Réponse du riz pluvial aux engrais phosphatés

Dans le monde, le maïs, le riz, le blé et la pomme de terre constituent les principales cultures vivrières. Pourtant, la production n’arrive pas à satisfaire les besoins alimentaires de la population mondiale qui est estimée aujourd’hui à 7 milliards d’habitants (FAOSTAT, 2013). Ainsi, selon toujours la FAO en 2013, environ 842 millions de personnes, soit près d’une personne sur huit, souffrent de la faim chronique. Plus de 2 milliards de personnes subissent de graves carences en micronutriments : minéraux et vitamines (Mazoyer, 2006). A travers le monde, près de 3,5 milliards de personnes principalement des femmes et des jeunes enfants rencontrent des problèmes de santé suite à une carence en fer et en zinc (Berger, 2004). La carence en fer touche environ 40 à 60% des enfants de 6 et 24 mois. Suite à ce problème, 500 jeunes femmes malgaches meurent chaque année durant la grossesse ou l’accouchement et une diminution de la productivité de main d’œuvre adulte provoquant une perte d’environ 0,8% du PIB a été constatée (FAO, 2005).

La carence en micronutriments devient un véritable problème pour la santé publique. D’une manière générale, la carence en Zinc entraine le retard de croissance, des troubles mentaux et des infections à répétition. Pour le fer, elle se traduit par une diminution de la capacité physique et de la productivité ; par des décès maternels et de faible poids du nourrisson à la naissance et par la faible performance intellectuelle ainsi que le retard de la croissance (Berger, 2004). D’après la statistique, près de 1.487.900 personnes, soit près de 297.500 ménages, vivent dans l’insécurité alimentaire sévère (PAM, 2011).

En 2013 à Madagascar, la production rizicole est de l’ordre de 3,6 millions de tonnes de paddy. Seul le quart ou le tiers de cette quantité a été écoulé sur le marché local et international et le reste a été destiné à l’autoconsommation pour la population locale soit 2,5 millions de tonnes par an (FAO/PAM, 2013). Par rapport au besoin national, la production reste largement insuffisante. Ainsi, l’Etat est obligé d’importer une certaine quantité de riz chaque année.

Entre 1970 et 2004, si la croissance démographique est de 2,7%, l’augmentation de la production rizicole a été estimée à 1,2% soit deux fois moins que celle de la population. Par conséquent, la quantité de riz produit par habitant a baissé de 275 kg à 175 kg durant cette période. Cette situation est due à plusieurs facteurs entre autres: la non adoption des variétés améliorées et la faible utilisation d’engrais qui est de l’ordre de 10 kg/ha (MinAgri, 2011).

Ces contraintes sont également rencontrées dans la région Bongolava (Moyen Ouest) où les terres sont largement dominées par des zones de « tanety ». La riziculture pluviale y dominent et occupent environ 100 000 hectares avec un faible rendement de l’ordre de 2,1 t/ha (Monographie de la région Bongolava, 2009). Dans cette région, la superficie cultivable a été estimée à 51 % du territoire et dont 17,9% seulement est encore exploitée.

L’expérimentation a été menée dans la commune de Bevato, Région Bongolava dans le MoyenOuest de Madagascar. Elle est délimitée à l’Ouest par la Région Melaky, à l’Est par la Région Itasy, au Sud par Vakinankaratra, et à l’Ouest par la Région Menabe. Elle se situe entre 17,76° et 19,46° de latitude Sud et 45,48°et 47,08° de longitude Est.

La région Bongolava fait partie du régime climatique tropical d’altitude, supérieure à 900 mètres. La température moyenne annuelle de la région tourne autour de 22,7°C. L’année comporte deux saisons bien distinctes: une saison pluvieuse (humide et chaude) entre le mois de Novembre et Mars avec une température moyenne de 24°C et une saison sèche entre Avril et Octobre avec une température variant de 19,6°C à 23,7°C.

Les précipitations mensuelles de la région varient de 2,8 à 379,4 mm avec une moyenne annuelle de 122,7 mm. La tendance observée pendant la période de 2004 à 2014 à Tsiroanomandidy, affiche un pic de précipitation vers le mois de Janvier avec une moyenne de 379,4 mm.

La région Bongolava est caractérisée par la dominance des sols ferrallitiques moyennement dessaturés pour les zones de tanety avec un faible taux de couverture végétale. Cette situation est aussi valable pour la commune de Bevato.

Dans l’ensemble, les sols ferrallitiques sont des sols acides à texture variable, compacts et difficiles à travailler. Ils donnent en général un bon rendement pour les cultures pluviales sur tanety, mais la faible profondeur de l’horizon humifère nécessite obligatoirement l’apport d’engrais. Ce terroir de plateaux à forte dominance de graminée (Heteropogon contortus) subit systématiquement le passage des feux de brousse.

Sur les bas-fonds, les sols sont de type hydromorphes minéraux à moyennement organiques aptes à la riziculture inondée, puis aux diverses cultures de contre saison (légumineuses, cultures maraichères et fourragères).

Conduite de l’expérimentation

Choix des parcelles

L’expérimentation a été réalisée en milieu paysan durant la campagne culturale 2014-2015, auprès de 7 producteurs dans la commune rurale de Bevato. Les parcelles retenues ont dû répondre aux critères suivantes: (i) des parcelles situées sur les zones de tanety et (ii) ayant comme précédent cultural la culture de « Vigna subterranea », connu sous le nom de « voanjobory » en malgache. Ce type de culture est fréquemment pratiqué dans la région afin d’améliorer la fertilité des « tanety » après une longue durée de jachère.

Matériels végétaux

Deux variétés de riz pluvial ont été utilisées pour l’expérimentation : la variété Nerica 9 et la variété locale Jean Louis.
(i) La variété locale Jean Luis a été choisie pour sa bonne capacité de production, sa forte capacité de tallage et surtout sa tolérance au Striga qui est une mauvaise herbe très coriace envahissant la région Bongolava. Avec un cycle végétatif de 120 jours environ, elle est la variété la plus cultivée dans la région.
(ii) La variété NERICA (New Rice for Africa) a été développée par l’AfricaRice à travers le croisement du riz asiatique Oryza sativa avec le riz indigène d’Afrique Oryza glaberrima (ADRAO, 2002). Il s’agit d’une variété enrichie en fer et en zinc. Avec un rendement moyen de 4,1 t/ha, la Nerica 9 fourni le rendement le plus élevé parmi les variétés de riz pluvial Nerica cultivées dans la zone de Bevato (Marikindrianjafimpahizato A., 2014).

Traitements étudiés

Quatre types de traitement ont été utilisés pour la présente expérimentation. Ils correspondent à des doses croissantes de phosphore notées T0, T1, T2 et T3. Ce facteur comprend donc 4 modalités. A part les témoins T0 (sans apport d’engrais minéraux), les doses de N et de K restent constantes pour les autres parcelles. L’ensemble des parcelles ont reçu 5T/ha d’engrais organique. Les engrais utilisés se présentaient sous deux formes :
– Engrais minéraux : NPK 11 22 16, urée 46%, TSP 46% (Triple Super Phosphate), Sulfate de Potasse 50%
– Engrais Organique : fumier de ferme.

Dispositif expérimental

L’expérimentation consiste à l’étude de l’effet de l’engrais phosphaté en utilisant 2 variétés de riz pluvial. Ainsi, il s’agit d’une expérimentation à deux facteurs contrôlés: le facteur principal est l’engrais phosphaté et le facteur subsidiaire constitué par les deux variétés utilisées. Le dispositif adopté est de type « split-plot ».

Les dispositifs utilisés étaient en multi-locale, dispersés au niveau des 7 producteurs. Chaque dispositif était constitué par 3 blocs de 128 m² comportant chacun 8 parcelles élémentaires de 16 m²  . La surface totale d’un dispositif est donc de 384m². Afin d’éviter le transfert des éléments nutritifs, les parcelles ont été séparées les unes des autres par des canaux de drainage de 20 cm de largeur, et il en est de même pour les trois blocs.

Table des matières

INTRODUCTION
PARTIE I : MATERIELS ET METHODES
I-1- Présentation de la zone d’étude
I-1-1- Situation géographique
I-1-2- Climat
I-1-3- Sols
I-2- Conduite de l’expérimentation
I-2-1- Choix des parcelles
I-2-2- Matériels végétaux
I-2-3- Traitements étudiés
I-2-4-Dispositif expérimental
I-2-5- Conduite de culture
I-3- Analyses et mesures effectuées
I-3-1- Analyses en laboratoire: Analyse du sol
I-3-2- Mesures sur le terrain
I-3-3- Traitement des données
I-3-4- Analyses économiques
PARTIE II : RESULTATS ET INTERPRETATIONS
II-1- Résultats de l’analyse du sol
II-2- Effet du phosphore sur les composantes de rendement
II-2-1- Croissance en hauteur des talles
II-2-2- Tallage
II-2-2-1- Evolution du nombre de talles
II-2-2-2- Nombre de talles fertiles
II-2-3- Nombre de grains par panicule
II-2-4- Pourcentage des grains pleins
II-2-5- Poids des 1000 grains
II-3- Effet des engrais phosphatés sur le rendement
II-4- Analyse en composante principale (ACP) des éléments du rendement
II-5- Résultats sur le calcul économique
II-5-1- Consommation intermédiaire
II-5-1-1- Intrants agricoles
II-5-1-2- Coûts de la main d’œuvre
II-5-2- Produit brut
II-5-3- Valeur ajoutée brute
PARTIE III : DISCUSSIONS
III-1- Effet du phosphore sur les composantes de rendement
III-2- Réponse du riz pluvial aux engrais phosphatés
III-3- Effets combinés de la matière organique et de l’engrais phosphaté
III-4- Potentialité de la variété N9
PARTIE IV : LIMITES ET RECOMMANDATIONS
IV-1- Problèmes climatiques et phytosanitaires
IV-2- Problèmes de l’expérimentation en milieu paysan
CONCLUSION

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