Développement des plantes sous stress froid
Les végétaux face aux stress abiotiques
Les plantes sont souvent confrontées à des conditions environnementales défavorables qu’on peut dénommer ‘stress’ et qui ont pour conséquence une diminution de la croissance. Constamment soumises à toutes sortes de stress environnementaux d’origine biotique (agressions par des agents pathogènes) ou abiotique (excès ou défaut de lumière, fluctuations brutales de température, hypoxie, stress hydrique, salinité, etc.) et incapables de se mouvoir elles ont développé, au cours de l’évolution, des stratégies variées et ingénieuses pour se défendre et s’adapter à leur environnement changeant, en déclenchant des spectres parfois très complexes de réponses moléculaires, métaboliques et morphogénétiques. La connaissance accrue de l’ensemble des métabolites formés (ou métabolome), des gènes correspondants et des facteurs de transcription contrôlant leur expression devrait permettre d’envisager un contrôle raisonné de «l’usine» chimique végétale dans une optique utile à l’homme.
Indépendamment des stress biotiques provoqués par des agents pathogènes des plantes, il y a une multitude de stress abiotiques, tels que l’indisponibilité de l’eau (sécheresse), de température extrême (refroidissement, congélation, chaleur), de salinité, de métaux lourds (toxicité d’ion), d’irradiation photonique (UV-B), d’indisponibilité d’éléments nutritifs, et de structure dans le sol. Les stress abiotiques induisent, séparément ou en association, à des effets néfastes généraux et spécifiques sur la croissance et le développement des plantes, pour arriver finalement aux rendements des récoltes. Les principaux stress abiotiques (sécheresse, salinité, gel) mènent à une disponibilité réduite de l’eau pour des fonctions cellulaires essentielles et à l’entretien de la pression de turgescence.Cependant, au-delà des mécanismes communs, la réponse à ces stress présente des spécificités.La plupart des plantes ont développé de divers mécanismes d’adaptation et de désintoxication pour surmonter ces états de stress. Certaines de ces réponses les plus communes pour la tolérance aux stress abiotiques sont la surproduction de plusieurs corps dissous organiques compatibles nommés des «osmoprotectants» ou des osmolytes (tels que le saccharose, les bétaïnes, la proline) pour l’ajustement osmotique et protection des structures souscellulaires, changements métaboliques cellulaires (production secondaire de métabolite, activité protéolytique, homéostasie ionique, règlement des état redox, activation d’enzymes antioxydants etc.), changements anatomiques et morphologiques des tissus, induction d’expression de gènes, activation des gènes impliqués dans des voies de transduction de signal (tels les gènes codant pour des protéines kinases) aboutissant à des changements complexes de l’expression de gènes ayant pour résultat l’adaptation des plantes aux stress abiotiques(Avia et Lejeune-Hénaut, 2007). Les contraintes environnementales représentent un des facteurs limitant pour la productivité agricole et jouent un rôle important dans la distribution des espèces végétales à travers différents types d’environnements (Singh et al. 2002; Dita et al. 2005; Zhang et al. 2008; Saibo et al. 2009). La sécheresse, le froid et la salinité des sols représentent un obstacle pour les espèces cultivées. Ces stress abiotiques entraînent une diminution de 70% du rendement des plantes de grandes cultures, via des altérations morphologiques et physiologiques (Boyer, 1982). De ce fait, la compréhension des mécanismes de tolérance à ces stress constitue un enjeu économique majeur, sachant que les stress abiotiques présentent des éléments communs à la fois pour les dommages occasionnés et pour la réponse de la plante. La mort cellulaire induite par le stress a été la plus étudiée dans le cas des interactions plantes-pathogènes, où il a été établi que les modifications redox, surtout liées à la production de formes actives d’oxygènes comme le H2 O2 , jouent un rôle important. Tous les stress impliquent des réactions de signalisation capables d’aboutir à la mise en place de défenses ou de déclencher une mort cellulaire programmée. La sécheresse, la salinité et le froid induisent un stress osmotique et un stress oxydatif qui entraînent un déséquilibre de l’homéostasie et une fragilisation des membranes et des protéines. La perception puis la transduction du signal aboutissent à l’expression de gènes régulateurs qui eux-mêmes contrôlent les gènes effecteurs permettant la mise en place des mécanismes de tolérance aux stress .
Développement des végétaux sous basses températures
Acclimatation des végétaux au froid
Selon Pearce (1999), les espèces sont divisées en trois catégories : Les plantes tolérantes au gel qui sont capables de s’acclimater pour survivre à des températures inférieures à 0° C. Les plantes tolérantes au froid mais sensibles au gel qui sont capables de s’acclimater à des températures inférieures à 12°C mais ne survivent pas au gel. Les plantes sensibles au froid pour lesquelles des températures inférieures à 12°C entrainent des dommages. Quand les plantes sont soumises à des températures sub-optimales (entre 10 et 20°C), des dommages tissulaires et cellulaires apparaissent et à des températures négatives, les parties aériennes meurent. L’acclimatation est l’ensemble des processus induits lors d’une exposition de la plante à des conditions particulières du milieu. Pour les basses températures, elle est induite principalement par les températures modérées. Au sein d’une même espèce la réponse varie en fonction du génotype. Ces différences ont été acquises au cours de l’évolution car chaque population s’est adaptée à des climats différents. Au niveau de la plante, la réponse varie en fonction du stade de développement, des organes ou tissus concernés. Les mécanismes de réponse au stress peuvent être spécifiques ou communs à plusieurs stress. La régulation de l’expression des gènes sous stress peut induire aussi des changements spécifique ou universels au niveau des transcrits des gènes chez certaines plantes (Shinozaki et Yamaguchi-Shinozaki, 2000). Basé sur l’universalité et la spécificité des mécanismes de tolérance aux stress abiotiques, qui peuvent se chevauchées (crosstalking) à des étapes différentes de perception et de transduction, les plantes pourraient avoir de multiples perception du stress et de différentes voies de transduction du signal (Chinnusamy et al. 2003). On parle de cross-tolérance lorsque les même voies de réponse sont employées pour répondes à des stress différents (Pastori et Foyer, 2002). L’acclimatation au froid est aussi définit comme l’endurcissement ou la tolérance au froid elle est décrite comme le développement ou l’augmentation de la tolérance par l’adaptation des mécanismes cellulaires (Pirzadah et al. 2014). L’acclimatation au froid est un caractère quantitatif avec des processus complexe impliquant des changements physiologiques et métaboliques sous contrôle génétique. L’acclimatation au froid implique aussi un grand nombre de gènes et est associée aux changements physiologiques et biochimiques dus à des changements d’expression de gènes (Thomashow, 1990; Hughes et Dunn, 1996; Palva et Heino, 1998; Thomashow, 1999; Lee et al. 2002; Heino et Palva, 2003; Ouellet, 2007; Gupta et al. 2011; Gulzar et al. 2011; Pirzadah et al. 2014).
Les végétaux, immobiles, ne peuvent échapper aux conditions climatiques défavorables. Le froid est la limitation majeure de la distribution des espèces sauvages et la baisse de la productivité des cultures, suite aux gelées soudaines d’automne ou à des températures inhabituellement basses en hiver, est considérable.
Les plantes doivent être capables d’appréhender les fluctuations transitoires aussi bien que les changements saisonniers de température et de répondre à ces changements en ajustant activement leur métabolisme pour y faire face. Une période d’exposition à de basses températures positives conduit, chez beaucoup d’espèces, à une tolérance augmentée aux températures négatives. Dans la nature, les basses températures de la fin de l’automne ou du début de l’hiver sont les principaux déclencheurs de l’acclimatation au froid bien que la qualité de la lumière et la photopériode peuvent aussi être impliquées dans cette réponse. Ainsi, chez le pois, cette adaptation au froid, grâce aux températures basses, n’a pas lieu quand l’intensité lumineuse est faible. Par contre, quand l’intensité lumineuse est normale, les pois d’hiver acquièrent une plus grande tolérance au gel que les pois d’été (Bourion et al. 2003). L’acclimatation est un processus réversible qui disparaît une fois que les températures remontent au-dessus de zéro (un redoux pendant l’hiver ou le retour des conditions printanières). Les plantes qui restent actives pendant l’hiver doivent maintenir leur métabolisme primaire essentiel pour conserver une croissance minimale. Elles doivent lutter contre le froid qui diminue la vitesse des réactions enzymatiques, et modifie la conformation des lipides membranaires et d’autres macromolécules ce qui a des conséquences sur la plupart des processus biologiques (Stitt et Hurry, 2002). De plus, quand la température est inférieure à zéro, la glace se forme dans les espaces intercellulaires où la concentration en solutés est faible ce qui facilite la prise en glace. Cette formation de glace provoque la perte d’eau des cellules d’où la déshydratation de la plante. Ceci explique que les résistances au stress froid et au stress hydrique partagent des mécanismes communs (Thomashow, 2010).
Influence des basses températures sur la mise en place et la distribution des plantes
Les basses températures ont un impact négatif sur la mise en place et l’émergence des cultures limitant ainsi leur distribution. Le froid est parmi les facteurs les plus importants contrôlant et limitant la germination des graines, le développement des jeunes plantules (croissance post germinative), la croissance et le développement de la plante adulte, ainsi que la distribution des plantes dans le monde (Boyer, 1982; Mohapatra et al. 1989; Yahia et Fyad-Lamèche, 2003; Fyad-Lamèche et al. 2007; Janda et al. 2007; Baruha et al. 2009; Dias et al. 2010; Kim et Tai, 2011). La germination et la croissance post-germinative sont des paramètres peu ciblés par les sélectionneurs, spécialement pour la tolérance aux températures extrêmes (basses et hautes). Augmenter les connaissances sur ces stades peut conduire à des améliorations génétiques indéniables pour la sélection de nouveaux cultivars tolérants au froid (Dias et al. 2010).
Introduction |