Les sollicitations dans les chaussées bitumineuses
Les structures routières sont soumises aux diverses sollicitations, dont celles dues au trafic lourd et aux effets générés par les changements climatiques. Ces sollicitations sont des causes probables de plusieurs types de dégradation des chaussées. La rapidité de l’évolution des endommagements est liée aux propriétés et aux épaisseurs des matériaux utilisés et de leur mise en œuvre (LCPC, 1998). L’effet du trafic L’accroissement du nombre des véhicules qui empruntent les routes du Québec chaque année contribue fortement à l’accélération de mesures des dégradations des chaussées (Légaré, 2005). Sous l’effet des charges roulantes, chaque couche de la chaussée subit des flexions qui entrainent des contraintes de compression en haut de la couche et de traction à la base de la couche (Figure 1.2). Les tractions répétées à la base des couches d’enrobés créent des micros fissures qui s’accumulent et se propagent dans tout le revêtement et apparaissent en surface sous forme de fissurations importantes (Di Benedetto & Corté, 2005; M. L. Nguyen, 2009; Perret, 2003). Sollicitations thermiques Les conditions climatiques rigoureuses au Québec s’expliquent par une grande variation de température entre l’hiver et l’été allant de 60 à 70 degrés (Légaré, 2005). En raison du comportement thermosusceptible des matériaux bitumineux, ces variations thermiques peuvent engendrer la diminution de la rigidité de l’enrobé et entrainer des contraintes importantes dans les couches liées de la chaussée. Ces contraintes avec celles induites par le trafic pouvant entrainer le phénomène de fissuration thermique.
Le module complexe
Comme on a mentionné précédemment, le comportement des enrobés est fortement lié à la température et la fréquence de chargement, du fait de la composante visqueuse du comportement visqueux du liant bitumineux. On utilise l’essai de module complexe (E*) pour caractériser le comportement viscoélastique linéaire (VEL) des enrobés. L’essai consiste à soumettre, en conditions isothermes, une éprouvette d’enrobé à des sollicitations cycliques de forme sinusoïdale et de fréquences variées. L’essai peut être effectué en mode contrainte ou en mode déformation contrôlée et doit être réalisé à petites déformations où l’enrobé se comporte principalement comme un matériau viscoélastique linéaire (Di Benedetto & Corté, 2005). Il existe plusieurs essais pour déterminer le module complexe voire les essais de traction ou compression, directe ou indirecte, ainsi que les essais de flexion. L’essai de traction compression est le plus simple à exploiter pour déterminer le module complexe d’un enrobé étant donné que son mode de chargement est homogène (la contrainte est uniforme dans toute l’éprouvette) permet de calculer l’état de contrainte et de déformation directement dans l’axe de sollicitation (Doucet & Auger, 2010). La norme du module complexe |E*| correspond au rapport entre l’amplitude de la contrainte sinusoïdale et l’amplitude de la déformation sinusoïdale. Cette valeur est une approximation du module élastique d’un matériau viscoélastique, qui peut être utilisée pour le dimensionnement des chaussées lorsque les lois de l’élasticité sont employées. En outre, la réponse du matériau sous sollicitation est caractérisée par un angle de déphasage (φ) qui varie entre 0° pour un matériau purement élastique et 90° pour un matériau purement visqueux (Doucet & Auger, 2010). Plusieurs modèles de calcul rhéologique ont été développés permettant de calculer le module complexe sur une plage de température et de fréquence. Ces modèles utilisent la combinaison de ressorts (élément élastique) et d’amortissements linéaire et non linéaire (éléments visqueux newtoniens et autres) (Olard & Di Benedetto, 2003). De nombreuses expressions analytiques sont ainsi proposées comme les séries de Prony ou de Dirichlet. Ces dernières représentations se basent sur la décomposition exponentielle (M. L. Nguyen, 2009). Ces modèles sont présentés dans le chapitre 3 et 6.
Dégradations des chaussées bitumineuses
Les dégradations des chaussées se classent en deux grandes familles : les dégradations superficielles et les dégradations structurales. Les premières apparaissent dans le revêtement en lui affectant ses qualités superficielles alors que les dégradations structurales se manifestent au sein de la structure de la chaussée ou dans son sol support (LCPC, 1998). Les dégradations structurales les plus importantes et les plus préjudiciables pour la structure de la chaussée sont la fissuration et l’orniérage (SETRA, 1994; St-Laurent, 1995). En outre, l’analyse et le dimensionnement des chaussées se basent sur l’évaluation de ces dégradations (NCHRP, 2004). Fissuration par fatigue La fatigue est l’un des principaux modes de dégradation des chaussées bitumineuses. Ce mode d’endommagement conduit à l’apparition et la croissance des fissures engendrées par la répétition d’un grand nombre de sollicitations (Priest & Timm, 2006). En effet, le passage des véhicules provoque des contraintes et des déformations à la base de la couche bitumineuse. La répétition de ces efforts engendre l’apparition et la propagation des microfissures qui conduit à l’infiltration de l’eau dans les couches non liées et provoque une détérioration structurale. La déformation horizontale en traction à la base de la couche bitumineuse est utilisée pour évaluer la fissuration par fatigue du bas vers le haut (Figure 1.4) (Huang, 1993). Déformations permanentes (Orniérage) L’orniérage est l’un des principaux modes de dégradations des chaussées bitumineuses qui entraine des problèmes de sécurité et de confort au roulement. Lors du passage d’une charge, des efforts de compression et de cisaillement se manifestent dans les couches de la chaussée (Figure 1.5). Ces efforts créent des déformations permanentes qui s’accumulent et entrainent l’orniérage à la surface de la chaussée. Ce phénomène s’observe, généralement sur les chaussées à fort trafic, sous forme d’une trace permanente sur les pistes des roues.
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