Performance de ces questionnaires comparés au Gold Standard

Performance de ces questionnaires comparés au Gold Standard

La sensibilité, ou la capacité des questionnaires à repérer les patients avec un SAHOS modéré à sévère, était de 0,84 IC_95% 0,66-0,95 pour le questionnaire STOP BANG, 0,73 IC_95% 0,54-0,88 pour le BOX-2 et 0,45 IC_95% 0,27-0,64 pour l’ESS. La spécificité, ou la capacité des questionnaires à identifier les patients sans SAHOS, était de 0,68 IC_95% 0,43-0,87 pour le questionnaire STOP BANG, 0,21 IC_95% 0,06-0,46 pour le BOX-2 et 0,42 IC_95% 0,20-0,66 pour l’ESS. La valeur prédictive positive, ou la probabilité d’avoir un SAHOS modéré à sévère si le questionnaire de dépistage est positif, était de 0,81 pour le questionnaire STOP BANG, 0,59 pour le BOX-2 et 0,56 pour l’ESS. La valeur prédictive négative, ou la probabilité de ne pas avoir de SAHOS modéré à sévère si le questionnaire de dépistage est négatif, était de 0,72 pour le questionnaire STOP BANG, 0,33 pour le BOX-2 et 0,32 pour l’ESS.Dans un second temps, et devant la présence d’une corrélation statistiquement significative entre la présence d’un SAHOS et l’élévation de la valeur de la mesure du tour de cou, nous avons couplé le questionnaire qui avait obtenu les meilleurs résultats (STOP BANG) en prenant comme seuil de positivité un score ≥ 3, à la valeur du tour de cou ayant obtenu la meilleure sensibilité et spécificité (Figure 10) en utilisant comme seuil de positivité une mesure à ≥ 39 cm (Se = 80,6 % et Sp = 57,9 %), et nous avons de nouveau analysé la performance de ce test combiné.Il existe différentes façons de combiner le questionnaire STOP BANG à la mesure du tour de cou. Soit on combine le STOP BANG ET le tour de cou, soit le STOP BANG OU le tour de cou : – STOP BANG ≥ 3 ET tour de cou ≥ 39 cm : cette combinaison permet d’améliorer la spécificité qui passe de 0,68 (pour STOP BANG seul) à 0,79 IC_95% 0,54-0,94 mais fait perdre de la sensibilité qui passe de 0,84 (pour STOP BANG seul) à 0,68 IC_95% 0,49-0,83. – STOP BANG ≥ 3 OU tour de cou ≥ 39 cm : inversement cette combinaison permet d’améliorer la sensibilité qui passe de 0,84 à 0,97 IC_95% 0,83-1,00 mais fait perdre de la spécificité qui passe de 0,68 à 0,42 IC_95% 0,20-0,66. Ainsi, même si la combinaison STOP BANG ET tour de cou fait perdre moins de points sur la sensibilité et la spécificité (-5 points au total vs -13 points pour l’association OU), il paraît plus intéressant en pratique clinique et si l’on considère qu’il vaut mieux dépister à tort que rater un diagnostic, d’utiliser la combinaison STOP BANG OU tour de cou qui présente une meilleure sensibilité. Cependant, cette combinaison fait augmenter de façon importante le nombre de polygraphie ventilatoires nocturnes à réaliser pour 100 patients suspects comparativement au nombre lié au questionnaire STOP BANG seul. Nous avons donc recherché quel était le seuil de tour de cou nous permettant d’avoir la meilleure sensibilité et la meilleure spécificité transposables en clinique quotidienne, lorsque celui-ci est couplé au STOP BANG et nous avons retrouvé un seuil ≥ 42 cm : – STOP BANG ≥ 3 OU tour de cou ≥ 42cm : cette combinaison apporte une sensibilité de 0,94 IC_95% 0,79-0,99, une spécificité de 0,53 IC_95% 0,29-0,76, une VPP de 0,78 et une VPN de 0,85.  Nous avons également recherché si une différence de seuil de la mesure du tour de cou entre hommes et femmes permettait de gagner en sensibilité et/ou en spécificité comparativement à la combinaison STOP BANG ≥ 3 OU tour de cou ≥ 42cm. La courbe ROC nous a permis de déterminer le seuil de positivité du tour de cou ayant les meilleures sensibilité et spécificité chez les femmes avec une mesure ≥ 40 cm (Se = 0,77 et Sp = 0,89) et ≥ 43 cm chez les hommes (Se = 0,67 et Sp = 0,60). – STOP BANG ≥ 3 OU tour de cou ≥ 40 cm chez les femmes / ≥ 43cm chez les hommes : cette combinaison a une sensibilité de 0,94 IC_95% 0,79-0,99 et une spécificité de 0,58 IC_95% 0,33-0,80. Ainsi, cette combinaison STOP BANG ≥ 3 OU tour de cou ≥ 40 cm chez les femmes / ≥ 43 chez les hommes apporte une sensibilité équivalente à celle de la combinaison STOP BANG ≥ 3 OU tour de cou ≥ 42cm mais permet d’améliorer la spécificité qui passe de 0,53 à 0,58 et semble ainsi être la meilleure combinaison pour notre échantillon.

 

DISCUSSION

Notre travail avait pour objectif de comparer la performance de trois questionnaires dans le dépistage du SAHOS dans une population de patients diabétiques. Nous avons observé une prévalence élevée du SAHOS dans notre population, avec une bonne performance pour le questionnaire STOP BANG comparativement aux deux autres avec une sensibilité de 84% et une valeur prédictive négative de 72%. La combinaison du STOP BANG ≥ 3 OU de la mesure du tour de cou d’une valeur seuil ≥ 40 cm chez les femmes et ≥ 43 cm chez les hommes permettait un gain de sensibilité et de valeur prédictive négative au détriment d’une légère perte de spécificité. La prévalence du SAHOS dans notre population était de 88% de type obstructif dans 100% des cas, aucun patient de notre étude ne présentait un syndrome d’apnée centrale ou mixte. Ceci est probablement lié à la forte prévalence d’efforts ventilatoires au cours du sommeil chez les patients obèses qui représentaient 78% de notre population d’étude. D’après HypnoLaus, une vaste cohorte européenne de 2121 patients s’étant intéressée à la prévalence des TRS en population générale entre 2009 et 2013, la prévalence du SAHOS était de 94%, dont la répartition était la suivante : 75% d’hypopnées et 19% d’apnées obstructives du sommeil. La prévalence de l’apnée centrale et de l’apnée mixte était respectivement de 4 et 2%. Cette même étude avait mis en évidence un lien statistiquement significatif entre la gravité du SAHOS et le diabète de type 2 (OR=2,00 IC_95% 1,05-3,99, p=0,0467), l’HTA (OR=1,60 IC_95% 1,14-2,26, p=0,0292), le syndrome métabolique (OR=2,80 IC_95% 1,86-4,29, p<0,0001), et la dépression (OR=1,92 IC_95% 1,01-3,64, p=0,0292) (15). Bien que non présentés dans cette étude, plusieurs autres facteurs de risque classiquement associés au SAHOS dans la littérature sont à connaître : le sexe masculin (5), l’âge (5-6) et l’obésité (3-4). D’autres études bien menées ont également permis de mettre en évidence une corrélation entre sévérité du SAHOS et mesure du tour de hanche et du tour de cou, indépendamment de l’IMC (3-7-15). Dans notre étude nous n’avons pas retrouvé de corrélation statistiquement significative entre le SAHOS et le sexe masculin, l’âge et l’HTA. Cette absence de lien retrouvé contraste avec les données de la littérature. A noter que nous n’avons également pas retrouvé de corrélation entre SAHOS et le taux sérique de bicarbonates bien qu’il ait été retrouvé dans l’étude du Dr Hadji portant sur le dépistage du SAHOS au sein d’une population de patients métaboliques, ce qui peut s’expliquer par la proportion plus importante de patients obèses dans leur étude mais également par la petite taille de l’échantillon étudié et le fait que les résultats retrouvés soient difficilement transposables à la population générale sans avoir eu recours à une cohorte de validation. En revanche, nous avons mis en évidence une corrélation statistiquement significative entre la présence d’un SAHOS modéré à sévère et le grade d’IMC ainsi que la mesure du tour de cou. Tout d’abord, concernant l’IMC, ce dernier était plus élevé en cas de SAHOS modéré à sévère avec une moyenne de 37,6 ± 10,2 kg/m2, qu’en cas de SAHOS léger ou absent avec une moyenne de 29,8 ± 4,8 kg/m2 (p=0,001). (85) 37 Concernant la mesure du tour de cou, elle était plus élevée chez les patients souffrant de SAHOS modéré à sévère avec une moyenne de 43,8 ± 5,7cm, que chez ceux ayant un SAHOS léger ou absent avec une moyenne de 39,2 ± 5,7cm. Dans notre étude le questionnaire STOP BANG était le plus performant comparé au BOX-2 et à l’ESS, avec un seuil de positivité ≥ 3. Ce dernier permettait d’identifier les patients ayant un SAHOS modéré à sévère confirmé par la polygraphie ventilatoire nocturne avec une sensibilité de 0,84 IC_95% 0,66-0,95. En effet, même si l’utilisation de l’ESS permettait de réaliser moins de polygraphies ventilatoires nocturnes elle faisait rater le diagnostic de SAHOS chez 55% des patients apnéiques alors que le STOP BANG n’en ratait que 16%. Cela montre l’intérêt que pourrait avoir le questionnaire STOP BANG en pratique clinique quotidienne, dans la meilleure détection des patients à risque de SAHOS modéré à sévère comparativement à l’ESS. La spécificité du questionnaire STOP BANG est correcte avec 0,68 IC_95% 0,43-0,87 et reste meilleure que celle du BOX-2 et de l’ESS. Même si cela implique des faux positifs et des enregistrements négatifs, le questionnaire STOP BANG permet d’en réduire les effectifs comparativement au Gold Standard (l’ESS). Les résultats observés dans notre étude rejoignent partiellement ceux des études de validation du questionnaire STOP BANG dans différentes populations :  En population générale : dans la cohorte Sleep Heart Health Study regroupant 4770 participants, l’équipe de Silva et al a retrouvé une prévalence du SAHOS modéré à sévère de 12,7% avec une sensibilité de 88%, une spécificité de 34% et une VPN à 95% avec le questionnaire STOP BANG (86).  Dans les populations de cliniques du sommeil : de nombreuses études réalisées sur un large échantillon de 3175 patients entre 2010 et 2015 retrouvent pour le questionnaire STOP BANG une sensibilité de 94% IC_95% 93-95, une spécificité de 34% IC_95% 31-36, une VPP à 72% IC_95% 70-74 et une VPN à 75% IC_95% 7-79 (64).  Dans la population de patients pré-chirurgicaux : la méta-analyse de Nagappa et al portant sur un effectif de 1002 patients pré-chirurgicaux inclus dans trois études, retrouvait une sensibilité du questionnaire STOP BANG de 91% IC_95% 87-93 avec une VPN à 84% IC_95% 79-88 et une spécificité médiocre à 32% IC_95% 28-36 et une VPP à 46% IC_95% 42,7-50 (64). En effet, les résultats de la littérature concernant le questionnaire STOP BANG retrouvent souvent une spécificité médiocre de l’ordre de 30 à 35% alors que dans notre étude elle était plus élevée avec une Sp de 68% mais avec un intervalle de confiance très large 0,43-0,87 qui s’explique par le faible effectif de notre échantillon. Dans la quasi-totalité des études, la spécificité du questionnaire STOP BANG était médiocre. En 2013, l’étude de Chung et al, portant sur 384 patients dont 175 hommes et 209 femmes d’âge moyen 60 ± 12 ans et d’IMC moyen à 30,9 ± 7 kg/m2, a analysé la combinaison du STOP BANG au taux de bicarbonates sériques. Les résultats de cette combinaison ont été validés dans une deuxième cohorte indépendante, aussi appelée cohorte de validation, et permettent de mettre en évidence une nette amélioration de la spécificité qui est passée de 34% IC_95% 22,2- 38 39,7 à 81,7% IC_95% 73,5-83,3 et une importante réduction de la sensibilité passant de 88,3% à 37,7% IC_95% 26,9-49,4. Ainsi, pour pallier ce manque de sensibilité associé à cette combinaison, les auteurs ont proposé un dépistage du SAHOS en deux temps. Initialement, ils préconisent d’identifier les patients à risque de SAHOS modéré à sévère ayant un score ≥ 3 au questionnaire de STOP BANG. Puis dans un deuxième temps ils prévoient un classement de ces patients identifiés comme étant un risque, en fonction de leur taux sérique de bicarbonates (< ou ≥ 28 mmol/L). N’ayant pas retrouvé de corrélation statistiquement significative entre STOP BANG et taux de bicarbonates dans notre étude, nous n’avons pas appliqué cette combinaison. Cependant, notre étude ayant mis en évidence un lien statistiquement significatif entre SAHOS et tour de cou, nous les avons combinés de diverses manières. Dans notre étude, l’utilisation de la mesure du tour de cou en combinaison avec le questionnaire STOP BANG avec un seuil de positivité ≥ 39 cm parmi les patients identifiés comme à haut risque, a permis d’améliorer la spécificité du test mais aux dépens de sa sensibilité. Nous avons alors essayé de rechercher une combinaison offrant des valeurs de sensibilité, spécificité, VPP et VPN meilleures que l’utilisation du STOP BANG seul et intéressantes sur le plan clinique, en prenant en considération qu’il vaut mieux dépister à tort que rater un diagnostic de SAHOS. Nos résultats montrent que c’est la combinaison STOP BANG ≥ 3 OU tour de cou ≥ 40 cm chez les femmes / ≥ 43 chez les hommes qui est la plus performante pour notre échantillon et qui semble intéressante en pratique clinique. Cette combinaison permet une bonne amélioration de la sensibilité et de la VPN, aux dépens d’une légère perte de spécificité qui reste cependant acceptable. Pour rappel, la mesure du tour de cou fait partie d’un des 8 items du questionnaire STOP BANG. Ainsi, le fait que cette combinaison STOP BANG ≥ 3 OU tour de cou ≥ 40 cm chez les femmes / ≥ 43 chez les hommes soit la plus performante dans notre échantillon met en évidence le pouvoir discriminant du tour de cou. En effet, ce dernier a une forte valeur prédictive de la sensibilité et de la spécificité du questionnaire STOP BANG et représente un marqueur très important permettant de faire la distinction entre SAHOS modéré à sévère et le SAHOS léger ou absent. Cela montre que la pondération du tour de cou dans le questionnaire STOP BANG pourrait être améliorée et augmentée afin de rendre ce score plus performant. Parmi les trois questionnaires étudiés, la sensibilité la plus faible était retrouvée avec l’Échelle d’Epworth (45% IC_95% 27-64). Le fait que cette dernière évalue un symptôme certes important du SAHOS mais non pathognomonique, pourrait expliquer cette médiocre sensibilité. La sensibilité retrouvée dans notre étude est sensiblement similaire à celle décrite dans la littérature (61). Le questionnaire BOX-2 avait une sensibilité correcte de 73% IC_95% 54-88 mais présentait la spécificité la plus faible comparativement aux deux autres questionnaires avec 21% IC_95% 6-46 ce qui signifie donc que 8 patients ayant un SAHOS modéré à sévère ont été classés à faible risque à tort, ils sont donc des faux négatifs, et ne seraient de ce fait pas remboursés pour leur traitement. Cet élément suggère que dans la population que nous avons étudiée, beaucoup de patients apnéiques sont peu symptomatiques, ce qui pourrait représenter une entrave à la compliance au dépistage et au traitement. C’est ce qu’une étude de 2017, réalisée sur une population de patients diabétiques de type 2, a montré. En effet, sur les 818 patients de l’étude, 738 ont été identifiés comme présentant un risque élevé de SAHOS lors d’un dépistage téléphonique réalisé à l’aide 39 du questionnaire STOP BANG, soit une estimation de la prévalence du SAHOS à 90,1% dans cet échantillon. Seulement 28,9% des patients identifiés à haut risque de SAHOS, soit 236 patients, ont accepté de réaliser un enregistrement diagnostic du sommeil, et parmi ceux chez qui l’on a détecté un SAHOS seulement 128 ont accepté la mise en place d’un traitement (87)

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