Aspect théorique : Champ de force dépendant du temps
Considérations générales
La dynamique d’un système polyatomique en interaction avec un champ laser intense dans le régime quasi-statique est régie par le champ de force induit instantanément par le laser. Il s’agit de la généralisation des courbes d’énergie potentielle de la figure 2.3 pour H2+, en particulier de celle de l’état fondamental, (R; t), dont les fluctuations dans le temps sont essentielles au mécanisme DDQ. Rappelons que ces courbes d’énergie potentielle étaient obtenues en diagonalisant la matrice en chaque R et à chaque temps t donné. Cette matrice représente l’Hamiltonien électronique de H2+ limité à la base des deux états g et u (les deux premières orbitales du cation), dits états de résonance de charge. Dans le cas d’une molécule générale à plusieurs électrons, on doit, de la même façon, diagonaliser l’Hamiltonien électronique instantané, tel que défini par l’interaction des électrons avec le champ, et calculer l’énergie électronique du système, du moins pour son état fondamental, à toutes les géométries nucléaires couvertes par la dynamique multidimensionelle, et ce, à toutes les valeurs du champ laser nécessaires pour bien le représenter dans une discrétisation de la dimension temporelle. C’est donc le problème de décrire la structure électronique de la molécule dans le champ instantané, définie par l’équation aux valeurs propres
Notons que le champ électrique du laser est ici désigné F plutôt que E, comme E est réservé pour désigner une énergie (valeur propre d’un Hamiltonien).
Dans la résolution de ce problème, de la description des champs de forces dynamiques, on distingue, au niveau conceptuel et au niveau calculatoire, deux approches :
La première est de considérer directement la construction, soit comme un seul déterminant de Slater (au niveau SCF-HF), ou une combinaisons de telles fonctions, (à des niveaux dits post- SCF), de la fonction d’onde à N électrons el ~ I (f~rigjfR g; t) à partir d’orbitales moléculaires dépendantes du temps, définies par Au niveau calculatoire, il s’agit d’inclure le champ électrique du laser comme un champ statique dans les calculs quanto-chimiques, ce qui est possible au sein de tout logiciel de calcul de structure électronique. Au niveau de chaque électron, inclure le champ comme un champ électrique statique a pour effet de déformer le potentiel d’attraction Coulombienne comme illustré à la figure 1.2 présentée dans l’introduction. Cette déformation implique celle des orbitales moléculaires, (OM), que l’on peut comprendre en faisant appel au principe gouvernant le développement, dit LCAO (pour Linear Combination of Atomic Orbital, CLOA en français), de celles-ci sur les orbitales atomiques (AO), en tenant compte du déplacement des puits de potentiel atomiques par l’interaction de l’électron avec le champ électrique. Ce schéma LCAO modifié par le champ sera revu à la section suivante.
Cette approche directe a donc le mérite d’être fort intuitive, car elle procède en parallèle avec cette image LCAO adaptée à une molécule forcée par un champ.
L’autre approche que l’on peut envisager pour décrire le champ de force dynamique consistera à considérer ce dernier comme le résultat de la diagonalisation du couplage radiatif entre les états stationnaires du système à N électrons (en l’absence du champ), c.à.d. les états propres de l’Hamiltonien sans champ ^ 0 de eq.(2.4), supposés connus. Dans la version calculatoire de Hel cette vision, on devrait effectuer des calculs quanto-chimiques d’un haut niveau, de préférence des calculs post-SCF, comme les calculs CI, MCSCF, utilisant une base étendue satisfaisante, pour la molécule sans champ, engendrant ainsi plusieurs états excités ainsi que l’état fondamental sur une grille spatiale multidimensionnelle suffisamment grande. On obtiendra alors les surfaces d’énergie potentielle ( f~ g ) pour les états calculés de la molécule sans champ, EI(R ) les orbitales moléculaires, la composition des états moléculaires, etc. L’inclusion subséquente du champ introduira des couplages entre ces états, et on devra rediagonaliser la matrice Hamiltonienne une fois ces couplages inclus.
L’avantage de cette technique, tout à fait traditionnelle, est triple :
1. Les calculs quanto-chimiques nécessaires à chaque géométrie nucléaire n’ont à être conduits qu’une seule fois, soit à champ nul ;
2. le champ peut être inclut avec n’importe quelle orientation et polarisation relative à la molécule ;
3. le nombre d’états électroniques générés permet des calculs dynamiques sur plusieurs canaux (ou voies) dynamiques, c.à d. dépendant(es) paramétriquement du temps.
Par contre, cette méthode souffre du fait que les surfaces d’énergie potentielle ainsi générées ne sont pas analysables directement en terme de la modification des orbitales moléculaires par le champ. Aussi, dans la mesure où l’on s’intéresse à la synchronisation du mouvement de paquets d’ondes (multidimensionelles) sur la surface d’énergie potentielle de l’état fondamental dans le schéma quasi-statique, ou encore dans l’approximation d’évolution adiabatique[78], cette deuxième approche est moins efficace car elle demande le calcul d’états excités sans champ, calcul qui nécessite des méthodes de calcul quanto-chimiques de haut niveau.