Les signaux physiologiques sont des signaux d’une grande complexité qui peuvent contenir des informations importantes, leur étude et compréhension nécessitent des méthodes non linéaires pour une meilleure interprétation de l’information.
Le choix de l’analyse est fixé selon l’étude des signaux dont la régularité varie brutalement d’un point à un autre et des courbes qui manifestant un très grand degré d’irrégularité (souvent singuliers en tous points) : l’analyse fractale, ce qui rend cette méthode plus approprié pour ce type de signaux. Dans ce chapitre, une description approfondie de quelques outils d’analyse fractale, tels que l’exposant de Hölder et la dimension de régularisation. Ces objets sont ensuite utilisés pour montrer la fractalité des signaux électrocardiogrammes.
Définition des fractales
Historique
Apparues au XIXe siècle, les fractales furent considérées comme des curiosités mathématiques jusqu’au milieu du XXe siècle. Elles n’acquirent un statut à part entière que dans les années 1970, grâce au mathématicien français Benoît Mandelbrot qui en fit l’objet d’une nouvelle discipline mathématique : la géométrie fractale. Mais d’abord, qu’est-ce qu’une fractale? Mandelbrot a proposé l’adjectif fractal en 1975 (du latin ‘fractus’ qui signifie irrégulier ou brisé) pour désigner des objets dont la géométrie complexe peut, pour simplifier, être caractérisée par une dimension non-entière permettant de rendre compte du degré de régularité des organisations structurelles, liées au comportement du système physique. Plus généralement, ce terme vise des objets au tracé fractionné et irrégulier, ce qui comprend les figures géométriques de dimension non entière (dimension fractale) et les ensembles de points invariants par changement d’échelle. Seulement La notion d’autosimilarité a été introduite par leibniz en 1700, pour mettre en évidence certaines structures très irrégulières, souvent construites par itération où l’agrandissement d’une partie est semblable au tout. De 1875 à 1925, Les mathématiciens comme Georg Cantor, Felix Hausdorff, Helgevon Koch et Giuseppe Peano qui s’interrogeaient sur la notion de dérivabilité, avaient construit toutes sortes de contre-exemples aux règles habituelles du calcul infinitésimal: des courbes continues mais ne possédant de tangentes en aucun point; des surfaces et des volumes très irréguliers. Ils créaient des objets que la nature ne connaissait pas, remettant en question la géométrie euclidienne et les notions de fonction et de dimension
Selon Mandelbrot, un objet fractal (figure géométrique ou un objet naturel) combine les caractéristiques suivantes :
a- ses parties ont la même forme ou structure que le tout, à ceci près qu’elles sont à une échelle différente et peuvent être légèrement déformées : propriété d’autosimilarité .
b- sa forme est, soit extrêmement irrégulière, soit extrêmement interrompue ou fragmentée, quelle que soit l’échelle d’examen.
c- il contient des éléments distinctifs dont les échelles sont très variées et couvrent une très large gamme.
Ainsi, une fractale est un objet mathématique se caractérisant par son irrégularité et son autosimilarité. Ces deux propriétés permettent de modéliser de façon déterministe des objets naturels très complexes. Les fractales peuvent s’adapter à de nombreux domaines d’applications comme la biologie et la médecine, la physique, l’informatique, les finances, la météorologie, les multimédias, l’art fractal, etc.) : Leur étude tardive peut être expliquée par la nécessité d’utiliser des ordinateurs (années 1970-1980).
Les fractales naturelles
La géométrie fractale n’est pas qu’une théorie abstraite. En effet, les fractales se sont révélées adaptées à la représentation d’objets naturels complexes. La nature fournit de nombreux exemples de structures fractales allant du macroscopique au microscopique, citons par exemple les branches des arbres, le profil des côtes, les surfaces des montagnes, les structures nuageuses, les éclairs électriques, les choux fleurs. De même, de nombreuses structures anatomiques sont caractérisées par une géométrie fractale: les embranchements des veines et des artères, l’orientation de certains faisceaux du muscle cardiaque, l’architecture des voies aériennes pulmonaires et du système de conduction d’« His-Purkinje » .
Cette autosimilarité des structures cardiopulmonaires sous-entend au moins une fonction physiologique importante : un transport rapide et efficient à travers des réseaux anatomiques à structure spatiale complexe. D’autres systèmes physiologiques sont caractérisés par une structure fractale facilitant la transmission de l’information (système nerveux), l’absorption des aliments (intestin) ou, simultanément, la distribution, le recueil et le transport (les canaux biliaires et rénaux, etc.). L’évolution de certains phénomènes dynamiques peut être caractérisée par une figure fractale. Par ailleurs, la beauté des fractales en a fait un élément clé de l’infographie.
Qu’est-ce que l’analyse fractale ?
L’analyse fractale est une stratégie de modélisation pluridisciplinaire pour des données dont la principale propriété est la fractalité, elle s’adapte à plusieurs domaines comme l’ingénierie biomédicale, la physique, l’économie, etc[4] en appliquant différents outils d’analyse. Ces outils ont permis de mieux comprendre quelques phénomènes complexes. Nous développerons ci-dessous quelques exemples d’outils de l’analyse fractale comme les dimensions fractales et les exposants de régularité.
Les dimensions fractales
Lors de son application en traitement du signal, l’analyse fractale est dans la majorité des cas utilisée à travers la notion de dimension fractale qui est un outil mathématique utilisé pour exhiber les irrégularités. C’est un paramètre important pour l’étude des fractales, de valeur non entière, elle représente une grandeur qui traduit comment un objet fractal rempli son espace. De nombreuses méthodes existent pour la calculer [5, 6], chacune ayant ses propres bases théoriques qui mènent souvent à l’obtention de dimensions différentes par des méthodes distinctes pour un même objet.
Qu’est-ce qu’une dimension ?
Dans l’antiquité, lorsqu’on parlait d’une dimension, on pensait soit à la hauteur, soit à la longueur, soit à la largeur d’une chose. Au dix-septième siècle, Descartes en donne une définition plus générale. Pour lui, une dimension est une coordonnée que l’on mesure dans un repère d’axes, c’est-à-dire que la hauteur, la longueur et la largeur correspondent à un cas particulier de coordonnées, celui où les trois axes sont orthogonaux entre eux (les coordonnées de l’espace euclidien). Au milieu du dix-neuvième siècle, le mathématicien Riemann donna une interprétation encore plus générale de la notion de dimension. Puisqu’un phénomène évolue sous l’influence de divers paramètres, Riemann suggéra que l’on attribue une coordonnée distincte à chacun de ces paramètres. De nos jours, on appelle ces paramètres des « degrés de liberté ». Ainsi donc, une dimension fut tout d’abord considérée comme un aspect très concret des objets, puis elle devint la coordonnée d’un point se déplaçant dans un espace réel à trois dimensions, ensuite cette coordonnée devint un degré de liberté dans un espace à « n » dimensions, avec « n » qui tend vers l’infinie.
Ces dernières années, cette définition des dimensions comme « coordonnées d’un point » ne fut pas remise en question, mais elle a commencé à poser problème. En géométrie euclidienne, les figures ont une dimension entière, un point est de dimension 0, une courbe est de dimension 1, une surface est de dimension 2 et un volume est de dimension 3, seulement que représente un espace à 1,3897 dimensions ? Il a bien fallu que les scientifiques finissent par reconnaître qu’ils laissaient de côté de nombreux phénomènes naturels fréquents qu’ils ne parvenaient pas à calculer et c’est qu’intervient la dimension fractale.
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