Émotions
Définitions
Le terme émotion vient du verbe émouvoir. Jusqu’au XVIIe siècle, émouvoir signifiait « mettre en mouvement ». Cela vient du latin populaire exmovére ou du latin classique émovére, movére signifiant le « mouvement » et ex « dehors ». (Bloch & Wartburg, 2002, p. 219). Ainsi, les dictionnaires du XVIIe et du XVIIIe siècle comparent les émotions à des « mouvements de l’âme ». Cela pourrait être interprété comme quelque chose qui vient de soi et qui s’exprime à l’extérieur. Dans le dictionnaire Le Robert, l’émotion est définie de différentes manières. Premièrement, comme un mouvement, une agitation d’un corps pouvant se pervertir en trouble. Deuxièmement, comme un état de conscience complexe qui arrive brusquement et sur une courte durée. Cet état de conscience peut être accompagné de troubles physiologiques. Ce terme est lié à celui de la sensation considérée d’un point de vue affectif (Rey, 2014, p.851).
Platon (428-348 av. J.-C.) est sans le doute le premier penseur dont les écrits conservés offrent une étude des processus émotionnels. Sa perspective des émotions est plutôt négative car, selon lui, ces dernières empêchent l’individu de raisonner de manière correcte et approfondie. Cette vision peut être comparée à une conception naïve de l’émotion, qui est cependant toujours présente dans notre société, suivant laquelle nos émotions ne devraient pas être exprimées, mais contrôlées et refoulées (Luminet, 2008).
Par la suite, divers penseurs, chercheurs ou scientifiques se sont essayés à définir les émotions. Ainsi, il existe plus d’une centaine de définitions de terme, ce qui montre bien toute la complexité de ce dernier. Cependant, des chercheurs comme Kleinginna et Kleinginna se sont amusés à analyser et répertorier 92 définitions, en montrant qu’elles ont peu de points communs et que la plupart d’entre elles sont trop vagues. Après cette analyse assez poussée, ces chercheurs ont créé leur propre définition de l’émotion et comme celle-ci est plus complète que la majorité des définitions que nous avons trouvé, nous allons nous baser sur cette dernière. Selon eux, les émotions sont le résultat de l’interaction entre des facteurs subjectifs et objectifs. Ces facteurs prennent source dans les systèmes neuronaux ou endocriniens. Ils induisent des expériences de plaisir ou de contrariété, produisent des processus cognitifs, demandent des ajustements physiologiques et finalement déclenchent des comportements expressifs ayant pour but l’adaptation de l’individu. Nous pouvons noter, à travers cette définition, la présence de trois composantes dominantes : la composante comportementale, physiologique et cognitive/subjective (Kleinginna & Kleinginna, 1981).
Développement des émotions
Selon Lehalle et Mellier (2013), l’étude du développement émotionnel porte sur trois aspects qui se complètent : l’expression, la compréhension et la régulation des émotions.
Les émotions du bébé provoquent généralement des réactions chez les adultes et les pairs. Ces réponses de l’entourage peuvent modifier l’évaluation que se fait l’enfant de la situation et changer la nature de l’émotion qu’il éprouve. Nous pouvons donc dire que l’entourage de l’enfant contribue à sa régulation émotionnelle (Lehalle & Mellier, 2013).
Il est considéré qu’un enfant de moins de 4-5 ans ne saurait pas déguiser son expression et que cette dernière reflèterait son état émotionnel (Lehalle & Mellier, 2013). Ce n’est qu’à partir de six ou sept ans que l’enfant commence à percevoir la distinction entre la réalité d’une émotion et son apparence même s’il est capable de simuler ou de dissimuler une émotion bien plus tôt. Nous pouvons remarquer cela lorsqu’un enfant reçoit un cadeau qui ne lui plait pas et pourtant sourit pour cacher son désenchantement (Lafortune, Doudin, Pons & Dawson, 2004).
Grâce au développement du lexique émotionnel, entre 2 et 6 ans, l’enfant est capable de décrire ses propres expériences émotionnelles, mais aussi d’expliciter celles des autres et de comprendre que ces expériences peuvent être différentes. Des recherches anglophones menées par Bretherton, Fritz, Zahn-Waxler et Ridgeway en 1986 démontrent que la désignation des émotions positives se fait avant celle des émotions négatives. Dés 4-5 ans, les enfants savent reconnaître et nommer les expressions de joie, de colère, de tristesse ou des expressions neutres. Cependant, ce n’est qu’à 6-8 ans qu’ils pourront nommer des émotions plus complexes comme le dégoût ou la honte (Brun, 2001).
En définitive, il est difficile de définir un développement émotionnel strict et applicable à tous les individus en fonction de leur âge car, l’évolution psychologique se construit en fonction des expériences de chacun. Cependant, cette dernière respecte généralement les aspects suivants : la différenciation de nos émotions et celles des autres, la construction d’un lexique représentatif et adapté, la prise en compte des émotions d’autrui, le contrôle de ses propres expressions et l’utilisation de stratégies de régulation comme le coping (Lehalle & Mellier, 2013). Les stratégies de régulations seront expliquées au chapitre 5 de ce travail.
1 INTRODUCTION |