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Cas du vieillissement dans l’eau
Des films de PE ont été immergés dans l’eau saumâtre à 20, 40, 60 et 80°C pendant 316 jours. Des échantillons ont été régulièrement prélevés et analysés par spectroscopies IR et UV ainsi que par DSC. Les résultats obtenus sont présentés et discutés dans les paragraphes qui suivent.
Suivi par spectroscopie infrarouge : Les analyses IR, réalisés sur des films de PE, ont montré une diminution de l’absorbance à 1740 cm-1 attribuée aux groupements ester du PE (Figure 79). Ces fonctions étant thermiquement stables [21] mais sensibles à l’hydrolyse [23], nous pouvons imputer ces variations à la combinaison des pertes physiques, liées à l’extraction par l’eau, et de pertes chimiques par hydrolyse. D’après Bertholdo et Ciardelli [23], l’hydrolyse Du film PE concernerait essentiellement les fonctions ester et entraînerait la formation d’acides (III) et d’alcools (II). Le schéma de réaction proposé par ces auteurs est résumé sur la Figure 80.
Figure 79 : Evolution des spectres IR d’un film PE au cours du vieillissement à 80°C dans l’eau.
Figure 80 : Schéma d’hydrolyse des fonctions ester Du film PE [23].
Cependant les spectres IR des films de PE ne révèlent pas l’apparition de pics d’absorbance relatifs aux acides ou aux alcools au cours du vieillissement dans l’eau. Nous en concluons donc que l’hydrolyse des esters peut être négligée dans notre étude et ainsi, que les pertes observées par spectroscopie IR correspondraient uniquement à l’extraction d’antioxydants par l’eau.
Comme dans le cas des vieillissements thermiques dans l’air, les pertes par extraction dans l’eau seront explicitées par la suite après avoir quantifié les pertes en antioxydants causées par la consommation chimique.
La cinétique d’extraction des antioxydants dans l’eau serait d’ordre 1. Pour vérifier cette hypothèse, l’évolution du logarithme de la concentration en antioxydants a été tracée en fonction de la durée d’exposition à des températures de 20, 40, 60 et 80°C (Figure 81).
Figure 81 : Droite d’Arrhénius de l’absorbance des esters en fonction du temps d’exposition à 20 ; 40 ; 60 et 80°C dans l’eau.
Nous constatons que ces évolutions sont linéaires avec le temps et donc nous pouvons écrire : LnAH −βeau ⋅ t LnAH 0 (9) Où βeau est le coefficient d’extraction du film PE par l’eau, égal à la pente de la droite d’étalonnage.
Tableau 4.15 : Récapitulatif des coefficients d’extraction du film PE par l’eau entre 20 et 80°C.
Ainsi, le mécanisme de perte par extraction du PE serait thermiquement activé, avec une l’énergie d’activation E voisine de 27 kJ/mol.
Suivi par spectroscopie UV : Après avoir étudié les pertes par extraction, nous allons essayer de quantifier les pertes liées aux réactions chimiques par spectroscopie UV. Les spectres obtenus sur les échantillons de films vieillis dans de l’eau saumâtre, jusqu’à 83 jours, à 80°C sont présentés sur la Figure 88. Il apparaît une diminution de l’absorbance à 280 nm, attribuée aux fonctions phénol [24], et une importante augmentation d’un massif centré à 314 nm, attribué à la formation de quinones [25].
Figure 83 : Evolution des spectres UV de PE au cours du vieillissement à 80°C dans l’eau
Globalement, le massif d’absorption, attribué aux quinones, augmente au cours du vieillissement à 80°C dans l’eau (Figure 83), alors que ce même massif semblait diminuer dans le cas du vieillissement à 80°C dans l’air (Figure 76). Les quinones devraient présenter une solubilité encore plus faible du fait qu’elles ne possèdent pas de fonction polaire. Partant de cette hypothèse, la rapide saturation en quinones dans l’eau (31 ml) pourrait expliquer le fait que ces espèces s’accumulent dans le polyéthylène lors du vieillissement dans l’eau. Par contre, au cours du vieillissement dans l’air en étuve ventilée, les quinones peuvent s’évaporer sans jamais atteindre la limite de pression de vapeur saturante. Outre le massif centré à 314 nm, l’immersion dans l’eau de films de PE fait apparaître une diminution de l’absorbance à 280 nm. Comme explicité précédemment, cette perte en absorbance peut être corrélée avec les pertes physiques (par extraction) et les pertes chimiques (réactions des phénols avec les radicaux peroxyles issus de l’oxydation du polymère).
Nous pouvons à présent comparer les résultats obtenus au moyen des différentes techniques de caractérisation afin de quantifier les pertes liées spécifiquement aux réactions chimiques.
Comparaison des résultats obtenus par les différentes techniques de caractérisation : Comme pour le vieillissement dans l’air, les différentes techniques de caractérisation utilisées, pour suivre l’évolution de la concentration des antioxydants nous donnent accès à des informations complémentaires. En effet, l’évolution de la concentration en esters a été suivie par spectroscopie IR. Ces derniers étant thermiquement stables [21], leur consommation se résume à une perte physique par extraction dans l’eau. Les analyses par spectroscopie UV et les mesures de TIO par DSC, quant à elles, fournissent des informations sur l’évolution de la concentration de l’espèce antioxydante active (phénols), et donc à la fois sur les pertes par extraction et par consommation chimique.
Figure 84 : Evolution schématique de la concentration en antioxydants dissous dans la phase amorphe [AH]d et antioxydants oxydés après réaction avec les radicaux peroxyles [AH]ox et de la concentration totale [AH]t au cours du vieillissement dans l’eau.
Après avoir dissocié la contribution les pertes physiques (évaporation) de celle liée aux pertes chimiques (réaction avec les radicaux peroxyles), nous sommes en mesure d’apporter des précisions concernant l’évolution globale de la concentration en antioxydant phénolique. Les pertes globales peuvent être décrites à l’aide de deux régimes cinétiques distincts (figure 84) :
Un premier régime, compris entre 0 et t, au cours duquel la vitesse de consommation chimique des antioxydants resterait très faible. Ainsi, la diminution quasi-exponentielle de la concentration globale du film PE serait uniquement attribuée à l’évaporation des antioxydants dissous dans la phase amorphe du polymère. Ceci supposerait que l’antioxydant ne soit pas dissous totalement dans la matrice polymère et se trouve aussi sous forme de nodules. Ces nodules pourraient se présenter à l’état cristallin. Ainsi, la vitesse d’évaporation des molécules d’antioxydants dissous dans la phase amorphe pourrait apparaitre plus rapide que la dissolution des nodules et laisserait supposer qu’au bout d’un temps t1, la quantité d’antioxydants dissous atteindrait des valeurs très faibles.