SUPERPLASTICITE : MECANISMES, MATERIAUX ET PROCEDES
Présentation générale de la superplasticité
La superplasticité est une aptitude de certaines familles de matériaux (alliages légers, i.e. TA6V et Al7475) à subir des déformations exceptionnellement importantes (>300% par exemple) à haute température par rapport aux élongations habituellement inférieures à 30% à rupture par la déformation plastique (Figure 1.1). Elle se caractérise par : – des allongements très grands avant rupture ; – des vitesses de déformation très faibles associées à des contraintes d’écoulement faibles. (a) Pièces déformées (b) Courbes contrainte – déformation Figure 1.1. Comparaison de la déformation superplastique et la déformation plastique L’apparition d’un domaine superplastique est liée largement à la nature du matériau. Une taille de grains plus faible permet d’avoir des vitesses de déformation plus élevées ; si la structure du matériau reste stable pendant le formage, on peut obtenir des grandes déformations grâce à la superplasticité. Des conditions de formage doivent alors être remplies pour garantir une déformation superplastique pour certains matériaux [3, 11, 12] : – une température de mise en forme superplastique le plus souvent comprise entre 50% et 75% de la température absolue de fusion ; – une gamme de vitesse de déformation le plus souvent inférieure à 10-3s -1 ; – une microstructure stable et équiaxe. Il est possible de quantifier globalement l’influence de ces trois paramètres sur le comportement superplastique par des courbes de tendance (Figure 1.2 et Figure 1.3). Figure 1.2. Courbes force-déplacement à différentes températures pour l’alliage ALNOVI-1 avec une longueur utile initiale de 12mm d’éprouvette simple à une vitesse de traverse constante de 2mm/min (correspondante à 1.10-3s -1 ) [13] On peut constater que, sur la Figure 1.2, la température joue un rôle très important dans le procédé de formage superplastique : il existe une température optimale à laquelle la déformation à la rupture atteint une valeur maximale. Pour l’ALNOVI-1, un matériau superplastique basé sur un alliage d’aluminium 5083, cette température optimale est de 520°C
Mécanismes métallurgiques de déformation superplastique à l’échelle microscopique
Le mécanisme physique de la plasticité du matériau classique est basé sur la plasticité des grains, tandis que le mécanisme de la superplasticité est principalement basé sur les glissements des grains (Figure 1.5). On peut constater que, sur la Figure 1.5, les grains ne changent pas leurs formes au cours de la déformation superplastique. Ce comportement entraîne que les matériaux superplastiques sont moins enclins à devenir anisotropes, et que ces matériaux superplastiques présentent moins d’écrouissage que les matériaux ayant la plasticité classique. Figure 1.5. La différence entre la déformation plastique et la déformation superplastique à l’échelle microscopique. Les flèches indiquent l’orientation des cristaux [22] Toutefois, le mécanisme de la superplasticité est inspiré initialement en référence à la déformation plastique. Basé sur les observations expérimentales, de nombreux mécanismes microscopiques de la superplasticité ont été proposés : fluage par diffusion [23] ou par dislocation [24], glissement aux joints de grains (Grain Boundary Sliding, GBS) avec des accommodations [25, 26, 27], GBS coopérative (Cooperative GBS, CGBS) [28], etc. Parmi eux, les mécanismes de GBS avec des accommodations sont des mécanismes les plus acceptés. Selon Langdon [29], le GBS et ses accommodations expliquent essentiellement la totalité de déformation sous les conditions superplastiques optimales. Pour des mécanismes de GBS avec des accommodations, le GBS est le mécanisme principal. Il conduit à la création de lacunes aux jonctions triples si le phénomène d’accommodation est trop lent par rapport au mécanisme de glissement. Néanmoins, avec ce seul mécanisme il est impossible de prédire la déformation superplastique stable qui est observée à l’expérimentation. D’autres mécanismes d’accommodation ont alors été proposés [19] : GBS avec accommodation par diffusion et GBS avec accommodation par glissement de dislocations. Le modèle de GBS avec accommodation par diffusion a été proposé à partir du modèle de Raj et Ashby [25] et celui d’Ashby et Verrall [26]. Il est développé par Padmanabhan [30, 31], Luthy, White et Sherby [32], et Ruano, Miller et Sherby [33]. (a) Configuration initiale (b) Stage intermédiaire (c) Configuration finale Figure 1.6. Modèle d’Ashby-Verrall [17] Le modèle d’Ashby-Verrall est présenté en Figure 1.6. Pour éviter les cavités, un mécanisme d’accommodation par diffusion accompagne le GBS. La déformation superplastique est réalisée par un processus de réarrangement des grains. La forme de grains est conservée à la fin de la déformation, tandis que pendant le processus de réarrangement elle évolue par diffusion des atomes, des cavités pour certains matériaux et des joints de grains (Figure 1.6.b). À la fin du processus de réarrangement une déformation de 0.55 est atteinte (Figure 1.6.c). Ce modèle décrit la superplasticité comme deux processus indépendants : à « faible » vitesse de déformation c’est un écoulement avec accommodation par diffusion et à « haute » vitesse de déformation l’accommodation est liée au fluage (par glissement de dislocations). Ces deux processus ont lieu simultanément.