Pratiques pédagogiques : Radio C.Ly.p.e, une radio scolaire à Paris
Radio C.Ly.p.e, la radio des Collèges des Lycées et des Ecoles de Paris (et de la proche banlieue), diffuse chaque semaine une heure d’ émission produite par les élèves de l’Académie sur une fréquence de radio associative, depuis le mois de janvier 2004.
Dotée d’un studio pédagogique et de matériels mobiles en prêt, l’équipe de Radio C.Ly.p.e propose à tous les enseignants qui le désirent de travailler avec leurs élèves sur des programmes de radio scolaire. Documentaliste à mi-temps dans un lycée professionnel, je suis la coordinatrice (à mi-temps également) depuis le mois de septembre 2003 de cette radio inter-établissement dont j’ai conçu la trame, en 2001, au sein de l’académie de Paris. Avec moi, maillon indispensable au fonctionnement de ce travail, un assistant d’éducation, ingénieur du son à plein temps, accompagne les productions, de la conception à la réalisation, sur le plan technique (indissociable en réalité du plan pédagogique). Une trentaine de projets par an environ ont été diffusés sur les ondes. De la maternelle au lycée en passant par le collège, le lycée professionnel , des classes d’enfants déficients visuels, de psychotiques, des classes d’accueil, les productions ont été riches en diversité. IDD (itinéraire de découverte en collège), TPE (travaux personnels encadrés en lycée), lecture de textes écrits par des élèves, reportages sur les sujets les plus divers, tous les prétextes sont bons pour aboutir à un travail à la fois bien documenté, scrupuleusement écrit et enfin partagé au micro avec les auditeurs.
Un peu d’histoire
Le montage du projet a pris trois années pleines et fut titanesque. Il a vu le jour à l’issue d’un stage radio au Clemi (centre de liaison de l’enseignement et des moyens d’information) et tel Don Quichotte, je suis partie à la conquête de l’institution qu’il fallait convaincre et impliquer concrètement (locaux, budget d’installation du studio et de fonctionnement, convention avec une radio diffuseur, décharge horaire, suivi pédagogique). Il m’a fallu tenir bon et beaucoup œuvrer pour trouver les bons interlocuteurs. Souvent très intéressés par le projet, ils se « défilaient » au moment de l’action. Mais un chef d’établissement enthousiaste m’a ouvert les portes d’une ancienne cuisine en sous- sol, la région Ile- de- France a financé la rénovation (très sommaire) des locaux et l’achat d’un matériel professionnel, le CRDP de Paris, le Clemi, la mission Innovation de l’Académie de Paris et la Région, dans le cadre de dossiers « Projets Lycées », ont apporté des aides diverses pour le fonctionnement. J’ai ensuite « bataillé » pour obtenir une décharge horaire et faire tourner la « machine » dans de bonnes conditions, quelques heures » sous le manteau » les premières années et un mi-temps depuis 2003 ! Puis la nomination conjointe d’un assistant d’éducation technicien du son, perle rare mais dénichée au sortir de son école de formation !
Aujourd’hui, nous ne suffisons plus au développement du projet mais il est impossible d’obtenir davantage. Je continue de « couvrir » deux mi-temps dont l’un absorbe jours libres et soirées sans que nul ne s’en émeuve vraiment. Ceci dit, non rien de rien, je ne regrette rien, parce que la satisfaction des utilisateurs, élèves et enseignants, me confirme chaque jour le bien fondé de la démarche.
Comment ça se passe ?
Les enseignants et leurs élèves sont totalement libres du choix des sujets et de la façon dont ils souhaitent les traiter. Une ou plusieurs rencontres sont nécessaires pour élaborer un plan de travail et les charges qui incombent aux uns et aux autres. Certains voudront aller jusqu’au montage, d’autres souhaiteront enregistrer leur émission dans les conditions du direct au studio, d’autres choisiront un enregistrement dans la classe. Certains auront besoin d’un accompagnement « serré », d’autres au contraire concocteront leur production seuls jusqu’à l’enregistrement.
Dans tous les cas, le moment de l’enregistrement constitue un point fort du travail. Mettre le casque sur les oreilles, entendre la voix du technicien du son qui donne le départ et les premiers mots au micro suscitent parfois beaucoup d’émotion et toujours du plaisir. A la fois réalisation et évaluation des efforts fournis, l’audition de l’émission en direct est un autre grand moment. Deux jalons qui permettent aux élèves de mesurer les qualités et les défauts de leur travail et, à chaque fois, de se sentir valorisés parce qu’ils partagent un savoir, un savoir faire, un plaisir avec des auditeurs inconnus mais aussi avec leurs pairs et leurs familles. Ces derniers auditeurs, la famille et les pairs comptent beaucoup pour les producteurs. Je me souviens d’un grand élève dédicaçant le poème qu’il allait lire à sa mère ou d’un autre évoquant la fierté qu’il aurait de faire entendre l’émission à ses futurs enfants !Enfin, la possibilité qu’offre notre site internet de communiquer potentiellement avec la monde entier donne une perspective enrichissante aux productions. Des classes américaines, une en CM2 et l’autre en 1ere S ont d’ailleurs pris contact avec nous et ont réalisé une émission dans nos locaux lors de leur voyage scolaire à Paris. Plusieurs projets sont à l’étude pour créer des programmes avec des classes européennes. Projet « défi » pédagogique et technique pour notre radio.
Les émissions produites par les divers établissements s’inscrivent dans un programme d’une heure présenté par un animateur élève et diffusé sur une fréquence associative de la bande FM. Les premières années sur FPP 106.3 et depuis cette rentrée 2006, pour davantage de cohérence de propos, sur la radio étudiante Radio Campus 93.9. Les émissions sont ensuite disponibles sur notre site internet ( http://radio-clype.scola.ac-paris.fr/)
L’école et les médias dans Vie pédagogique
« L’école serait immobile alors que l’aspiration à la mobilité, elle, serait partagée par presque tous ses usagers. « L’ouvrir, l’aérer, faire circuler en son sein les souffles extérieurs, tel est aujourd’hui ce qui lui manque le plus. » L’école est-elle encore vraiment immobile aujourd’hui? Le renouveau pédagogique, dont l’implantation est amorcée depuis 2000 dans les écoles québécoises, apporte un vent de changement important. Les médias, dont les TIC, sont en train de transformer la manière dont nos élèves socialisent, apprennent et participent à la société, et, lentement, le milieu scolaire prend de plus en plus conscience de l’importance de tenir compte de cette dimension dans son souci de former des citoyens libres, autonomes et responsables ». Dans le nouveau numéro de « Vie pédagogique », une revue pédagogique québécoise, Marie-France Laberge évoque la révolution médiatique qui secoue le monde et particulièrement l’Ecole.
C’est qu’au Québec un enfant de sept ans sur trois surfe déjà sur Internet et la moitié utilisent des jeux vidéo. Pour MF. Laberge, « impossible de conclure sans insister sur l’importance pour les formateurs de sensibiliser les jeunes aux nombreuses questions éthiques liées aux médias. La communication, sous toutes ses formes, doit toujours s’inspirer du critère éthique du respect de la vérité et de la dignité de la personne humaine. Un encadrement favorisant la responsabilisation et le développement d’attitudes citoyennes est un incontournable dans le monde scolaire. Quand l’identité de chacun est cachée derrière un masque, quand le copier coller devient presque la règle, quand la prise de parole en public fait partie du quotidien ou quand la protection de la vie privée est devenue une question inquiétante, les nouveaux médias posent des problèmes éthiques nouveaux. Sommes-nous vraiment en train d’accompagner les jeunes à leur faire face?
Et pourtant ils peuvent justement permettre cette éducation. C’est le point de vue de Mario Asselin qui voit dans les blogues « de puissants outils pour apprendre »: » Qu’ils soient des portfolios électroniques d’apprentissage ou de simples outils de publication, il y a fort à parier que les blogues joueront un rôle important parmi les outils modernes et efficaces sur lesquels pourront compter les enseignants et les directions d’école dans leur mission de faire apprendre, durant cette ère de nouvelles technologies et de nouveaux médias ».