Les matrices
Il existe une grande variété de matrices qui sont soit d’ origine minérale ou organique. Dans ce travail, on s’ intéresse à des matrices organiques thermodurcissables. Ce type de matrice est généralement utilisée pour la fabrication des composites de structure du fait de leurs propriétés mécaniques assez intéressantes. Les résines thermodurcissables sont essentiellement utilisées pour des pièces de structures à cause de leur caractéristique mécanique élevée. Leur rôle essentiel de la matrice est de maintenir les fibres en place, de transmettre et de distribuer les sollicitations mécaniques extérieures à la fibre. L’ utilisation des agents couplage entre fibres/matrice ou des traitements des fibres permettent de renforcer l’interface fibre/matrice et d’ améliorer leurs propriétés.
Composites à fibres naturelles (CFN) Les CFN résultent de l’association d’une matrice avec des renforts de fibres naturelles. Il existe une variété de configuration CFN avec différentes tailles et orientation de fibres. Les techniques de fabrication des CFN les plus couramment utilisées sont: la thermocompression, l’autoclave, le RTM (moulage par transfert de résine), l’infusion et le drap age manuel. On peut classer les CFN en différentes familles suivant la morphologie des fibres (courtes, longues) ou suivant la distribution spatiale des fibres dans la matrice (aléatoire, orientée, etc.). Les composites dits structuraux se distinguent des autres composites par l’ utilisation de fibres continues organisées sous forme de plis unidirectionnels.
Propriétés mécaniques des composites structuraux à fibres naturelles Les caractéristiques mécaniques des composites dépendent principalement de la composition du matériau, des caractéristiques des fibres, de l’ architecture du composite et du procédé de fabrication [10, Il]. Parmi les variétés de composites, les composites dits structuraux présentent les caractéristiques mécaniques les plus élevées. Ces composites structuraux sont essentiellement des stratifiés de fibres longues. Leur comportement mécanique est quasi-linéaire comparativement aux autres types de CFN. Certains de ces CFN peuvent concurrencer des composites à fibres de verre en termes de propriétés mécaniques spécifiques. Un exemple de comparaison des propriétés mécaniques du composite unidirectionnel du lin/polyester avec le composite de verre/polyester a été illustré par la Table I1.3. La Table II.4 montre une liste non exhaustive du module élastique des composites structuraux de lin/époxy recueillis dans la littérature. Les résultats de la Table II.4 montrent une forte dépendance du module élastique avec, la fraction volumique des fibres, le procédé de fabrication, avec le type de résine utilisée et même avec l’orientation des fibres. On peut même constater pour un même matériau, fabriqué avec le même procédé le module de Young (ET) diffère du module en flexion (EF). Cette différence est surtout est attribuée à l’hétérogénéité du matériau. Ces données publiées dans cette article démontrent la pertinence d’un choix judicieux des paramètres liés à la composition du composite ou au procédé de fabrication afin d’ assurer les propriétés mécaniques meilleures pour le composite.
Vieillissement et mécanisme de vieillissement des composites à fibres naturelles
Le vieillissement d’un matériau se décrit comme étant une dégradation lente et irréversible des propriétés du matériau par rapport à son état initial. Le vieillissement consiste à exposer un matériau aux phénomènes environnementaux, chimiques de façon naturelle ou artificielle. Le phénomène de vieillissement crée pour la plupart du temps la modification des propriétés d’un matériau. Diverses dégradations physico-chimiques sont donc générées lors au cours du vieillissement au sein d’un composite: le gonflement, l’hydrolyse, la photo-oxydation, la plastification, la décohésion fibre/matrice, etc. Les CFN ont quant à eux une forte sensibilité aux paramètres environnementaux comme les rayons ultra-violets (UV), la température, l’humidité dans l’air et le contact avec l’eau [13, 14]. On assiste généralement à la dégradation de leurs propriétés mécaniques. Cette dégradation varie en fonction de la nature de la fibre, de la matrice utilisée, de la structure du matériau (la composition, l’agencement des fibres), des conditions de vieillissement, etc. La surface du composite et l’interface tibre/matrice sont des sites les plus vulnérables lors du vieillissement d’un CFN. Certains constituants du composite comme les fibres ou la matrice peuvent parfois aussi être attaqués. Dans la littérature, les études sur le vieillissement de CFN sont en nette progression depuis quelques décennies (Figure II.1).
Une collecte de ces articles dans la base de données Scopus montre que les techniques de vieillissement accélérées sont le plus souvent utilisées aux dépens du vieillissement naturel. Plusieurs travaux utilisent la technique de vieillissement accéléré pour évaluer les propriétés mécaniques résiduelles et prédisent la perte des propriétés à long terme en se basant sur l’hypothèse de la loi d’Arrhenius. Cette loi suppose que si un seul phénomène de dégradation survient dans une certaine plage de température et qu’aucun autre mécanisme supplémentaire ne se déclenche, l’effet temps et température pourrait être considéré comme équivalent. La réalité demeure que le vieillissement naturel implique à la fois plusieurs facteurs environnementaux et plusieurs propriétés.
Vieillissement thermique et ses mécanismes pour un CFN
Les fibres naturelles sont très sensibles à la dégradation thermique. Elles ne peuvent pas être utilisées pour des procédés de fabrication de composites nécessitant des températures excédant 200°C [20, 21]. Les analyses par thermogravimétrie (TGA) et par calorimétrie différentielle à balayage (DSC) sont les méthodes les plus utilisées pour étudier la dégradation thermique des fibres naturelles. Le DSC permet notamment de mesurer les transitions de phase, la capacité calorifique d’un matériau au cours d’une variation de température. Dans le cas des CFN, cette mesure permet de détecter la température de transition vitreuse et l’ état de cristallisation de chaque constituant du composite. La limite de température de transition vitreuse est la température à laquelle les propriétés mécaniques commencent à changer de façon significative. Pour des températures en dessous de la température de transition vitreuse, les chaines polymères présentent une faible mobilité relative. Ils deviennent durs et fragiles. Ils sont à l’ état vitreux. Les tests de TGA permettent de connaitre la stabilité thermique du matériau. Cette technique mesure la perte de masse en fonction de l’évolution de la température. Le processus de dégradation des fibres naturelles se fait généralement suivant deux étapes.
La première étape est la déshydratation des fibres combinée à la volatilité de certains composants. Cette étape est suivie d’une rapide perte de masse liée à décomposition par oxydation des polymères. La première réduction de masse est associée à la dépolymérisation de l’ hémicellulose et une décomposition des liaisons entre les celluloses. La décomposition de la lignine se fait généralement entre 200 à 500°C [22]. En effet, les liaisons entre la lignine et la cellulose ont tendance à se cliver facilement à cause de leur composition chimique complexe. Leur dégradation de la lignine occupe donc une large gamme de température. Dépendamment de leurs constitutions (fibre, matrice et agent de couplage), les CFN subissent des changements de dimension lors d’une variation de température. À des températures de 100 à 200°C par exemple, on constate un phénomène de fluage et de distorsion de certains composites à matrice polymères. L’ augmentation de température altère la structure d’un CFN par une augmentation de la mobilité des chaines polymères qui engendre un phénomène de fluage, qui peut être suffisante pour entrainer des fissures lors du refroidissement du matériau. La dilatation des polymères au sein des CFN qui crée à son tour des contraintes locales à l’ interface fibre/matrice. Entre 300 et 500°C, la matrice polymère se décompose en libérant des matières volatiles toxiques [23]. L’augmentation de la température peut soit causer directement une expansion thermique au sein du matériau qui affectera les propriétés mécaniques ou soit favoriser indirectement une forte absorption de 1 ‘humidité qui conduit également à la dégradation des propriétés thermiques. L’avantage du lin est qu’ il présente une meilleure résistance thermique parmi les fibres naturelles en raison de sa faible teneur en lignine.
Quelques exemples d ‘articles parlant du vieillissement des CFN Popa et al. [25] ont étudié l’ effet combiné UV, humidité et température sur le comportement mécanique d’un polypropylène renforcé avec 60 % de fibres de chanvre courtes soumis à une exposition de 600 h aux UV et à l’humidité. Après le vieillissement par UV, ils observent une réduction de la résistance de rupture, une diminution de la déformation de rupture, de la résistance d’impact de Charpy, mais par contre ils observent une augmentation du module de Young. Ils expliquent cette perte de propriétés mécaniques par le processus de photodégradation dans le polymère et dans les fibres qui entrai ne la rupture des chaines dans le polymère. Par contre, aucune explication n’est donnée à l’augmentation du module de Young. Mais une exposition à la fois aux UV et à l’humidité diminue considérablement les propriétés mécaniques y compris le module de Young. Thuault et al. [26] a étudié l’ influence hygrothermale sur les propriétés mécaniques des composites à fibres de lin et ils ont constaté une perte des propriétés mécaniques qui varie suivant le temps d’exposition des échantillons. Assarar et al. [14] a aussi étudié le comportement hygrothermal d’un laminé lin/époxy et du verre/époxy. Ils ont observé que le vieillissement hygrothermal dégrade le module de Young des deux composites, mais les propriétés élastiques du lin/époxy sont plus affectées que celles du verre/époxy. Pour eux, cette perte des propriétés élastiques est surtout due à l’endommagement à l’ interface fibre/matrice. Ces différents articles illustrent les différents mécanismes physico-chimiques et mécaniques observés lorsqu’on soumet les CFN aux rayons UV, à l’humidité et à la température. L’ampleur de la dégradation des propriétés mécaniques face au vieillissement environnemental dépend surtout de la composition du CFN. Le portrait de la revue de littérature sur le vieillissement montre un manque de données dans l’étude vieillissement hygrothermal cyclique à long terme ou sur l’étude du vieillissement sur le comportement mécanique à long terme des CFN. Ce sont ces deux volets qu’on aura à étudier dans la suite de cette thèse. L’ influence des paramètres d’exposition sur le comportement mécanique à court et à long terme du composite va être quantifiée. L’effet unique de la température sur le comportement mécanique spontané sera également évalué.
1. CHAPITRE 1 : INTRODUCTION |