Le storytelling
Je parlais plus haut d’une stratégie que les entrepreneurs en général utilisent pour parler de leur parcours : le storytelling.
Le storytelling est une méthode de communication fondée sur une structure narrative du discours qui s’apparente à celle des contes, des récits, elle consiste à raconter des histoires. Cette expression peut avoir une signification beaucoup plus large, notamment dans les pays anglo-saxons où une story (histoire) désigne aussi un article de journal, par exemple.
En général, celui qui raconte une histoire le fait dans un but précis. Cela peut être pour son propre intérêt, ou pour servir des intérêts plus collectifs. Le storytelling a donc deux principaux buts :
Celui de convaincre ou persuader,
Celui de manipuler : Une dérive du storytelling, qui devient encore plus complexe quand on sait que la manipulation n’est pas qu’une affaire d’intention, mais aussi de perception par l’auditeur de l’histoire.
Raconter une histoire fausse, c’est manipuler. Au Cameroun, c’est donc un phénomène qui prend de plus en plus de l’ampleur. Pour conserver une certaine rigueur scientifique, il faudrait noter qu’il ne s’agit pas uniquement d’une réalité camerounaise : dans pratiquement tous les pays, les entrepreneurs utilisent le storytelling beaucoup plus dans le but de manipuler afin de se présenter comme étant des héros. Et pour y arriver, les entrepreneurs polissent de façon systématique l’histoire de leurs entreprises afin de la rendre plus romantique, romantisme dans lequel il existe un seul héros : EUX, BIEN ÉVIDEMMENT !
Prenons l’exemple d’un entrepreneur X qui est invité dans une émission de télévision Y pour parler de son entreprise Z. En général, voici comment se déroule l’échange :
« (Présentateur de l’émission Y ) : Monsieur X, comment allez-vous ?
– Entrepreneur (X) : Je vais très bien et surtout merci pour l’honneur que vous me faites en me donnant l’occasion de participer à votre émission.
– Y : Alors, si vous êtes invité ici, c’est pour nous parler de votre entreprise Z, comment avez-vous fait pour la monter ?
– X : Vous savez, nous sommes dans un pays très difficile. J’ai perdu mes parents très tôt, ma famille m’a abandonné et il fallait que je me batte tout seul. J’avais 2000 FCFA quand je débutais. Je me demandais bien comment j’allais y arriver. Mais, je me suis lancé, j’ai pu trouver une stratégie pour contourner les obstacles sur mon chemin ensuite, en ayant progressivement vendu de l’eau en sachet, des oranges, des papayes, des habits et même des beignets, j’ai pu faire progresser mon capital. Je ne dormais pas la nuit, j’épargnais 75 FCFA par jour, j’arrivais difficilement à m’alimenter chaque soir, car mon budget nutrition était de 25 FCFA par jour.
Plus tard, avec beaucoup de sacrifice, j’ai pu gravir les échelons et aujourd’hui, le résultat est ce que vous voyez. J’ai fondé mon entreprise Z qui emploie aujourd’hui 120 personnes avec un chiffre d’affaires de 2 milliards/an.
– Y : Mais c’est remarquable ça monsieur X, partir de 2. 000 FCFA pour recruter aujourd’hui 120 personnes, quel est votre secret ?
– X : C’est le travail, voilà mon véritable secret. Les jeunes ne veulent plus travailler. La détermination, la rigueur et surtout le travail… »
Voilà de façon caricaturale comment se déroulent les échanges la plupart des fois. Vous allez remarquer déjà que, lors sa narration :
PERSONNE NE PEUT VÉRIFIER LA VÉRACITÉ DES PROPOS DE L’ENTREPRENEUR !!!
En réalité, il raconte ce qu’il veut (son histoire qu’il peut modeler à sa convenance en fonction du but qu’il souhaite atteindre) et le journaliste confirme juste ses propos puis rebondit en posant des questions tout simplement. Et dans cette histoire, c’est donc lui le Si un jour dans l’histoire de son entreprise il a bénéficié un financement de son père, un soutien d’une de ses connaissances, une opportunité (ce que j’appelle des vents favorables) qui en réalité ont permis de faire décoller son activité (qui ne fonctionnait pas au point de le pousser à ces réalisations), vous entendrez très peu ces éléments-là dans son histoire. Tout ce qui ne fait pas de lui le HÉROS de l’histoire sera tout simplement effacé la plupart des fois.
Si au départ il se lançait juste pour survivre, chômage oblige, et qu’il réussit (déjà qu’ils sont très peu à y arriver tout en sachant que la réussite est un chemin et non une destination), il viendra raconter qu’en fait il voulait sauver l’humanité, raison pour laquelle il s’est lancé. Dans son histoire, un peu comme un artiste qui passe à la télévision, on ne verra que lui, mais très peu l’arrangeur, le réalisateur, le metteur en scène, le guitariste, le pianiste et toutes ces personnes de l’ombre-là qui en réalité, sont les véritables personnes qui ont permis qu’il puisse atteindre ce niveau, lui n’étant que la partie visible d’un iceberg très profond !
J’ai un ami qui s’appelle Cédric, pousseur au marché Mokolo (un marché de Yaoundé, Capitale du Cameroun) qui chaque fois qu’il écoute ce genre de discours à la télévision me dit :
« Claudel, lorsque ce monsieur qui a réussi dit que les jeunes ne travaillent plus, et qu’il faut travailler dur, qu’est-ce que cela signifie ? Que dorénavant en sortant de chez moi à 4h, je dois désormais sortir avec 2 pousses ? Puisque le travail que je fais est déjà suffisamment difficile ! »
Voilà le genre d’interprétation qui prête à confusion que cela peut entraîner ! Tout le monde à la télévision veut être socialement correct, chacun veut se présenter comme un héros lorsqu’il parle de son histoire entrepreneuriale, pourtant, elle n’est pas si mystérieuse. Pour comprendre ce que c’est que le socialement correct, allez dans une salle de classe et posez la question :
« Ceux d’entre vous qui regardent fréquemment les films pornographiques, levez la main ».
Le résultat est presque toujours le même, personne ne veut assumer qu’il consomme ces contenus. Pourtant, les producteurs et vendeurs de contenus pornographiques finissent leurs stocks régulièrement, leurs sites internet sont saturés de visiteurs ; qui regardent donc ces contenus ? Les animaux ?
Personne ne devient milliardaire en vendant les arachides dans un plateau ou alors des oranges, PERSONNE ! Toutes ces personnes ont bénéficié de vents favorables, sauf qu’ils n’en parleront jamais dans les médias. Donc, n’essayez jamais de répliquer ce qu’ils disent, puisque beaucoup de pièces manquent au puzzle, et il faut faire un peu d’intelligence économique pour bien le comprendre. Certains, pour rendre leur activité rentable volaient littéralement le courant électrique afin que les factures ne diminuent pas leur rentabilité, d’autres procédaient par des manœuvres de corruption pour gagner des marchés…mais, cette partie dark de l’histoire n’apparaitra jamais dans leur storytelling !
La vie et l’univers entrepreneurial sont comme les courbes d’un électrocardiogramme (ECG) à savoir, les hauts et les bas. Il est important de raconter de vraies histoires à ceux qui souhaitent se lancer, les véritables difficultés, les moyens que vous avez pu mettre en œuvre afin de les surmonter, les facilités familiales, les soutiens, les moments de dépression, afin qu’ils puissent mieux se préparer en conséquence et non les faire rêver, qu’ils croient que c’est romantique pourtant, c’est un TSUNAMI 4qui les attend sur le parcours entrepreneurial et ceci tous les jours de leur vie !
Car, en réalité, nous sommes humains, certains ont des atouts et d’autres pas, nous avons juste besoin de nous inspirer de vos histoires, tout en sachant qu’il est IMPOSSIBLE de les reproduire, car les circonstances ne seront jamais les mêmes. Vouloir à chaque fois raconter des histoires romantiques à 180 degrés à l’opposé de la réalité ne fait pas de vous quelqu’un de meilleur, mais juste un manipulateur. L’ironie est arrivée à son comble, au point où certains entrepreneurs de famille aisée et qui ont donc bénéficié de facilités financières et logistiques pour monter leur activité veulent à tout prix raconter comment ils n’avaient rien au début afin de toujours jouer les héros qui ont débuté dans les difficultés extrêmes, mais grâce à leur courage et leur détermination de guerriers, ont pu bâtir un empire.
MENTIR NE VOUS GRANDIT PAS, c’est juste le reflet de votre instabilité émotionnelle et psychosociale. Rédiger et raconter des storytelling c’est bien sur le plan marketing, mais raconter des histoires réelles aux entrepreneurs c’est encore mieux. De ceci, j’en tire une autre recommandation à respecter, c’est de cesser de regarder la télévision.
Onde océanique provoquée par un séisme ou une éruption volcanique, provoquant d’énormes vagues sur les côtes
Cette équation matérialise la méthodologie à appliquer pour implémenter chacune des 100 idées de projets de cet ouvrage.
Premièrement, prenez un bol de bouillie avec des beignets.
C’est fait ?
Vous pouvez maintenant lire la suite…
Lorsque j’étais au secondaire, j’adorais les mathématiques. Même en dormant, je pratiquais cette discipline qui me passionnait particulièrement. Cela me poussait, au-delà de mes performances scolaires, à faire des concours de mathématiques internationaux, c’était ma véritable passion. Ce sont juste les circonstances qui ont voulu que je fasse autre chose dans ma vie…
Cependant, pour ne pas faire disparaître cette flamme qui m’animait, j’ai décidé d’introduire dans toutes mes activités une touche de mathématiques, à savoir :
La démonstration,
Les statistiques,
Les probabilités,
Les algorithmes,
Les équations,
et bien plus encore…
Et surtout, exclure toute forme de récitation (clin d’œil à mes études de médecine).
Tout cela m’a permis de toujours avoir un esprit critique assez pointu. Mes questions préférées commencent par « pourquoi » et « comment », une des raisons pour lesquelles j’adore être critiqué. C’est tellement jouissif parce que les divergences d’opinion sont l’essence même de la science. C’est de la collision de biens immatériels (la connaissance en l’occurrence) que naît le véritable savoir complexe. En entrepreneuriat, il y a des questions que beaucoup de personnes me posent toujours :
Comment faire de sa passion un véritable business ?
Comment trouver une idée de projet ?
Ou encore la fameuse question :
Comment trouver des financements pour son projet ?
Pour y répondre, j’ai développé une équation mathématique que j’appelle mon équation entrepreneuriale. Cette équation doit être à la base de tout projet entrepreneurial au début, car elle a pour but de transformer votre idée en un projet concret. Elle consiste à la résolution de cette équation à trois inconnues : X=Y+Z
Je sais que de manière générale peu sont ceux qui aiment les mathématiques, mais lisez la suite. Je vais vous l’expliquer le plus simplement possible.
Dans cette équation :
X c’est le problème que vous avez identifié dans la société, que vous essayez de résoudre à l’aide de votre talent, votre passion ou encore des compétences que vous avez acquises à l’école ou non, ou à l’aide de votre équipe ayant des compétences complémentaires.
Y c’est la population cible, c’est-à-dire les personnes qui présentent en majorité le problème (X) que vous avez identifié et qui auront le plus besoin de votre solution.