Reins
L’organisation structurelle du rein aux trois stades est semblable, puisqu’il s’agit dans tous les cas d’un assemblage d’unités fonctionnelles microscopiques : les néphrons . Chaque néphron est constitué d’un glomérule vasculaire et d’un tube à trajet contourné, dont l’origine forme un cul-de sac au contact du glomérule qu’il encapsule. Le glomérule effectue la filtration des constituants du plasma par passage en son sein d’une artère provenant de l’aorte, et le liquide qui résulte de cette filtration et évacué par le tube contourné, dans lequel des échanges d’ions et minéraux ont lieu pour donner l’urine. Les fonctions du néphron sont ainsi la filtration sélective du plasma, la réabsorption et l’évacuation des déchets.
Au cours du développement embryonnaire, le néphron se développe et évolue d’une structure primitive vers une structure hautement complexe, comme cela a été constaté à l’échelle de l’évolution des espèces. Les tubes néphriques des vertébrés montrent une complexité accrue, à mesure que ceux produits en région cervicale sont progressivement remplacés en région thoraco-lombaire puis sacrale par des structures plus compétentes fonctionnellement. Ces trois structures successives sont nommées respectivement le pronéphros, le mésonéphros et le métanéphros. Alors que les structures les plus caudales se développent et deviennent plus fonctionnelles, les tubes pronéphriques et mésonéphriques s’atrophient et le métanéphros persiste comme le rein définitif. Ces structures ne sont plus aujourd’hui considérées comme des reins fonctionnels successifs, mais comme des manifestations morphologiques successives d’un même organe excréteur, l’holonéphros.
Le pronéphros
Il dérive du mésoderme intermédiaire [30] [315]. Pendant les premières phases du développement, lorsque les somites sont présents, les cellules du mésoderme intermédiaire de la région cervicale se séparent en un feuillet pariétal externe et un feuillet viscéral interne, définissant une cavité, le néphrocoele. Au niveau de chaque somite, des cordons cellulaires appelés néphrotomes, provenant du feuillet externe, se fragmentent en vésicules épithélioïdes qui s’allongent et se contournent pour produire les tubes pronéphriques (Figure 1) [30] [199].
Chaque tube entre en contact avec un rameau collatéral de l’aorte qui forme un glomérule vasculaire (Figure 2) [30]. L’extrémité distale de chaque tube s’allonge latéralement puis caudalement, avant de fusionner avec le tube se développant immédiatement caudalement à lui [199]. Cette fusion engendre un collecteur longitudinal commun : le conduit pronéphrique primordial. Le conduit pronéphrique s’étend caudalement en direction du cloaque, où il finit par s’aboucher [30] [199]. Chaque tube pronéphrique qui se développe en partie caudale se raccorde au conduit pronéphrique [199].
Figure 2 : Coupe transversale d’un embryon montrant le conduit pronéphrique et les glomérules internes et externes (d’après [199])
La lumière de chaque tube pronéphrique se met en continuité avec le néphrocoele qui s’ouvre dans la cavité coelomique par un orifice appelé néphrostome. Des branches de l’aorte forment des touffes de capillaires, les glomérules, qui peuvent s’invaginer soit dans l’épithélium coelomique (glomérules externes), soit dans la paroi de chaque tube pronéphrique (glomérules internes). L’épithélium entourant chaque glomérule invaginé est appelé capsule de Bowman. La filtration par les glomérules externes est moins efficace que celle des glomérules internes car le filtrat doit être propulsé de la cavité coelomique vers le tube pronéphrique sous l’action des cils des cellules du néphrostome. La formation des glomérules internes est caractéristique des vertébrés supérieurs, et permet de s’affranchir de la connexion entre tubes pronéphriques et cavité coelomique. L’eau et quelques électrolytes sont réabsorbés par les tubes pronéphriques, et les déchets sont évacués vers le cloaque. Chez les mammifères, ces déchets sont transportés du fœtus vers le placenta pour être excrétés par la mère [199].
Le mésonéphros
Sur la fin de l’étape post-somite du développement, une colonne de tissu appelé crête uro-génitale se développe par prolifération du mésoderme intermédiaire dans la région thoraco-lombaire et se projette dans la cavité coelomique. Ensuite, cette structure se divise en une crête génitale médiale et une crête urinaire latérale. Latéralement à la crête urinaire, les conduits pronéphriques, qui s’étendent caudalement vers le cloaque, induisent le tissu mésonéphrique pour qu’il forme des tubes en S dans la crête urinaire.
Le mésonéphros est ainsi formé de tubes mésonéphriques dont chacun a une extrémité médiale aveugle qui s’élargit en une capsule creuse, la capsule de Bowman, qui coiffe et enserre un glomérule vasculaire (Figure 3). Ceci constitue un corpuscule mésonéphrique. Les extrémités latérales des différents tubes se rejoignent et fusionnent dans l’ancien conduit pronéphrique, qui devient alors le conduit mésonéphrique.
Un réseau capillaire péritubulaire se développe autour des tubes mésonéphriques et participe à la réabsorption de l’eau et des électrolytes [199]. Les tubes mésonéphriques sont plus différenciés et plus nombreux que les tubes pronéphriques. En effet, alors qu’un seul tube pronéphrique naît face à un somite, plusieurs tubes mésonéphriques peuvent se former au niveau de chaque somite [199].
Figure 3 : de A à G : Etapes successives de la formation d’un néphron, ses rapports avec le tube collecteur et son arrangement final dans un rein uni lobaire (d’après [199])
C’est au bord médial du mésonéphros que se différencie la gonade. Chez le mâle, une partie des tubes du mésonéphros se raccorde à ceux de la gonade et ses dérivés sont incorporés à l’appareil génital.
Le mésonéphros commence sa dégénérescence avant le début de la période fœtale [30], vers 58 jours de gestation chez les bovins [199]. Une particularité des tubes mésonéphriques chez les ruminants est la présence de glomérules géants associés aux tubes les plus crâniaux. La signification de ces glomérules géants n’est pas comprise. Certains auteurs suggèrent que cela soit en relation avec la cavité allantoïque de grande taille et avec la grande quantité de liquide allantoïdien chez les ruminants.
Le métanéphros
Il provient de la réunion de deux ébauches embryonnaires distinctes, qui s’unissent, se raccordent et se développent pendant la période fœtale.
Le diverticule métanéphrique, ou bourgeon urétérique, provient du conduit mésonéphrique dans sa partie distale (Figure 4). Il chemine dorsalement, puis s’infléchit et s’allonge crânialement, au bord médial du mésonéphros. Il s’agit du futur uretère. Il pénètre dans le blastème métanéphrogène. Son extrémité se renfle pour former l’ébauche du bassinet, qui émet des diverticules qui s’enfoncent dans le blastème pour donner les calices primitifs, qui se ramifient à leur tour pour donner toute l’arborescence des tubes collecteurs. La croissance du bassinet et des calices fait disparaître les tubes des premiers ordres, aboutissant à la formation des papilles, dans lesquelles débouchent les tubes des territoires correspondants.