Le glaucome chronique à angle ouvert (GCAO) est une neuropathie optique antérieure, chronique et progressive, généralement bilatérale mais souvent asymétrique caractérisée par l’association d’une excavation pathologique du disque optique, d’une altération du champ visuel, d’un angle irido-cornéen (AIC) ouvert et souvent d’une hypertonie oculaire.
Le GCAO est un problème majeur et grave de santé publique. Sa gravité réside en sa fréquence et aussi en sa méconnaissance. C’est la première cause de cécité irréversible dans les pays développés ; il représente 14,3 % des causes de cécité bilatérale selon les résultats d’une étude réalisée à Casablanca sur la prévalence de la cécité réalisée en 1992(1).
A la fin du deuxième millénaire, le nombre de glaucomateux était estimé à 66 millions (7 millions parmi les Africains) dont 7 millions d’aveugles (2).
Ces dernières années, des progrès considérables ont été accomplis dans le domaine du dépistage et du suivi des glaucomateux.
Cette affection pose un double problème, diagnostic et thérapeutique car la plupart des malades consultent tard et peu de patients adhèrent au traitement médical prescrit.
Actuellement, des innovations importantes sont apportées par le laser SLT (Selective Laser Trabeculoplasty) et la chirurgie ( chirurgie non perforante associée aux antimétabolites).
La prise en charge du GCAO repose donc en premier sur le dépistage avant l’apparition des signes cliniques, le traitement adéquat bien codifié et le suivi au long court.
Prévalence du glaucome chronique à angle ouvert
L’épidémiologie descriptive et analytique des glaucomes chroniques est la base indispensable d’un dépistage efficace. Elle est relativement mal connue. L’incidence du glaucome chronique est difficilement mesurée à cause de son évolution longtemps asymptomatique.
Quant à la prévalence, elle n’est qu’imparfaitement appréhendée dans la mesure où les études épidémiologiques butent sur l’obstacle de la sélection de l’échantillonnage ou sur celui de la définition de la maladie au sens épidémiologique, qui n’est pas parfaitement claire.
La prévalence de la maladie, si l’on adopte une définition plus restrictive, c’est à dire l’altération progressive du disque optique et/ou du champ visuel, non expliquée par une autre cause, avec ou sans hypertonie oculaire est relativement faible dans une population européenne (de l’ordre de 1% au delà de 40 ans). Cette prévalence augmente avec l’âge (2).
Facteurs génétiques
La présence d’antécédents familiaux de glaucome est considérée comme un facteur de risque non négligeable dans la survenue de la maladie (36,37). Plusieurs études estiment que près de 20 à 50% des cas des glaucomes sont marqués par la présence d’un facteur héréditaire (38,39).
Pour le GCAO, cette notion d’hérédité a été retrouvée dans 24,5% des cas selon l’étude de BUDDE et JONAS (40).
Récemment, il a été prouvé que la mutation du gène GLC1A est souvent liée à certaines formes de glaucome (36).
Globalement, on estime que 13% à 50% des glaucomes chroniques à angle ouvert sont héréditaires (39).
ANGIUS a identifié la défaillance moléculaire GIn 368 stop chez 19 patients atteints de GCAO, la mutation du gène GIn 368 stop myociline devrait être étudiée dans tous les cas familiaux de GCAO(41).
Chirurgie
En raison des progrès majeurs réalisés dans le traitement médical du glaucome primitif à angle ouvert, la chirurgie filtrante est en général réservée aux formes graves et aux échecs des autres traitements antiglaucomateux. La chirurgie expose en effet à des risques de complications (infection, hypotonie oculaire, cataracte…), per ou postopératoires et n’est pas dénuée d’échecs. Toutefois, la chirurgie, lorsqu’elle est efficace à long terme, règle définitivement deux problèmes spécifiques du traitement médical, l’observance et la tolérance aux collyres. En outre, elle a bénéficié ces dernières années de l’apport d’une nouvelle technique, la sclérectomie profonde non perforante, et qui est en fait une véritable trabéculectomie externe, visant à éliminer la zone de résistance maximale à l’évacuation de l’humeur aqueuse. Cette chirurgie expose à un risque de complications très inférieur à celui de la trabéculectomie classique, mais son efficacité à long terme reste mal connue. Quelle que soit la technique choisie, des antimitotiques peuvent limiter le risque de fibrose post-opératoire.
C’est pourquoi, entre un acharnement médical à outrance et une chirurgie précoce systématique, le choix thérapeutique doit désormais se porter sur l’heure optimale pour la chirurgie du glaucome (83, 20, 88).
Résumé prévalence du glaucome chronique
Le glaucome constitue un problème grave et préoccupant de la santé publique. Il représente une cause majeure de cécité dans notre pays, Le but de notre travail est d’analyser le profil épidémiologique de cette affection.
C’est une étude prospective étalée sur un an entre Mars 2006 et Mars 2007. Portant sur 45 cas. Les variables étudiées étaient les données sociodémographiques clinique para clinique thérapeutique et évolutive.
La prévalence du GCAO dans notre série est de 2,03%, La moyenne d’âge de nos patients était de 62 ans (25 – 99 ans). Le sex-ratio était de 1,7. Comme facteurs de risque, on note le diabète dans 13% des cas, l’hypertension artérielle clinique dans 31% des cas, la myopie dans 2,2% des cas. 78% des patients étaient aveugles ou malvoyants dès la première consultation.
L’examen du fond d’œil a montré une excavation papillaire pathologique dans 73,3% des cas.
Notre prise en charge a consisté en un traitement médical ayant comme but la normalisation du tonus oculaire. Ainsi 69% ont été déjà mis sous monothérapie, 28% sous bithérapie et 3% sous trithérapie.
A la lumière de ces résultats et devant le caractère asymptomatique mais cécitant a long terme et en l’absence d’une conduite thérapeutique codifiée, les auteurs insistent sur la nécessité du dépistage précoce par la mesure du tonus oculaire chez tout consultant dépassant 40 ans surtout en présence d’un facteur de risque et de développer la consultation ambulatoire d’ophtalmologie pour toucher une frange importante de la population en milieu rural.
L’accumulation des données épidémiologiques et une meilleure connaissance de la maladie devraient nous permettre de nous situer davantage en amont, avec moins d’incertitudes et une plus grande capacité à prédire et limiter l’évolutivité attendue pour un patient donné (programme national de lutte contre le glaucome).