quatre et sept ans (p. 197). Les résultats de ces expériences mettent en évidence, selon Perret-Clermont, que: .. dans certaines conditions une situation d’interaction sociale qui requiert que les sujets coordonnent entre eux leurs actions ou qu’ils confrontent leurs points de vue peut entraîner une modification subséquente de la structure cognitive individuelle (p. 197).
Pour qu’une situation d’interaction sociale soit féconde, il doit y avmr opposition de points de vue différents « avec un degré optimal de divergence » (p. 201). C’est ce que l’auteure nomme le « conflit socio-cognitif » (p. 202). Cette notion de « conflit socio-cognitif » est utilisée par Perret-Clermont dans l’analyse des résultats des expériences qu’elle a menées. Elle fait le lien entre ses travaux et la pédagogie en mentionnant que 1′ approche qu’elle décrit « semble appropriée pour étudier les modalités de l’enseignement mutuel et du travail de groupe à l’école » (p. 227).
D’autres auteurs rejoignent Perret-Clermont. Il y a entre autres, Bednarz et Garnier (1989) qui écrivent que cette notion de « conflit socio-cognitif » « favorise la réflexion théorique sur les pratiques pédagogiques et en particulier sur le travail de groupe, le tutoring et l’enseignement mutuel » (p. 21). Ces auteurs apportent une raison de plus pour utiliser, malgré les conflits, et peut-être en raison des conflits, le travail d’équipe en classe.
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