La pratique d’un sport d’équipe implique de nombreuses situations de double tâche : contrôle moteur d’un côté et stimulations visuelles de l’autre. À tout instant, un joueur (de soccer par exemple) doit connaître sa position, celle de ses coéquipiers et celle de ses adversaires, la vitesse de déplacement des joueurs, du ballon, etc. Cela implique une utilisation soutenue de la cognition, de l’attention de l’athlète (Faubert et Sidebottom, 2012) .
» Figure 1.1 Éléments clés pour un gardien de but en relation avec la charge cognitive. Tirée de Faubert et Sidebottom (2012). »
Dans la situation de jeu illustrée dans la Figure 1.1, le gardien doit être en capacité d’anticiper certaines actions de ses coéquipiers et adversaires. D’autres mouvements seront difficiles à anticiper, car le gardien n’est pas en capacité de voir tous les joueurs (occlusions visuelles par d’autres joueurs) (Keane et al, 2006; Zelinsky et al, 2010). La meilleure façon d’augmenter les performances du gardien dans ce cas serait de l’entrainer à réagir en situation de jeu. Une charge cognitive importante peut souvent être suivie d’une prise de décision, par exemple lorsqu’un gardien de soccer doit décider d’attraper le ballon tiré en corner ou le laisser à ses défenseurs.
Les joueurs suivent des entrainements physiques dédiés (entraînements de tirs, de passes, de vitesse, d’endurance) mais la fonction cognitive n’est habituellement pas entraînée. La littérature fait apparaître que sur la totalité d’un match, les joueurs de soccer disposent en moyenne du ballon pour une durée de 50 secondes (Carling, 2010) et ce, composé de plusieurs possessions de quelques secondes. C’est donc dire que les athlètes, bien qu’ils jouent des parties compétitives de même que des parties simulées à une fréquence élevée, ne s’entraine que très peu dans cette situation de double tâche. Aussi, les entraînements de la fonction cognitive n’étant pas intégrés aux entraînements, ces courtes possessions du ballons sont les seules pendant lesquelles la performance cognitive et la performance motrice cohabitent simultanément, d’où l’intérêt de procéder à des entraînements de la fonction cognitive en amont des matchs. Le problème pour entraîner la fonction cognitive est qu’il est difficile de récréer une situation de jeu où l’athlète peut s’entrainer à la tâche cognitive que représente une partie pendant une période suffisamment longue pour mener à un entrainement. Il est ressorti de la littérature que le 3D-MOT (Multiple Object Tracking en 3D) était déjà utilisé pour simuler cette tâche cognitive (Faubert et Sidebottom, 2012).
3D-MOT
(Pylyshyn et Storm, 1988) font partie des pionniers dans l’étude du phénomène de suivi de cibles (3D-MOT). Leur objectif était de déterminer la capacité d’une personne à suivre plusieurs objets de façon simultanée. Dans cette étude, les participants ont dû suivre de 1 à 5 objets parmi un total de 10, et ont dû les nommer lorsqu’ils étaient identifiés d’une autre couleur. Il a été possible pour les participants de suivre un maximum de 5 objets, le taux d’erreur et le temps de réponse augmentaient en lien avec le nombre de cibles à suivre. D’autres études ont montré qu’il était possible de suivre 4 ou 5 cibles et que le suivi dépendait de certains facteurs tels que l’âge (plus la personne est âgée, plus il est plus difficile pour une personne âgée de performer autant qu’un jeune adulte dans un exercice de 3D-MOT), la condition et la vitesse (Fougnie et al, 2006; Alvarez et al, 2007; Kennedy et al, 2009; Sekuler et al, 2008).
La tâche de 3D-MOT permet une répartition de l’attention sur un nombre d’éléments dynamiques séparés. Un champ visuel est étendu lors du 3D-MOT : la plupart des stimulations visuelles pour un athlète en situation de jeu se déroulent en périphérie du champ visuel. Il est donc primordial de forcer l’athlète à utiliser son champ visuel périphérique lors du suivi de cible en offrant un champ visuel suffisamment important (Knudson et al, 1997). Plutôt que d’étudier les conséquences de l’augmentation du nombre de cibles à suivre, le nombre de cible sera fixé. La vitesse de déplacement pourra être modulée afin d’obtenir la vitesse de suivi. L’utilisation d’un environnement 3D permet d’intégrer une notion de profondeur à la scène de 3D-MOT, chose impossible en 2D. Il est plus aisé de suivre des cibles dans un environnement en 3D (Faubert et Allard, 2013), notamment car il est plus simple de les distinguer lorsque celles-ci se croisent ou entrent collision. La stéréoscopie permet aussi de mieux assimiler les intéractions rapides entre les cibles (Intriligator et al, 2001), à savoir déterminer quelle cible est devant l’autre notamment en cas d’occlusion. L’environnement créé offre donc un réalisme plus poussé et plus proche de la situation de jeu, ce qui est pertinent (Bideau et al, 2010).
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